Chapitre 14

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Chapitre 14. 

Si les aires communes lui étaient devenues pénibles, Isaac devait avouer qu'il appréciait la nouvelle quiétude de sa cellule. Il aimait savoir que, pour une fois, il pouvait venir s'y réfugier et que, à l'intérieur de celle-ci, il était vraiment en sécurité. Il avait même pris un moment, avec Wayne, pour aller à la bibliothèque de la prison et louer un livre ou deux qu'il pouvait désormais prendre le temps de lire en paix sans risquer d'être dérangé. Il avait été surpris de constater que, à la bibliothèque, les livres étaient triés un par un pour s'assurer qu'ils étaient appropriés pour les détenus. Par exemple, la bibliothèque éliminait toutes les histoires faisant l'apologie du crime ou contenant des passages sexuels. Ça coupait énormément d'œuvres et d'auteurs, mais ça ne dérangeait pas vraiment Isaac. Il se contenterait de ce qu'on lui donnerait. Il n'était pas assez con pour penser qu'il aurait un traitement de choix et plusieurs libertés en prison ! Quand les livres étaient retournés à la bibliothèque, ils étaient ensuite minutieusement inspectés pour s'assurer qu'ils étaient intacts. Certains détenus se servaient parfois de bouquins – même de la bible, quelques fois – pour créer des cachettes pour la drogue, des armes, des téléphones portables ou d'autres matériels interdits. Pour ça, ils faisaient un trou à l'intérieur en découpant grossièrement les pages.

La deuxième nuit en solo dans sa cellule lui parut encore plus calme et paisible que la première. Bien sûr, la prison en elle-même n'était jamais vraiment silencieuse – il entendait toujours des cris et des coups frappés contre les murs –, mais au moins, sa « chambre » l'était.

Même si Chaz n'était pas là, il n'osa pas fouiller ses affaires. Même si les paquets de chips – voire même les soupes – lui paraissaient alléchants plus que jamais, vu ce qu'on lui servait à la cantine, il n'y toucha pas. L'homme lui avait fait bien des crasses, mais Isaac avait encore un respect pour ses effets personnels. Il n'aurait pas aimé que l'on fouille dans ses propres affaires durant son temps à l'isolement. De toute manière, il ne possédait pas grand-chose qui puisse faire l'envie d'un autre détenu... Il se contenta d'utiliser la couverture de Chaz même si elle empestait son parfum musqué. Il lui devait bien ça, après tout. Il n'avait aucun remord à le la lui empruntée.

— Est-ce que tu as envie d'aller voir un match de basket ? Le quartier nord joue contre le nôtre aujourd'hui, lui demanda Wayne au petit-déjeuner.

Pour dire vrai, il n'en avait pas vraiment envie – ses livres fraîchement acquis l'appelaient bien plus –, mais s'il ne se faisait pas voir, il risquait de devenir une proie de plus en plus facile pour les détenus. Il n'avait pas envie de devoir se cloître des journées entières dans sa cellule pour les éviter.

— Allons affronter les lions, dit-il en souriant.

West Island était une vraie jungle.

— Ça, tu peux le dire : il risque d'avoir de la bagarre aujourd'hui !

— Comment ça ?

— Il va sûrement il y avoir une rixe. C'est souvent comme ça quand deux unités s'affrontent, mais plus encore aujourd'hui. Vu qu'il manque un joueur, les rivalités risquent d'être à feu et à sang !

— Il ne faudrait sans doute pas manquer ça.

Isaac était quand même curieux de voir comment ce genre de chose se passait. Après tout, lui aussi, serait peut-être, tôt ou tard, impliqué dans ce genre de conflit. Il devait apprendre à se défendre.

— Ce sera l'événement de la semaine !

Ils terminèrent de manger et se dirigèrent vers le gymnase où une bonne trentaine de détenus s'entassaient déjà pour voir le spectacle. Ils s'installèrent dans les gradins, regardant les équipes se mettent en place.

Le match commença au coup de sifflet d'un gardien qui arbitrait.

Rapidement, leur unité se retrouva distancée par l'équipe adversaire.

— Hey, il m'a frappé ! Vous avez vu ça ? Franchement, mettez-lui un carton ! s'exclama furieusement un des joueurs face à l'arbitre.

Le joueur qu'il accusait leva son poing et le défia, torse contre torse.

— Moi ? Je t'ai frappé ? Tu dis juste ça parce que vous êtes en train de perdre.

L'arbitre siffla et les sépara par la force.

Un peu plus tard, les deux mêmes joueurs se refirent face et l'un parvint à faire manquer le tir au panier du second.

— À quoi tu joues ?!

— Arrête de te plaindre !

— Ne me touche pas !

— Tu devrais jouer pour de vrai au lieu de faire ta minette ! Vous êtes vraiment rien sans votre joueur étoile !

La partie se termina et, sans grande surprise, leur unité perdit. Les points n'étaient même pas vraiment serrés... Les hommes qui composaient l'équipe étaient furieux. Ils jetèrent violemment le ballon au sol et se dépêchèrent de récupérer leurs affaires pour sortir du gymnase. Certains, malgré l'insistance des gardiens, refusèrent de serrer la main de l'adversaire. L'un cracha dans sa paume avant de le faire.

Quand Isaac et Wayne descendirent des estrades, l'équipe passa près d'eux et trois prisonniers s'arrêtèrent à leur hauteur.

— C'est à cause de toi que Chaz est au trou, non ? Je te reconnais.

— D'abord Johnsson et ensuite, lui. Tu le fais exprès ou quoi ? fit le deuxième.

— On a perdu par ta faute, rajouta l'autre en lui jetant un regard mauvais.

Le premier le bouscula brutalement d'un coup d'épaule en passant, puis ils sortirent un à un du gym. Isaac se frotta le bras et regarda Wayne.

— Ne t'inquiète pas, ils sont juste énervés d'avoir perdu, ils s'en remettront. Les gens sont mauvais perdants par ici.

— Je vois ça..., soupira-t-il en se demandant si les choses s'amélioreraient vraiment avec le temps ou si elles ne deviendraient pas de pires en pires.

Entre les barresOù les histoires vivent. Découvrez maintenant