Chapitre 25

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Chapitre 25.

Au déjeuner, Isaac croisa Wayne dans la file pour récupérer un cabaret. Le jeune homme n'avait pas l'air dans son assiette, mais quand il voulut s'enquérir de son état, il se rappela ce que lui avait ordonné Chaz à ce propos. Tournant instinctivement la tête, il croisa le regard foudroyant de l'Afro-américain depuis l'autre bout de la cantine. Il renonça tout de suite à l'idée. Du moins, pour l'instant.

Pourtant, pour respecter la bonne volonté de son protecteur, un problème restait à l'horizon : où allait-il manger ? Il ne faisait partie d'aucun groupe... Manger seul n'était pas vraiment une option... Cela ferait de lui une proie plus qu'évidente, sans parler qu'il n'y avait pas vraiment de tables libres pour les solitaires. Généralement, même ceux qui n'avaient pas de groupe avaient, au moins, des amis.

Son plateau dans les mains, Isaac observa la cafétéria lui paraissait soudainement être une terrible jungle.

— Ramène ton cul ici.

Il se tourna vers la voix qui l'avait interpellée : Chaz était décidément dans un de ses bons jours. Ses compagnons ricanaient autour de lui. Déglutissant, Isaac prit son courage à deux mains et rejoignit la table de son codétenu. Quelques commentaires salaces furent alors prononcés par les autres résidents de la table, mais depuis son arrivée, le brun avait entendu pire.

— Qu'est-ce que tu attends ? Assis-toi, lui ordonna l'Afro-américain.

Isaac inspira, puis s'assit entre Chaz et un de ses amis qui se poussa pour lui faire une place. Il se souvint alors de ce que lui avait dit Wayne lors de son premier jour ici : « tu ne dois pas t'asseoir avec les Blacks » ... et qu'est-ce qu'il était en train de faire ? Exactement le contraire...

Ayant rejoint une table de motard, Wayne lui jeta un regard désapprobateur depuis l'autre extrémité de la cantine, mais Isaac se contenta de l'ignorer en préférant se concentrer sur la nourriture. Il se sentait mal à l'aise dans l'habitude qu'il adoptait et il aurait aimé avoir l'occasion de s'expliquer avec Wayne sur ces décisions, mais il avait conscience que Chaz ne lui accorderait pas ce privilège. Peut-être pourrait-il trouver le moyen de le faire secrètement... même si ce serait difficile avec la surveillance constante de son codétenu qui paraissait être au courant de tout ce qui se passait entre les murs de West Island.

À la table de Chaz, tout le monde semblait avoir accepté sa présence en tant que toutou de leur chef et les conversations allaient bon train sans se soucier de sa présence. Isaac se sentait tout petit entouré de tous ces grands hommes imposants à la peau noir. Aucun d'eux n'avait l'air d'être un enfant de chœur. Ils avaient probablement tous été condamnés à de longues peines.

À un moment, la main de Chaz glissa tendancieusement sur sa cuisse. Le cœur d'Isaac s'accéléra sous la peur panique que l'homme puisse faire quoique ce soit devant tout le monde. Il devait s'efforcer de se souvenir que des gardiens surveillaient la cantine, armes à portée de la main.

Il ne fut soulagé que lorsque les quinze minutes allouées au déjeuner sonnèrent. Il fut alors reconduit au salon de coiffure par un garde comme la dernière fois. Cette nouvelle routine – même si elle découlait d'une punition – lui plaisait assez, pour tout dire. Il préférait bosser dans le salon plutôt que de tenter de survivre dans un aquarium rempli de requins toute la journée.

Ronaldo l'accueillit tout aussi souriant que la veille. Isaac fut assigné à l'inventaire des produits pour la matinée. Il devait noter chaque bouteille de gel, chaque bouteille de shampooing, chaque bouteille de conditionner une à une sur une feuille, alors que les clients s'enchaînaient un à un.

Un peu avant le dîner, un client qu'Isaac n'attendait pas fit son entrée. Johnsson était là, Ronaldo venant le saluer avec un grand sourire. L'homme était clairement venu le narguer. Terminant de remplir sa fiche d'inventaire, Isaac serra les dents en l'observant de loin. Ronaldo était en train de lui laver les cheveux.

Le Californien les évita au maximum. Il avait envie d'éclater la tête de Johnsson presque autant qu'il avait envie de se rouler en petite boule et de pleurer. Néanmoins, quand Ronaldo commença à couper les cheveux de son client, il n'eut plus le choix.

— Isaac ! l'appela le coiffeur. Viens ramasser les cheveux !

La main tremblante, il attrapa le balai et le porte poussière. Il pouvait apercevoir le sourire moqueur de Johnsson dans le miroir.

— Alors, comme ça, tu travailles ici ? lui demanda son violeur sur un ton faussement sympathique.

Les doigts d'Isaac se serrèrent davantage sur le manche du balai.

— Ne fais pas comme si tu l'ignorais, répliqua-t-il froidement.

— Je me demandais juste où je pourrais te trouver, maintenant... on dirait presque que tu m'évites, ces derniers jours...

Johnsson laissa volontairement traîner sa phrase, rendant Isaac fou. Ronaldo assistait à la conversation sans comprendre les sous-entendus dont il était question.

— Ah, non, j'oubliais, rajouta son violeur, tu es devenu le petit toutou de Chaz. Ça m'étonne qu'il ne t'ait pas encore mis de collier !

— Je ne suis pas un chien ! aboya-t-il.

Johnsson se contenta de ricaner.

— Ce n'est pas ce que l'on dit... je suis sûr que Chaz aime quand tu le suces, continua-t-il de le provoquer.

Isaac était à bout de nerfs. Voyant que les choses s'envenimaient, Ronaldo l'envoya faire autre chose à l'autre bout du salon et il termina seul la coupe de Johnsson. Une fois que ce dernier eut quitté le salon, non sans lui laisser un regard moqueur, le coiffeur vint le voir.

— Qu'est-ce que c'était que, ça ? À l'instant ? Que s'est-il passé avec avec Johssnon ?

Le Californien se mordit la lèvre. Ce qui s'était passé avec Johnsson ne regardait personne. Encore moins Ronaldo.

— Rien..., murmura-t-il en baissant les yeux.

— Je n'y crois pas une seconde. J'en suis à ma deuxième incarcération, Isaac, on ne me l'a fait pas, à moi. Alors ?

Isaac s'obstina. Il préférait ça.

— Rien, puisque je le dis !

— Et avez Chaz, alors ? Tu es devenu livide quand Johnsson a parlé de lui.

Le plus jeune secoua la tête. Même si la mention de Chaz y avait été pour quelque chose, c'était davantage la mention de la pipe qui lui avait retourné l'estomac, le ramenant à cette journée fatidique dans les douches. Cette fois, il ne dit rien. Ronaldo enchaîna donc :

— Je ne suis pas naïf, Isaac. Moi aussi, j'ai été, un jour, un petit nouveau à West Island. Je sais que même si personne ne dit rien... le sexe est monnaie courante. Écoute bien ce que je vais te dire : si tu veux avoir une chance d'obtenir les faveurs de Chaz, si tu veux avoir un pouvoir et améliorer ta relation avec lui, tu dois prendre le contrôle et des initiatives. Ne le laisse pas te traiter comme un chien – ni lui ni personne – force-le à te regarder dans les yeux quand il fait ce qu'il a à faire. Crois-moi, c'est la seule façon pour parvenir à te faire considérer.

En d'autres mots : fini le doggystyle

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