XXXI.

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    Depuis que Amir était parti, Karly et moi nous étions installées chez lui. C'était surtout Karly qui arrivait à faire sortir Marcela de sa tristesse continue, quand elle avait un peu de force elle lui apprenait quelques notes au piano. Aujourd'hui, j'avais prévu me rendre à la pharmacie pour en avoir le cœur net, j'avais désormais droit à une séance de vomissements tous les matins, et tout m'écoeurait. Tout portait à croire que Marcela soupçonnait elle aussi que mon état n'était pas anodin. Je demandai à Jordan de passer l'après-midi avec elle et j'en profitai pour me rendre à la pharmacie. J'emportai avec moi un panier repas fait par mon chef pour Malia, qui ne m'avait pas donné signe de vie depuis plusieurs semaines. Après mon rapide arrêt à la pharmacie pour acheter un test de grossesse, je continuai jusqu'à mon ancien appartement qui était désormais celui de Malia. En poussant la petite barrière, je ne pus m'empêcher de penser à la visite inopinée de ma mère et Jordan après que Amir et moi ayons décidé de berner tout le monde. D'ailleurs à ce propos, il me semble que c'était l'une de mes meilleures journées dans cette maison. Kamu mon chat était mort suite à mon départ, sur ce coup j'avais été très négligeante, qui va dans un autre pays sans prendre avec lui son seul animal de compagnie ?

    Sans m'attarder plus longtemps à l'extérieur, j'ouvris la porte et je trouvai l'appartement à peine vivable. Je me gardai de faire des remarques et trouvai une place au panier sur le plan de travail. Alors que je commençais ma quête à la recherche de quelques assiettes propres, Malia fit son apparition au milieu de la pièce, vêtue d'un gros pull gris et des chaussettes. Elle était plutôt pâle et ses yeux étaient pleins de cernes.

- Ann-Louise, qu'est-ce que tu fais là?; demanda-t-elle la voix enrouée.

- Eh bien je viens prendre de tes nouvelles McThurns. On ne peut pas dire que tu saches vraiment l'utilité d'un portable ; lançai je en déposant une assiette à sa portée.

- Oh ça... Désolée, j'ai été très prise. Qu'est-ce que c'est ?; demanda-t-elle en s'installant.

- Du saumon fumé et de la salade, c'est le chef lui-même qui s'en est chargé ; dis-je en en la servant.

- Génial, ça fait tellement longtemps que j'ai pas bien mangé.

    Au moment où elle prit la première bouchée, je la regardai attentivement. Elle mangea d'abord avec engouement, puis très vite elle se lassa et poussa son assiette. S'il y avait bien quelqu'un qui aimait les plats de mon chef et particulièrement son saumon fumé, c'était Malia. Elle prit un verre d'eau, et soutint sa tête de ses deux mains.

- Ça va Malia, tu m'as l'air pâle et fatiguée ; m'enquis je en rangeant le reste dans le frigidaire.

- C'est rien... J'ai juste mangé un truc avarié et depuis je suis dans cet état.

- Tu as vu un médecin ? Et pourquoi tu ne m'as pas prévenu ? Je suis responsable de toi et... Malia?

     Elle avait sauté de sa chaise et courut jusqu'au couloir menant aux chambres. Quelque chose clochait, elle avait les mêmes symptômes que moi il y'a quelques semaines. La fatigue. Les nausées. Serait il possible que...? Je la rejoignis dans la chambre principale et j'attendis qu'elle ait fini aux toilettes. Durant mon attente, je reconnus un T-shirt que j'avais vu trop souvent sur Nate et que d'ailleurs je lui avais offert lors d'une de ses rapides escales au Québec. Je refusais de croire ce qui semblait pourtant de plus en plus réel. Nate qui disparaissait de plus en plus lors des rencontres familiales, Malia qui au même moment se faisait rare chez moi.

   Elle sortit de la douche le visage mouillé. Elle n'allait pas bien du tout et tout ce que j'espérais, surtout pour elle, c'est qu'il s'agisse d'une petite infection alimentaire.

De la comédie Au réel...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant