Apostel Noir

Chapitre 33 (Banquet funéraire)

Bon je sais... Je ne coupe plus mes chapitres depuis belles lurettes et ça peut ou c'est inévitablement beaucoup trop lourd à lire. Mais je vais vous dire... Si vous êtes arrivés au chapitre 33... c'est que vous aimez mon histoire et que la lourdeur de mes chapitres ne vous effraie point, vaillant Amis des Nuages ! Donc bonne lecture et bon courage :D

                   Le château brûlait depuis maintenant deux jours. L'incendie abreuvait ce nuage noir qui s'élevait toujours plus haut dans le ciel. Les flammes ayant dévoré tout ce qu'elles pouvaient consumer, elles persistaient ici et là dans l'aile ouest. Tout ce que symbolisait le gouvernor Édouard Bouchard était parti avec lui dans les flammes, provoquées par le combat des mages. Quelques parties de la forteresse, visibles depuis l'entrée de la ville malgré la distance, s'étaient effondrées. Privées des poutres en bois qui soutenaient les tonnes de pierres, vieilles de plusieurs siècles. Il fallait une sacrée température pour détruire des poutres pareilles, s'étonnèrent les soldats encore présents près de la zone sinistrée. Ces derniers cherchèrent des indices, ou même des survivants improbables, dans ce qui définissait autrefois la magnifique salle de réception.

Celle-ci n'était, depuis une bonne dizaine d'heures, qu'un reste de cendres, de pierres et de tuiles de toiture. Le feu en avait fini avec la pièce favorite de l'ancien régent et s'était propagé tout autour. Heureusement, le château était encadré d'une muraille à même la cité. Ce qui avait empêché sa propagation dans les commerces et habitations aux alentours.

À la bonté des Trois Saints, aussi, le temps clément et l'absence de vent avaient béni la ville contre ce malheur. Registres, impositions, urbanisme, cadastre de la ville... Toute la mémoire de la vie administrative de la cité sur plusieurs siècles était partie en fumée.

Pourtant, un unique document avait échappé à ce destin brûlant, la liste que possédait Pricillia Bouchard, gardant toujours le secret de son paternel.

La petite noble était terrifiée de chercher à qui se confier. Elle n'osait pas en parler à sa mère, femme de peu de caractère et incapable de gérer quoi que ce soit de trop anxiogène. Victime de la vie luxuriante d'un époux puissant, Dame Bouchard ne s'était jamais intéressée aux charges de feu son mari ni de la vie administrative de la cité. Elle se tenait encore moins au courant des complots hypothétiques contre l'empire.

Pricillia, du haut de ses quatorze ans, et démontrant une maturité exemplaire, avait donc laissé sa mère dans l'insouciance à ce sujet-là. Comme sa génitrice, la pauvre était déjà assez perturbée par la disparition d'Édouard. Le deuil serait long et douloureux.

Idem pour la cité entière qui aimait son dirigeant. Car le gouvernor était un des rares puissants à se battre pour améliorer réellement la vie des habitants. De ce fait, il avait beaucoup lutté contre la pauvreté. La communication de sa mort en ville avait créé des émois, à tout niveau de la société. Les gens d'appartenance plus modestes conversaient déjà sur qui allait prendre la place du défunt régent. Les débats et les angoisses avaient resurgi dans toutes les échoppes et les discussions de rues. Le sujet du nouveau gouvernor fit même parler de lui jusqu'au marché, ainsi qu'au-delà des portes de Paradis. Serait-ce un administrateur se fichant du peuple et favorisant les déjà plus puissants ? Ou un homme bienveillant envers ces oubliés ? Quoi qu'il en soit, la grande majorité voyait d'un mauvais œil ce changement inattendu.

Seules deux personnalités, morales et physiques, se réjouissaient de la disparition d'Édouard Bouchard. La première fut le clan Gorgo, mafia majoritaire en Paradis, qu'Édouard Bouchard l'incorruptible essayait d'exterminer en mettant des bâtons dans les roues au clan. La nouvelle de sa disparition avait revigoré les dirigeants mal famés qui voyaient une opportunité de s'étendre davantage, tel un virus tenace dans Paradis.