Chapitre 60

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Chapitre 60.

Allez, sors de là, Isaac !

Isaac se prit la tête entre les mains, soupirant. Ça faisait au moins quatre bonnes minutes que Chaz tapait et frappait contre la porte de la cellule en lui ordonnant d'en sortir. Devant rejoindre Wayne, Wilds était déjà parti depuis longtemps. Le Californien n'avait aucunement envie d'ouvrir la porte, mais il allait devoir finir par affronter la réalité. Il devait au moins se présenter au déjeuner. Son estomac supporterait difficilement de passer tout le matin avec le ventre vide, pas avec tout ce stress qui lui entortillait les entrailles.

Il soupira pour la énième fois, puis se leva de sa couchette. Il marcha jusqu'à la porte, puis l'entrouvrit.

— Cesse de faire tout ce tapage : tu déranges tout le monde.

— Tu n'avais qu'à sortir la tête plus tôt. Nous avons un rendez-vous.

Isaac crispa les dents.

— Parle pour toi. Je n'ai pas eu mon mot à dire.

— Ce n'est pas comme si tu aurais proposé cette journée de toi-même, alors je préfère prendre les choses en main. Si tu sors de là, je te laisserai dire tout ce que tu voudras.

— Je n'en ai pas envie, s'obstina le brun.

Chaz secoua la tête et, au moment où Isaac s'en allait pour fermer la porte, sa jambe se glissa dans l'entrebâillement de cette dernière pour empêcher sa fermeture.

— J'entend ton estomac gargouiller d'ici : viens au moins manger.

Le brun essaya de refermer la porte, mais Chaz la bloquait. Éventuellement, l'Afro-américain tira pour l'ouvrir et entrer dans la cellule d'Isaac sans y être invité.

— Qu'est-ce que tu fais ! s'exclama le Californien en se reculant. Je ne t'ai pas permis d'entrer !

— Je n'ai pas besoin de permission à West Island. De toute manière, je suis venu te chercher, alors je ne resterai pas longtemps ici. Suis-moi et on n'en parle plus.

— Tu as de drôles de manières de chercher à te faire pardonner..., grogna son interlocuteur.

— Allez, ne me force pas à te tirer hors d'ici ! soupira Chaz, las et les yeux au plafond.

— Si tu avais une autre approche que celle de t'imposer aussi rudement, peut-être que je serais plus enclin à venir avec toi.

L'Afro-américain fronça ls sourcils. Une autre approche ? Comme quoi ? Jusqu'à maintenant, il s'était toujours imposé pour avoir ce qu'il voulait. En prison, il n'y avait que la force et la peur qui fonctionnaient.

— Qu'est-ce que tu veux dire ? Faudrait-il que je m'agenouille pour te le demander ? se moqua-t-il.

Isaac ne se laissa pas démonter.

— Simplement le demander gentiment et te soucier de mon avis et de ce que je pense : ce que tu n'as pas fait une seule fois. Tu veux te faire pardonner ? Alors, commence par là. Ce sera déjà ça.

Chaz se pinça les lèvres. C'était comme si on venait de lui rentrer dedans avec un camion de dix tonnes. Son ego en prenait un sacré coup. Il était tiraillé entre son désir de rédemption et sa fierté. Lui-même se demandait pour quelle raison il tenait autant à se faire pardonner d'Isaac... et pourquoi il insistait autant pour l'amener déjeuner. Ce n'était pas dans sa nature de courir autant après quelque chose. Habituellement, il obtenait toujours tout ce qu'il désirait sans grands efforts.

— Isaac... voudrais-tu venir déjeuner avec moi ?

L'interpellé se figea. Il ne s'attendait pas à ce que Chaz pile sur son ego et le lui demande vraiment de manière plus gentille. Il fixa son interlocuteur avec une certaine incertitude.

— Alors, tu ne dis rien ? rajouta Chaz en fronçant les sourcils. Ça ne sert à rien d'être « gentil » si je me bute encore à un mur, je préfère encore la manière forte.

— Je vais venir.

L'Afro-américain se tut.

— Quoi ?

Isaac avait pris cette décision parce qu'il ne savait pas où il irait aujourd'hui ni avec qui il pourrait bien manger si ni Wilds ni Wayne n'était présent. Il ne pouvait pas se permettre de louper un repas non plus – son estomac gargouillait –, alors Chaz constituait sa meilleure chance de pouvoir manger en paix. De plus, aussi étonnant que ce puisse avoir l'air, son ancien codétenu avait l'air animé d'une véritable volonté de rédemption.

— Je vais venir, c'est bon, alors sors de la cellule le temps que je me change.

— Tu es devenu pudique ? Ce n'est pas comme si je ne t'avais pas déjà vu sans vêtement...

Isaac fusilla son interlocuteur du regard. Ce n'était décidément pas une bonne blague à faire.

— Sors, ordonna-t-il plus durement.

— Très bien, très bien..., finit par consentir Chaz en tournant les talons, mais tu as cinq minutes, pas plus.

Une fois seul, Isaac prit le temps de s'asseoir quelques secondes sur sa couchette pour souffler un peu. Après avoir reprit ses esprits, il enfila un haut et un jean propre, puis il rouvrit la porte de la cellule. Chaz était appuyé contre le mur et n'avait pas bougé, bras croisé sur son torse dont le débardeur blanc laissait entrevoir les abdominaux ciselés et couverts de tatouages.

— Je suis là, fit Isaac après s'être raclé la gorge, alors... on y va ?

Son interlocuteur leva ses yeux noirs sur lui, puis lui fit signe de la tête de le suivre. En entrant dans la cantine, ils eurent droit à quelques regards étonnés ou curieux. Il fallait dire que même si tout le monde croyait qu'ils partageaient encore la même cellule, cela faisait longtemps qu'on ne les avait pas vu seuls tous les deux dans les aires communes de la prison. Ils prient leur plateau, recevant une portion tout particulièrement généreuse, puis allèrent s'asseoir.

— Je veux aller m'entraîner après avoir mangé, tu viendras ? C'est toujours mieux d'être deux pour les haltères.

— Seulement si tu me dévoiles de quelle façon tu peux convaincre les gens de la cantine de remplir aussi généreusement nos assiettes.

Chaz haussa les épaules et détourna les yeux. Il ne pouvait pas révéler le secret de Grayson et Ronaldo, même à Isaac. Trop de choses étaient en jeu.

— Je te l'ai dit : on me mange dans la main.

Peu satisfait de la réponse, Isaac continua tout de même à dévorer son repas sous le regard insistant de son vis-à-vis. Chaz s'assurait qu'il ait tout mangé.

— C'est moi qui t'ai offert ces vêtements, non ? reprit l'homme à la peau noire après un moment de silence, reconnaissant les morceaux qu'il avait acheté à la boutique de la prison pour Isaac. Je n'étais pas certain pour la taille, mais... Ils te vont bien.

Il avait essayé de se figurer la taille des hanches d'Isaac en se souvenant de quoi elles avaient l'air quand il les avait tenues entre ses doigts, mais ce n'était pas évident sans le model. Brianna l'avait un peu aidé à se figurer la grandeur pour lui. Elle avait davantage l'habitude d'acheter des vêtements et elle lui en ramenait souvent lors de ces visites.

— Merci, murmura le brun, rougissant de manière très légère.

Décidément, Chaz n'avait pas fini de le surprendre. 

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