Nous avions tous les deux, Ruth et moi-même, dans le même mouvement, dans la même surprise, tourné la tête vers cette personne qui eût fait son entrée. Elle tenait la porte grande ouverte, restait sur le pas, sans faire de bruit, sans prononcer un mot ; et dans l'éclat du jour qui venait des longues fenêtres du couloir, pareil à un halo divin, cette lumière drapait tout autour de sa taille un voile d'or et de cuivre. Je dus battre des paupières à plusieurs reprises, trop éblouie par cette lumière inattendue, pour enfin voir qui se tenait dans l'embrasure.
Et c'était trop beau, trop parfait, juste trop, pour être vrai ou pour être croyable.
Alors, mon souffle coupé, mes pensées en ébullition, je peinais à prononcer la moindre phrase ; les mots manquaient d'une manière si cruelle, car, dans un sens, j'avais souhaité son retour. C'était finalement Ruth qui, d'une voix étonnée, entrecoupée d'une toux grasse, avait dit :
– Hé bah, je ne pensais pas te voir de si tôt, ma grande !
Elle ne répondit pas, lui sourit simplement et hochât de la tête.
– Ha... Hazel... balbutiai-je enfin, comme si mes poumons ne contenaient plus la moindre molécule d'air.
– Andréa, me salua-t-elle du même geste qu'avec Ruth.
Puis, après un court silence :
– C'est... C'est vraiment toi ? dis-je, les yeux écarquillés.
Elle redressa ses épaules, se tint droite et croisa ses bras derrière son dos, mettant en avant sa gorge voluptueuse ; puis, de sa voix unique, de cette accent chantant – dont j'ignorais toujours l'origine – qui fondait mon for intérieur, elle me dit oui. J'étais ravis de la voir de nouveau ; et s'écoulait en moi, pareil à un troupeau de fauves sauvages, un torrent d'émotions que je ne contrôlais plus.
– Je... Je ne m'attendais pas à te voir... comme ça, dis-je dans un souffle.
Et il fallait l'avouer, Hazel était méconnaissable sans sa lourde armure. Cette fois-là, elle ne la portait pas ; et mes yeux, trop habitués à la voir avec, ne l'avaient tout simplement pas reconnue.
À la place des grandes plaques dorées qui cachaient tout son corps, Hazel portait une simple tenue, mais non moins savante ; tout en légèreté et emplie de volupté, la seule partie qui semblait métallique – et du même alliage que son ancienne armure – était une seule et unique épaulette qu'elle portait à droite, son autre épaule étant nue.
Une tête de lion y était gravée, ressortait quelque peu, et sa crinière finissait en de complexes arabesques circulaires. Et une longue lanière de cuir, pareil à un horizon noir sur la toile doucement halée de sa peau, traversait le haut de son buste, retenant solidement le bout d'armure.
Une large ceinture – point d'orgue de sa nouvelle tenue –, doublée d'une cotonnade sombre, tenait son ventre et le bas de sa poitrine, dévoilant ainsi ce sillon charnel, sans pudeur aucune. Toute sa chair et sa luxure, pressées par le vêtement, semblaient être à quelque pression de déborder ; c'était comme si toute sa nudité, son charme, ne demandait qu'à sortir. Et pourtant, dans un paradoxe étrange des vêtements bien pensés, l'ensemble tenait en place, avec fermeté et beauté absolue.
Et, toujours à cette ceinture, était accroché une dague dans un fourreau de cuir tanné ; dans son dos dépassait aussi une longue épée, tenue à l'horizontale.
Ses bras, ses jambes quant à eux, étaient entourés d'une large étoffe bouffante, couleur safran et qui laissait, semblait-il, une liberté de mouvement accrue. Elle passait sous la ceinture, et était probablement qu'une seule et même toison ; et çà et là, quelques breloques d'or et de cuivre – souvenir de l'ancienne armure peut-être – pendaient tout au long d'un fin liseré scintillant et qui parcourait ses membres de loin en loin.
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Royal lagoon (GxG)
FantasyÀ l'annonce de la découverte d'un nouveau trou bleu, un groupe de jeunes explorateurs se rendent dans le triangle des Bermudes pour tenter de percer son mystère. Chacun a ses raisons d'y aller : la soif de gloire, de richesse ou de reconnaissance...