Année VI, Chapitre 6 : L'empoisonneur devrait toujours assister au festin

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Pour la première fois depuis qu'ils étaient amis, John et Sherlock passèrent Noël à Baker Street. Dehors, des chorales hivernales gambadaient par les chemins enneigés, dansant joyeusement, des parents aux bras chargés de cadeaux progressaient maladroitement sur le sol givré et des enfants lançaient des boules de neige sur les murs.

Mme Hudson était partie chez sa sœur et John fut très déçu de ne pas voir la vieille femme.

Mr Holmes s'affairait dans la cuisine, fredonnant des chansons des fêtes, tandis que Mme Holmes mettait la table et donnait à l'occasion à son mari des tapes sur l'épaule. Sherlock et John, affalés sur le canapé, regardaient la télévision. Le sociopathe boudait et s'étalait sur John comme un chat en manque d'affection pour attirer son attention que le plus petit prenait un malin plaisir à ne pas lui prêter.

"Joooooohn. M'ennuiiie."

"Tais-toi, j'aimerais regarder le film !"

"Tout le monde meurt à la fin."

"Sherlock, tais-toi..."

Il hésita tout de même :

"Même Tony Stark ?"

"Non. Mais il meurt dans Endgame. "

"Sherlock !" beugla John en étouffant son ami sous un oreiller.

"Mycroft va venir ?" questionna Sherlock.

"Oui." assura la mère.

Ils avaient déjà commencé à manger quand Mycroft arriva. Il ne s'excusa nullement pour le retard, mais ne se fit pas prier pour se jeter sur la nourriture.

Comme aucun des deux fils Holmes ne parlait, Mme Holmes lança un sujet de conversation au grand agacement de ses deux fils.

"Alors, comment ça se passe à Poudlard ?"

Les mois qui avaient suivi l'incident au Ministère, elle avait catégoriquement refusé à ce que son fils cadet retourne à l'école et s'était préparée à faire tout un scandale, mais Sherlock ne lui avait pas tellement laissé le choix.

"Eh bien personne n'est encore mort."

"Sherlock ! fit John. Ce qu'il veut dire, c'est qu'il est devenu le chouchou des professeurs. Même de Rogue."

Mycroft cessa de se goinfrer et manqua de s'étouffer avec un morceau de patate.

"Plait-il ?"

"Il a rapporté au moins une centaine de points cette année." affirma John.

"Arrête un peu, John. Tu ne vois pas que Mycroft va nous faire une crise de jalousie. Il n'a jamais réussi à être apprécié de Rogue."

En effet Mycroft était rouge comme une tomate. Les parents Holmes, eux, souriaient comme si un miracle venait de se produire.

"Et qui remplace cette folle de Dolores Ombrage ?" questionna Mycroft.

John regarda Sherlock, se demandant s'il devait le dire ou pas. Sherlock aussi hésitait.

"Le professeur Peter Guillam, menti finalement John."

"Je n'en ai jamais entendu parler." affirma Mme Holmes.

"C'est la première fois qu'il enseigne, dit Sherlock. Il faut dire que plus personne n'ose occuper ce poste, puisqu'il est vraisemblablement maudit."

Voyant que l'heure tournait - il était presque minuit - Mr et Mme Holmes se lancèrent un regard et dirent :

"N'allez surtout pas dans le salon, vous risqueriez de surprendre le père Noël, dirent-ils en allant eux-mêmes dans le séjour. Je crois même qu'il a quelque chose pour toi, John."

"Quoi ? Mais... Je ne peux pas..."

"Non, non, non, je ne veux pas savoir."

Sherlock, John et Mycroft se retrouvèrent seuls. Les deux frères se dévisagèrent longuement et John crut qu'ils étaient sur le point de s'entretuer. Les parents Holmes ouvrirent finalement les portes, dévoilant une montagne de cadeaux. Mycroft soupira, reposa sa part de gâteau et les rejoignit, suivit d'un John aux yeux brillant de joie – ou peut-être était-ce seulement le reflet des guirlandes lumineuses dans ses iris – ce qui attendrit un peu le sociopathe qu'était Sherlock.

