Chapitre 18 (Tunckam)

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Le plan fonctionnait à merveille pour Morken le « Dépeceur ». Il s'amusait avec l'os humain incrusté dans ses narines, comme à chaque fois qu'il s'impatientait. Il regardait l'attaque à la lisière des bois, voyant un jeune freluquet à la chevelure noire se débattre contre deux zombis près d'un feu. Il se disait que ce petit possédait de la hargne pour un impérial. Même si son temps était compté avec les cinq autres morts qui arrivaient sur lui pour finir le travail. Cela créerait un esclave téméraire de plus dans son camp, ironisait-il.

Morken attendit là encore un moment, à se délecter de la victoire prochaine et à toutes les peaux qu'il prélèverait en trophée. Puis il leva la main et une dizaine de ses comparses medjaïs sortirent des bois, lances et poignards en mains.

Rapides et furtifs, ils se dirigeaient vers le village Tunckam à grands pas. Esquivant les envahisseurs décérébrés. En effet, les macchabées ne les sentaient même pas arriver dans leur dos, et peinaient à les rattraper une fois les avoir aperçus.

Les guerriers des territoires extérieurs se distinguaient facilement pour qui connaissait leurs coutumes et cultures. Ils étaient marqués de scarifications, de piercings ou d'écarteurs de toute taille, souvent remplis d'os humain ou animal. Leurs longues queues de cheval et leurs crêtes de toutes formes contrastaient avec leurs crânes chauves, dont certains y avaient planté des piques en os.

C'étaient des hommes grands et fins de nature. Possédant une belle et puissante musculature dessinée par la rudesse de leur métier et de leur environnement. De couleur de peau noire ou métissée, ils zigzaguaient entre les quelques morts qui sortaient encore des bois pour se diriger vers les bâtiments de Tunckam. De cette façon, ils maintenaient l'attention en direction du village.

Telle se définissait leur façon de se battre. La façon des Medjaïs.

Morken le dépeceur veillait à ce que l'embuscade se passe comme prévu et qu'aucun zombi retardataire dans la forêt ne prenne par surprise ses guerriers medjaïs. Il l'exécuterait au pire des cas, plutôt que de ne pas pouvoir diriger le bouclier de cadavres à son aise.

Le chef de la troupe medjaï, qui pillait la zone depuis des mois, était satisfait de sa saison en territoire ennemi. Pour des raisons inconnues de Morken, son chef de clan lui avait ordonné de s'en prendre strictement à Tunckam et ses environs, pour cette saison-là de pillage. Mais pour le coup, le « Dépeceur » avait intérieurement remercié son chef de lui avoir donné cette information précieuse. En effet, la saison s'était conclue vraiment excellente. Il rentrerait en héros, comme à chaque début d'automne. Juste à temps pour éviter les premières neiges dans le désert où il vivait.

Détrousser l'empire de ses biens et ainsi nourrir sa famille avec les fruits des pillages était devenu coutume des territoires extérieurs, en plus d'apparaître grassement rémunérant. Argent, armes, bijoux, ou tout autre objet de valeur des conquêtes précédentes, avaient été soigneusement dissimulés dans les bois, en attendant que leur quête se termine. Ils avaient dévalisé, en effet, deux communautés avant Tunckam. Des bourgades situées plus au nord, là d'où ils venaient.

Pour cette unité d'élite, la forêt d'épicéas se définissait comme un terrain de prédilection dont il fallait connaître toutes les règles pour y survivre. L'art de la dissimulation et de l'embuscade s'avérait la spécialité de sa tribu.

L'utilisation des morts restait également, entre autres, une spécialité de son peuple qui gardait toujours un spécimen - ou juste un morceau de lui - portant « la maladie qui réveille la mort », ou « wecker », en langage lossen. Grâce à cela, les Medjaïs pouvaient lever des hordes toutes fraîches, du moment qu'il y avait le bétail pour alimenter l'armée de cadavres. De ce fait, cette stratégie d'embuscade causait beaucoup de ravage, avec juste quelques individus expérimentés pour guider la horde.

Apostel NoirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant