Chapitre 52 (Le Manoir)

19 8 0
                                    

C'est la rentrée... les élèves s'assoient et commencent à étudier en râlant... Plaignez-vous bande d'ingrats... Un certain jeune homme adorerait être à votre place... Mouahahahah



                       Il était à peine quatre heures du matin lorsque la porte de l'écurie s'ouvrit lentement, réveillant Gabriel de son profond mais court sommeil. Il s'était créé une petite couchette avec le peu de paille encore propre qu'il restait. Le parricide était tellement épuisé du voyage et de son arrivée la veille, qu'il n'avait pas fait attention aux bruits incessants et à la puanteur que lui infligeaient les chevaux séjournant avec lui. Le fugitif couvert d'hématomes aperçut vaguement, à la lueur de la lune, son nouveau mentor Herumor et son compagnon mystérieux à l'entrée de l'écurie.

Ce qui s'apparentait au valet, aux côtés du vieux personnage, portait à sa main un plateau avec du pain sec et un verre de lait, pour le recherché des autorités impériales. Puis le propriétaire de Gravitz indiqua les consignes à son frêle locataire, d'un ton posé et caverneux :

- C'est l'heure. Va te laver dans la rivière et rejoins-moi dans les oubliettes, ordonna cet individu.

Il était devenu bien différent de l'aveugle un peu agaçant, collant et naïf, qu'avait rencontré Gabriel quelques jours auparavant dans l'auberge les « Sabots de Sanglier».

- Où se trouvent-elles ?

- Retrouve-moi dans les oubliettes, répéta-t-il froidement.

VitaliK posa le plateau et disparut lentement et silencieusement avec son meister.

L'apprenti médecin attendit que la porte se referme et alla chercher à quatre pattes, dans la boue et les excréments, son maigre repas qu'il dévora en quelques secondes. Après le massacre dans l'auberge, ainsi que plusieurs jours encore dans les bois à courir vers le manoir, le déjà pas très gros adolescent était plus qu'affamé. Pendant, durant et à la fin de son voyage, il n'avait mangé que des baies sauvages, quelques champignons comestibles qu'il connaissait et d'autres qu'il ne connaissait pas... Le rendant malade, et en haut et en bas, cela accentua d'autant plus sa perte de poids. À son arrivée la veille à la propriété sombre, Herumor ne lui avait rien donné pour atténuer sa faim légitime. Le vieil homme s'était à peine intéressé au nouvel arrivant et il en avait été de même pour le domestique qui ne parlait pas du tout. Peu importait ce que Gabriel mangeait en cet instant, à la demeure Gravitz car le meurtrier, qui avait tué Zadig et la patronne de l'auberge de sang-froid, s'en était contenté avec joie. Après ce bref et médiocre repas, le cadet d'Hector se leva. Il tenta d'essuyer la boue et le crottin collés à sa veste, puis sortit de l'écurie en direction de la rivière.


Durant son trajet du matin, qui s'avérait tout autant effrayant et sinistre qu'à son arrivée la nuit précédente, il entendit le bruit des loups dans la forêt morte. Cela le fit frissonner d'inquiétude. Il s'arrêta un instant, à la vue des arbres inquiétants qui se tenaient devant lui. Le cours d'eau ne se situait qu'à quelques centaines de mètres dans l'étendue boisée. Mais rien qu'à la pensée de franchir cette dernière, même un court instant, le frère de Tristan en eut des sueurs froides. Que pourrait-il rencontrer dans cet endroit oublié des dieux et fui des hommes ? Des loups ? Des ours ? Ou même pire...

L'ancien apprenti hésita un instant. Se disant qu'après tout, il ne se trouvait pas aussi sale que cela. Il ne s'était pas pris un bain depuis seulement des semaines... Odeur malodorante, accentuée par le sang séché de dizaines d'âmes qui devaient encore flotter dans l'auberge de la patronne vulgaire, tant il y avait de cadavres. Gabriel souleva son bras droit et renifla sous son aisselle. Comme si ce fut le seul endroit suspicieux de son corps en termes d'hygiène... Le puant fit un air de dégoût et rabaissa son bras aussitôt. Si même un personnage aussi effroyable que son nouveau maître avait pu sentir sa puanteur nauséabonde, c'est qu'il avait vraiment besoin de se laver. Il prit son courage à deux mains, regarda la forêt d'un air sérieux et avança dans sa direction. Espérant que les bêtes sauvages, réputées surnaturellement massives dans cette région, ne soient pas attirées par l'odeur du sang séché sur le jeune Tarrien.

Apostel NoirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant