Chapitre 51

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— Théo, quand est-ce que l'Affrontement commence ? s'enquit Lucie.

Comme chaque matin, le soleil peine à percer l'épaisse couche de feuille au dessus de notre tête. Parfois, j'aimerai justement la percer et voir ce qu'il y a la-haut. Pourvoir distinguer le ciel au moins une fois.

— Dans moins d'une semaine.

On a fait de nombreux progrès, on est coordonnés, réactifs voire même créatifs quand on le veut, mais on est encore loin du résultat escompté.

On s'entraîne tous ensemble désormais, mais c'est quelque peu particulier. Théo se contente de disposer çà et là des mannequins. Selon leur position, on doit contrer l'attaque avec telle ou telle stratégie qu'il nous a enseignée.

Le travail demandé est de plus en plus dur. De plus en plus précis. Parfois, des disputes éclatent. Elles fragilisent l'équilibre déjà instable de notre équipe. Le pire, c'est qu'il ne nous reste qu'une semaine pour nous améliorer.

J'arrive à me consoler en imaginant que les autres vivent ce même stress, qu'ils en sont au même point que nous, soit dans une ambiance sans cesse tendue, qu'ils n'arrivent pas à retenir toutes ces Stratégies.

Le soir, quand tout le monde est épuisé, on s'allonge et on observe les étoiles, qui commencent tout juste à poindre dans la nuit. Le ciel est baigné d'une multitude de couleurs allant de l'orange au rose puis au noir d'encre, laissant petit à petit de la place à ces minuscules points dans la pénombre infinie qui s'étale au-dessus de notre tête. Dans ces moments-là, une trêve implicite prend possession du lieu. Nos cœurs ralentissent, apaisés par le ballet qui se joue devant eux, à l'instar de notre ressentiment. C'est notre instant de paix. Tout le monde le respecte. Sans exception.

Un soir après avoir partagé une nouvelle fois ce moment avec mes camarades – certains devenus des amis, j'ai pris la direction de ma maison, comme tant d'autres fois. Il faisait nuit, mais mes yeux voyaient comme en plein jour. Je me suis arrêtée à l'arbre aussi large qu'une dizaine de fille comme moi, devant ma maison. Quand j'ai relevé les yeux, une lettre était accrochée à l'écorce. Elle était ballotée par le vent, mais miracle, tenait bon. Une lettre qui m'était destinée, puisque je suis la seule à passer par-là. Je l'ai décrochée avant de la lire d'une traite.

Emelyne,

Arrête de remuer le passé,

A chercher des réponses dans tes souvenirs,

A douter de tout,

Car méfie-toi,

Bientôt, tu devras te méfier de tout le monde,

Y compris de ton entourage.

Car pour te poignarder dans le dos, 

il faut être derrière toi.

Mes bras s'étaient mis à frissonner, ma paupière à trembloter de nervosité. Je suis restée figée, incapable de faire le moindre geste. A ce moment précis, on n'ose plus bouger, persuadé qu'une personne nous observe, tapis dans les ombres des arbres. Un simple souffle de vent peut s'apparenter à une respiration chaotique.

Une personne a déposé cette menace devant ma maison, pour m'interdire de comprendre pour quelle raison ma sœur est morte.

Ou bien est-ce parce qu'elle craint que je découvre d'autres gens impliqués puis que je les balance.

The Alfe Wars [terminée]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant