Chapitre 12 - Exorcisme

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Car le dominant pleure


-Qu'est-ce que tu dis ? s'étonna Raven.

-Ta mère est infectée par des larves de mouches rouges. Elle n'est pas malade, elle est contaminée par des centaines de larves, peut-être des milliers vu son état. Elles se servent de son corps comme incubateur et garde-manger.

-C'est n'importe quoi ! répondit Lina, agacée d'entendre cet inconnu proférer de telles paroles sous son propre toit.

-Vous ne me croyez pas ?

Il s'approcha de la mourante et sortit son poignard. Lui qui était pourtant toujours en alerte fut surpris par la rapidité avec laquelle Raven avait sorti un petit canif aiguisé de sa poche et le menaçait au niveau de la carotide. Il tenait le sorcier en respect, malgré la peur qu'il lui inspirait, prêt à lui ôter la vie s'il osait toucher à sa mère. Lina avait à nouveau bandé son arc et visait l'apostel à bout portant. Seul le vieux bûcheron ne réagit pas, totalement dépassé par les évènements.

La voix tremblante de rage, Raven menaça :

-Ne t'avise surtout pas de la blesser, enflure, ou je te saigne comme un porc. Et peu importe notre marché et ce qu'il adviendra de moi.

-Je veux juste te prouver que je connais ses symptômes. Je vais seulement lui inciser légèrement le bras. Vu son état, elle ne s'en rendra même pas compte. Fais-moi confiance, ou tue-moi si j'ai tort.

-Fais-lui confiance, Hustang, intervint le père, prêt à tout essayer pour sauver sa bien-aimée. Ça ne sera pas pire que ce qu'elle subit déjà. Crois-moi.

Raven toisa Annatar durant de longues secondes. Ce dernier ne flancha pas, bien déterminé à se faire entendre. Le contrebandier finit par obtempérer et intima à sa sœur s'en faire autant. Lina reposa son arme contre le lit de fortune, tout en le gardant à portée demain.

Avec délicatesse, Annatar s'approcha de la femme qui gémissait dans son sommeil. Elle était secouée de spasmes, sans doute dus à la fièvre ou à un horrible cauchemar. Annatar lui tint fermement l'avant-bras et pratiqua une incision de quelques centimètres en enfonçant suffisamment sa lame pour traverser toutes les couches de peau. La douleur ne fit même pas réagir la malade, son corps était habitué à la souffrance permanente qu'il subissait depuis de longues semaines.

À la surprise des Crewford, qui s'écartèrent de peur et de dégoût, de petits vers blancs s'échappèrent du bras décharné. Ils se tortillaient au contact de l'air, agités de soubresauts d'agonie et tentaient de retourner dans le corps en décomposition par la plaie ouverte.

Malgré l'horreur de penser que cette pauvre femme puisse contenir ces abominations, une lueur d'espoir jaillit dans leurs regards. Car non seulement l'érudit de l'äther connaissait ce mal que peu de médecins auraient pu diagnostiquer aussi rapidement, mais il savait aussi le soigner, à en juger par ce qu'il avait ramené de sa promenade en forêt.

Tous lui demandèrent avec entrain comme il comptait s'y prendre pour la soigner et combien de temps durerait sa convalescence. Mais leur euphorie fut freinée par le regard sombre d'Annatar, qui demeurait perplexe sur l'état de sa patiente :

-Il y a cependant une mauvaise nouvelle. Je n'ai pas entaillé le bras par hasard. Les larves de mouches rouges préfèrent les organes vitaux, plus nourrissants. La chair n'arrive qu'en second choix. Ce qui veut dire que s'ils sont aussi nombreux dans ce bras décharné, il n'y a peut-être plus rien à sauver.

-En d'autres termes ?!

-Elle pourrait ne pas s'en sortir, malgré mes soins. Je préfère vous avertir. Et si c'est le cas, le remède ne fera que précipiter la fin de cette femme...

Apostel NoirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant