Chapitre 55.
— Outch ! gémit Isaac en se frottant le bras.
Wilds le relâcha avec un sourire.
— Tapette, se moqua le policier en s'éloignant de quelques pas.
Ils étaient dans le gymnase (pour le moment, il n'y avait pas de match de basket-ball de prévu et ils étaient presque seuls dans le grand espace, les autres prisonniers préférant faire du sport sur les machines dans la salle d'à côté) et il s'entraînait depuis plus de deux heures avec Isaac. Il lui avait montré sa routine matinale d'exercices et cherchait maintenant à lui apprendre à faire une clef de bras.
— Tu en es une aussi, je te ferais remarquer. Pourquoi est-ce que tu couches avec des mecs si tu as une femme, hein ?
L'agent soupira en craquant sa nuque. Il n'avait pas espéré que ce sujet de conversation reviendrait aussi vite. Or, il savait qu'il devait des explications à Isaac, surtout après ce qui s'était passé entre eux.
— C'est compliqué... disons que nous avons... un arrangement.
Le Californien sourcilla.
— Mais encore ?
— Je ne suis pas souvent à la maison avec mon job.
— Tu penses que ça te donne le droit de... –
— Laisse-moi finir, le coupa le policier avant qu'il n'ait plus loin, pressant la morale qu'allait lui faire Isaac. Je viens d'une famille bien nantie où être policier ou militaire est une affaire de génération. Mon grand-père faisait partie des forces de l'air mon père était marine et mon frère a été dépêché en Afghanistan. Tu vois un peu le genre, hein ? Je n'étais déjà pas très souvent chez mes parents, toujours en mission, et je ne voulais pas me casser la tête à enchaîner des tas de rendez-vous, afin de trouver la fille parfaite qui pourrait plaire à ma mère. Alors, quand elle m'a dit qu'une de ses amies du club de lecture avait une fille d'à peu près mon âge, je l'ai laissé nous organiser un souper. Tout s'est fait très vite et les fiançailles ont été prononcés dans la semaine. Entre temps, quand j'ai fait l'école de police, j'ai découvert que les mecs me plaisaient, mais c'était déjà trop tard, puis je savais que, quoiqu'il en soit, femme ou homme, je n'aurais jamais le temps pour une vraie relation. Adeline – c'est son nom – a fini par découvrir mon attirance pour la masculinité et nous avons eu une bonne discussion. Elle m'a avoué que, comme je n'étais jamais à la maison, elle voyait régulièrement un amant. On a donc pris cette entente. On continuait de vivre ensembles, parce que c'était confortable, parce que c'était bien vu – grâce à elle, j'ai obtenu des promotions dans ma carrière – et parce que ça plaisait à nos parents, mais chacun pouvait vivre sa vie sexuelle comme il l'entendait. Je ne porte pas mon alliance en mission par souci de sécurité. Donc, voilà comment j'en suis arrivé là, quelque chose à y redire ?
Isaac resta muet pendant de longs instants. Il était partagé. D'un côté, l'entente entre les deux mariés lui paraissait parfaitement légitime et correcte, mais de l'autre, il avait du mal à comprendre comment le mariage pouvait être pris aussi peu sérieusement.
— Mes parents sont mariés depuis quarante ans, finit par murmurer Isaac, et je ne crois pas qu'ils aient vu qui que ce soit d'autre en-dehors de leur union durant toutes ces années.
— Toutes les relations ne peuvent pas être aussi parfaite.
En réalité, Wils était plutôt satisfait de la vie qu'il menait et de sa situation maritale. Même s'il n'entretenait pas de relation sexuelle passionnée avec Adeline, elle était une fille en or et il l'adorait plus que tout. Il était parfaitement heureux.
— Tu parles encore à tes parents ? rajouta-t-il par curiosité. Je ne t'ai jamais entendu parler de ta famille.
Isaac se pinça la lèvre et baissa les yeux.
— Plus vraiment..., admit-il, j'ai coupé les ponts il y a quelques années. Les choses ont commencé à être plus difficile pour moi et je ne voulais pas leur attirer des problèmes. Puis, j'ai atterri ici.
Le sujet paraissait sensible, alors Wilds préféra en changer.
— On reprend l'entraînement, finit-il par déclarer.
Le brun s'efforça de sourire.
— D'accord. Alors, si je comprends bien... c'est... comme ça qu'on fait une clef bras ?
Il joignit l'action à la parole et empoigna l'avant-bras de Wilds pour le lui retourner brusquement dans le dos. Sous le coup de la surprise, l'agent réagit uniquement quand une vive douleur le prit à l'épaule.
— Très bien, très bien, tu as tout bien compris ! s'exclama-t-il pour qu'Isaac le lâche. Tu apprends sacrément vite, dis-moi !
Le Californien s'exécuta avec un large sourire de satisfaction. Wilds le félicita une nouvelle fois d'une virile claque au milieu du dos, puis fronça les sourcils.
— Qu'est-ce qu'il y a ? demanda Isaac en sentant l'homme se raidir.
— Il est là. Qu'est-ce qu'il veut ?
Le brun tourna la tête pour regarder par-dessus son épaule et, s'attendant à voir Chaz, il remarqua plutôt la présence de Wayne qui, au fond du gymnase près des estrades, faisait les cent pas en les épiant du regard.
— Je ne sais pas. Il est peut-être juste venu s'entraîner aussi.
Son interlocuteur secoua la tête.
— Je ne penserais pas. Je vais aller voir ce qu'il veut.
Isaac sentit son estomac se nouer.
— Sois prudent.
— Ne t'en fais pas avec moi, je suis un agent surentraîné, répliqua le policier avec un clin d'œil tout en s'éloignant déjà vers le blond.
Il était confiant, mais Wayne aussi l'était...

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Entre les barres
Action[𝑀 𝓍 𝑀] Après s'être fait arrêter avec deux kilos de cocaïne, Isaac est placé en détention à la prison de West Island. Il doit partager sa cellule avec un dénommé Chaz qui se trouve être le chef des prisonniers à l'intérieur de l'établissement ca...