Chapitre 6

16 4 23
                                    

Nous nous élançons dans les ténèbres. La brume commence déjà à recouvrir les herbes hautes, la terre granuleuse et les rongeurs qui se faufilent entre nos jambes. Nous crions tous en cœur, appelons tous la même personne.

Romain.

Nous sommes en pleine battue pour le retrouver. Espérons qu'il ne se soit pas fait dévorer par les bêtes hideuses que nous chassons habituellement.

Nous courons sur le sentier à la recherche de notre ami, les yeux hagards. Je pense que de nous tous, c'est Louna qui hurle le plus fort. Son désespoir me mine. J'ai une boule qui enfle à chacun de mes pas en l'entendant se déchirer la voix.

Le chemin devient de plus en plus escarpé. Une voix me parvient, si faible que je crois avoir rêvé. Une voix grave, d'une douceur indescriptible, qui prononce un nom : le mien.

Je relève la tête en l'entendant. Sans perdre une minute, je me précipite vers la source du bruit dans obscurité étouffante. J'arrache une feuille géante de fougère fluorescente pour écarter tout obstacle inopportun en le fauchant. Je courre comme une dératée. Les branches semblent se refermer sur moi alors que l'environnement s'obscurcit encore, jusqu'à devenir insondable. Des bruits étranges résonnent, des sortes de plaintes gémies qui me font frémir de la tête aux pieds.

Je m'immobilise enfin. Une respiration s'élève à côté de moi. Je sors mon couteau, puis en tournant violemment sur moi-même, je le plaque sous la gorge de l'animal.

— C-c'est moi, bégaie Romain, néanmoins calme. Tu m'étrangles.

Je brandis la feuille en la lui mettant sous le nez pour vérifier. Je suis tellement heureuse de l'avoir retrouvé ! Mes bras se referment automatiquement autour de son cou. Je lâche une petite larme, la tête plongée dans son cou. J'ai eu peur de l'avoir perdu pendant un instant.

— Em, pourquoi tu pleures ?

Il me rend mon étreinte avec force. Il hésitant. Il redoute la cause de mon humeur. Ou l'humeur qui vient après le soulagement, celle qui est en général la colère ou le déni...

— Quand tu as crié, j-j'ai cru qu'ils t'avaient tué aussi et... ça... j-je ne peux pas, je gémis.

Mes larmes tâchent son tee-shirt Vert de sel. J'ai eu tellement peur pour lui...

— Pourquoi tu es parti ? je murmure.

Il se décolle de moi. Il me sonde de son regard vert presque identique au mien. Je me suis transformée en sangsue. Je ne le laisserai plus tant que nous ne serons pas rentrés ou en compagnie des autres.

Oh, non. Louna, Laura et Samuel... je les ai abandonnés. Je secoue Romain en le suppliant de venir avec moi pour aller les chercher... pour qu'on soit tous ensembles.

— Em, calme-toi !

Sa voix douce mais néanmoins ferme n'attends aucune réplique. Je reste là, les bras ballants, à le regarder mettre deux doigts à la bouche. Un long sifflement strident s'échappe de ses lèvres.

— J'ai crié pour que vous puissiez m'entendre, et me rejoindre ici.

Deux minutes plus tard, Laura, Samuel et Louna franchissent l'entrée de la cavité dans laquelle j'ai trouvé Romain.

Romain se penche sur un champignon dont l'aspect est étrange par apport à l'obscurité ambiante. Il appuie d'un coup sec sur le chapeau.

La grotte dans laquelle nous nous trouvons s'illumine progressivement, de l'extérieur vers l'intérieur, nous dévoilant une faille sans fin.

The Alfe Wars [terminée]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant