Chapitre 57

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 — Emelyne, grogne une voix familière.

Lucas.

Je suis sonnée une poignée de secondes mais je parviens à me redresser.

— Emelyne ? répète-t-il. Sur une échelle de un à dix, tu es morte à quel point ?

— Moins mille, au moins.

Il soupire puis hurle :

— Elle va bien ! Elle ne s'est pas évanouie !

Je ne l'ai presque jamais vu élever la voix. Pourtant, à cet instant, il crie pour rassurer ma famille, mes amis.

Je me relève, chancelante au début, mais très vite, je reprends contenance.

Je ne comprends pas. À cette hauteur, j'aurai dû avoir plus de séquelle qu'un léger déséquilibre.

J'interroge Lucas du regard, la tête penchée sur le côté. Les gens affluent pour voir ce qu'il se passe. Très vite, un cercle se forme autour de nous. Lucas ne bronche pas une fois. Il est froid, comme toujours. Pas une fois je ne l'ai vu sourire.

Il sort du cercle, sans répondre à ma question muette.

J'essaye de l'imiter et de le suivre, trop oppressée par la foule, mais une main ferme me retient.

— Montre moi ta tête, Em, soupira Théo. Tu as fait une chute de plus de trente mètres.

Trente ? Je devrai être à l'état de chair et d'os éparpillé au sol.

— Lucas t'as rattrapée, mais montre moi ta tête et le reste de ton corps. Finis pour toi aujourd'hui.

— Quoi ?! Non ! Je vais bien ! Regarde, j'arrive à marcher parfaitement.

Il me rapproche de lui, passe sa main sur ma nuque et l'arrière de mon crâne d'un air concentré. Il prend délicatement ma main, effleure mon poignée, mon coude, puis il fait rouler ma tête sur le côté. J'ai un peu mal, mais rien d'affolant.

— Ton dos ?

— Ça va.

Il expire, soulagé. Soudain, il se jette sur moi et me sert contre lui. J'ai presque envie de pleurer. Ça fait si longtemps... Son étreinte me prouve à quel point il a eu peur pour moi. Je m'en veux d'avoir bêtement glissé et d'avoir inquiété tout le monde.

Avant de reculer, il souffle :

— Ne crois pas que j'ai oublié que tu m'as désobéit. Je te faisais confiance, mais tu as préféré en faire qu'à ta tête, Em.

Il relève ses yeux d'un vert si pur vers moi.

— Les circonstances ont changé, expliqué-je, après un moment.

— Ta parole aussi apparemment.

Ça me fait mal qu'il pense que je l'ai trahi par esprit de contradiction, mais je le mérite. Malgré tout, je ne regrette rien. J'ai fait ce qu'il me semblait juste, mais je regrette qu'il soit blessé par mes choix.

— Désolée.

Il sourit tristement.

— Ne dis pas quelque chose que tu ne penses pas. Au moins, Olivier n'a pas jugé que ça méritait une exclusion, il a plutôt été amusé. C'est une bonne chose.

Très bonne, en effet.

— Je vais continuer, ne t'en fais pas Théo. Heureusement que Lucas a été là.

Ses lèvres se crispent, signe qu'il pense au rôle de Lucas chez les Alfes de l'Ombre.

Il hoche la tête. Quand il s'éloigne, j'ai le sentiment que j'ai fait une grosse bêtise.

The Alfe Wars [terminée]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant