Chapitre 28

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 — Plus fort !

Théo supervise un peu notre match avant de s'éloigner. Il trouve que je suis gentille avec mes opposants. Je n'en n'ai pas l'impression, je donne mon maximum à chaque fois. Néanmoins, ce n'est jamais suffisant.

Je vise le ventre de mon adversaire de la tranche de ma main. Elle esquive d'un mouvement fluide puis relance sur un coup de pied circulaire, que je parviens à parer. J'essaye de faucher sa jambe restante. Elle voit clair dans mon jeu et l'évite sans problème. Ma cuisse me lance depuis le début de la séance ; plus le cours s'écoule, plus la douleur s'accentue. Elle donne une violente impulsion dans mon plexus solaire pour se dégager. Le souffle coupé, une horrible toux manque de m'arracher les poumons. Je m'accroupis pour éviter son poing, le temps de reprendre mes esprits. J'écope quand même d'un assaut sur le haut de la tempe gauche. J'ai mal, mes muscles donnent l'impression de vouloir se déchirer d'un instant à l'autre. Je n'ai qu'une envie : mettre un terme à ce combat. Je me relève d'un bond pour balancer ma jambe dans son estomac. Elle ne s'y attendait pas, elle grogne sous le coup de la douleur.

Depuis que j'ai intégré le groupe de Théo, je m'évertue à combattre à sa manière, mais même avec toute la volonté du monde, je n'y parviens pas, alors je passe à l'efficace, même si ce n'est pas ce qu'il m'enseigne. Cette technique porte ses fruits : la fille se tient les côtes en sifflant.

— Pourquoi tu as fait ça ? gémit-elle.

— De quoi veux-tu parler ? dis-je d'une voix éteinte.

— Tu m'as pratiquement transpercé le ventre, ce n'était pas nécessaire ! Tu étais sur le point de me battre !

Des larmes ruissellent sur ses joues pales. Je me précipite à ses côtés. Que fait-on quand une personne souffre au ventre ? On l'allonge ? On pose sa tête sur ses cuisses ? Je ne voulais pas la blesser, juste la vaincre. J'aurai dû taire la voix dans ma tête et me débrouiller avec ce que je connaissais. L'efficace va devoir se limiter à ce qu'on m'enseigne.

Des pas précipités se rapprochent

— Où a-t-elle mal ? demande Théo.

A peine un cri résonne qu'il est déjà là.

— Au ventre, j'y suis allée un peu fort...

— Tu rigoles ? Tu m'as... !

— Je sais, cinglé-je, je suis désolée, je ne voulais pas te faire mal.

Pourquoi s'acharne-t-elle à vouloir me faire passer pour une abominable partenaire ? Je l'ai à peine touchée qu'elle s'est effondrée. Si elle continue, Théo va m'interdire de m'exercer au corps-à-corps. Cette journée me fatigue. En plus, la perspective de me retrouver avec ma mère remplace mon cœur par du plomb.

Ce qui reste de mon cœur, car il s'émiette chaque jour un peu plus.

— Calmez-vous, répond la « patience incarnée », ce n'est pas la peine de se disputer. Je suis sûr que c'est un accident, Sora. Tu peux te relever ?

— Hum, acquiesce-t-elle.

— Bien. Vous pouvez reprendre ?

Elle hoche la tête. Théo m'interroge du regard. Je me remets en position pour répondre à sa question muette.

— Allez-y.

Sans attendre, elle attaque en tranchant l'air pour me faire reculer. Je saisis sa main et vise son visage de mon poing droit. Je n'ai pas l'intention de la toucher au visage, je m'arrêterai avant. Elle s'écarte pour me donner un coup de genou dans le bas-ventre.

Je grogne. C'est tellement puéril de se venger ainsi ! Je m'attendais à ce que Théo interrompe le duel, mais non. Il se contente de nous observer, les bras croisés, en fronçant les sourcils. Elle crie au martyr pour un simple impact au ventre, et moi, je subis ce genre d'affront et on ne s'arrête pas ? Je ne dis pas que c'est un supplice, mais ce n'était pas franc-jeu. Si j'avais été un garçon, elle aurait eu des problèmes.

The Alfe Wars [terminée]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant