The Alfe Wars [terminée]

Chapitre 32

 Samuel marche devant nous en se dandinant sans aucune retenue, à croire qu'il a fait ça toute sa vie. Les gens qui le voient en lâche leur bol, répandant une mélasse sur le sol en chêne.

Je me tourne vers Romain, tout sourire.

— Il adore ça, à ce que je vois.

Il hausse les sourcils en continuant à observer son camarade qui se met à mimer un jeté de cheveux sur son épaule – la grâce en moins.

— Oh que oui ! J'espère que je n'aurai pas à faire un truc pareil, me supplie-t-il en se tournant vers moi.

Je prends un air conspirateur.

— Ce n'est pas à moi de choisir, tu te rappelles ?

— Oui, oui.

Il obtient toujours ce qu'il désire grâce à sa bouille d'enfant triste. Pourquoi n'ai-je pas le même talent auprès de mes parents ? C'est déplorable, toutes ces sorties au lac que j'aurai faites...

D'un sourire malicieux, il m'invite à faire la queue pour manger. Je lui retourne un clin d'œil et l'entraîne à ma suite. Ça faisait longtemps qu'on n'avait pas été réunis tous ensemble. Comme au bon vieux temps.

Nous nous asseyons après avoir réclamé notre portion de viande.

— On voit bien que ce sont les garçons qui ont cuisiné ce soir, dis-je en reniflant la préparation.

— Je suis désolé, mais je ne trouve pas que ce soit pire que vos repas de fête. On a tous frôlé l'indigestion la dernière fois.

Romain ne sait pas cuisiner, mais jamais il ne l'admettra. Il adore concocter des recettes pour le moins... originales. Disons qu'il estime que mettre au hasard des ingrédients ne peut que donner quelque chose de délicieux. Dans son cas, c'est tout juste comestible.

— Tu ne sais pas apprécier les bonnes choses.

— Je te retourne le compliment, répond-t-il en me narguant.

Une voix que je déteste s'élève à ce moment-là.

— Elle est là, monsieur, s'exclame Léanna.

Elle déboule devant notre groupe et me pointe du doigt. Hanfield se poste à côté d'elle, son indissociable impassibilité masquant les expressions de son visage et ses cheveux sombres cachant ses yeux.

— Je suis sûre que c'est elle pour les raisons que je vous ai données tout à l'heure.

Hanfield me sonde puis hoche la tête. Mon effroi doit être visible car il m'ordonne d'un ton froid :

— Mademoiselle, veuillez me suivre. Nous devons discuter.

Je ne bouge pas, mes jambes sont figées. Qu'est-ce qu'elle lui a dit ?

— C'est ridicule, elle n'a rien fait ! plaide Romain.

— Comment pouvez-vous le certifier ? argue le superviseur.

Il jette un coup d'œil dans ma direction, puis baisse la tête.

— Parce que... parce que j'étais avec elle.

Non, non, non. Romain, on ne sait même pas de quoi il parle.

Hanfield sourit légèrement. Si peu que cela devait être indiscernable pour les autres, mais pour moi, c'est le début de la fin.

— Dans ce cas, venez avec nous, monsieur Edouard.

Oh non. Il ne faut surtout pas mêler mes amis à cette histoire. Ils n'étaient même pas présents à ce moment-là. Ils inventeront mensonges sur mensonges, jusqu'à se trahir, et quand ils le feront, comment pourrons-nous leur expliquer la vérité si nous n'avons fait que la leur dissimuler ?