Ce dernier sortit rapidement une petite fiole et versa le contenu sur le gâteau de son aîné. Il ne s'était pas renseigné sur le dosage, mais il verrait bien...

Mycroft et Sherlock se lancèrent dans une bataille. Tous deux assis face à face dans des fauteuils, ils regardaient les paquets que John leur présentait, songeurs. Il leur montra un paquet rouge avec des petits dessins de rennes, de taille moyenne et en forme de rectangle.

"Un livre, dit Mycroft. Botanique, probablement, à en juger la taille et l'épaisseur."

"Plantes médicinales, plus précisément." ajouta Sherlock.

"Tu triches, c'est toi qui l'a choisi, pour Watson. Suivant."

Cela dura une quinzaine de minutes avant que les deux jeunes Holmes n'autorisent John à ouvrir les cadeaux. Le pauvre n'en pouvait plus d'attendre. Quand Mycroft eut ouvert les siens (il avait déjà deviné de quoi il s'agissait un mois avant qu'ils ne soient achetés) il retrouva sa part de gâteau et l'engloutit.

"Ça met combien de temps à agir ?" chuchota John à l'oreille de Sherlock.

Il haussa les épaules.

"Myke ! Viens, il faut qu'on parle."

Sherlock guida Mycroft dans une salle vide de la maison (John était à peu près sûr qu'elle n'était pas là avant, mais les pièces semblaient ne jamais cesser de bouger) et demanda à John de monter la garde dehors.

Sherlock fit signe à Mycroft de prendre place sur un vieux fauteuil, tandis qu'il s'asseyait lui-même.

"Tu as retrouvé mon collier ?"

"Je sais où il est, mais je ne l'ai pas..." dit Mycroft avant de se taire brusquement. "Qu'est-ce que tu as encore fait !"

"Veritaserum. Tu ne peux pas me mentir."

"Par Merlin, Sherlock, c'est de la folie."

"Où est mon collier ?"

"Caché... dans notre ancienne maison... Mais tu ne dois pas y aller, Sherlock ! Je ne te laisserais pas y aller."

"Essaie de m'en empêcher."

"Tu te crois fort parce que je ne peux pas mentir."

La porte s'ouvrit. Sherlock s'apprêtait à faire des reproches à John quant à ses talents médiocres en tant que guetteur, quand le blond dit :

"Désolé, je n'ai pas pu l'arrêter."

Levi entra dans la pièce, flottant quelques mètres au-dessus du sol. Elle considéra la scène : Sherlock calme, Mycroft furieux. Plutôt habituel.

"Tiens, pendant que j'y pense, dit Sherlock après un instant de réflexion. Pourquoi as-tu voulu avoir Levi ?"

"Euros voulait ce qu'elle ne pouvait avoir et tu voulais ce que tu n'avais plus. Moi je ne voulais que ce que j'avais déjà, parce que ça me suffisait."

"Et tu regrettes ?"

Mycroft lança un regard à Levi, qui ne comprenait pas vraiment ce qu'il se passait, hormis que c'était d'elle qu'il était question.

"Ça m'arrive, oui."

Levi s'enfuit. Mycroft se leva pour la retenir, mais elle avait déjà remonté les escaliers.

"Levi ! Tu es fier de toi, Sherlock ? Au plus ça va et au plus je regrette que le courant ne t'ait pas emporté, ce fameux jour !"

De nouveau, Mycroft mesura trop tard l'étendue de son erreur. Sherlock ne lui lança pas un regard de plus et quitta la pièce, tirant John par le bras, puis la maison. Ses dernières paroles furent :

"Tu n'as pas le droit de m'en vouloir, ce sont tes mots, pas les miens."

Les chants de la Mort - Sherlock fanfictionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant