Chapitre quarante deux : Sacha
Il arrivait par moment que la vie nous prenne au dépourvue, je le savais mieux que quiconque. Ma vie n'était qu'une succession de malheurs et de rencontres miraculeuses, de combats acharnés et de relations extravagantes. Je devais tellement à certaines personnes que j'avais contracté des dettes irremboursables. Plusieurs fois au cours de mon existence, j'avais voulu renoncer. Quand j'avais perdu ma famille. Quand j'avais perdu mon maître. Quand j'avais perdu mon roi. Mais malgré tout ce que la vie nous prend, la vie nous donne aussi beaucoup. Des amis. Une famille. Le dernier espoir de tout un peuple.
Balayant mon regard autour de la table à laquelle on était tous réuni, mes iris s'attardèrent sur la Princesse. Elle était penchée vers Aeden et lui massait le dos tout en rigolant de façon spontanée et sonore. Elle était si joyeuse, si jeune que par moment, le caractère extraordinaire de son destin mais aussi le poids qu'il représentait me faisait penser qu'il était un fardeau trop grand pour ses frêles épaules. Si j'avais pu, j'aurais volontiers était moi même décapiter cet infâme sorcier usurpateur de trône, malheureusement, seule Astrid en avait le pouvoir. C'était d'ailleurs pour ça que j'avais programmé cette réunion, pour pouvoir éclaircir certains points avec tous les membres importants attachés au clan des lycaes d'Auxanne.
Jetant des coups d'œil aux personnes présentes à la table d'une des nombreuses salles composant le manoir d'Auxanne, je profitais de l'agitation ambiante pour les détailler.
À ma droite, toujours à me coller comme le sale chien qu'il était, Orion rigolait avec ses camarades de meute. Depuis notre escapade sur Terre, et les ennuis qu'on avait eu, Orion était bizarrement protecteur avec moi. C'était limite glauque quand on savait que j'avais presque le triple de son âge. Habillé avec un jean noir et une chemise blanche à moitié ouverte, ses cheveux gris en bataille et son stéthoscope placé à son cou qu'il avait oublié de ranger lui donnaient un air débraillé presque mignon. Ses yeux marrons pétillaient de malice tandis qu'il rigolait, ou plutôt embêtait Adam, le bêta de la meute du Clair de Lune.
Je n'avais pas eu l'occasion de discuter beaucoup avec ce loup. D'abord à cause des entraînements intensifs que je fournissais à Astrid mais aussi aux combattants qui seront présents durant la grande bataille, ensuite, car même si j'arrivais à les supporter, les loups, plus je les évitais mieux je me portais et enfin, Adam était plutôt du genre taciturne. Grosso modo, je n'avais du l'entendre que lâcher une phrase ou deux depuis le début de mon séjour ici et malgré le fait que la réunion ait débuté depuis près de dix minutes, il n'avait toujours pas desserré les lèvres, à part pour grogner de temps à autre. De tous les loups composant la meute d'Auxanne, ce bêta, second de l'alpha, était sans doute le plus mystérieux mais aussi le plus costaud. Mesurant près d'un mètre quatre vingt dix pour cent kilos de muscle, ce lycan aux nombreuses cicatrices était l'un des seul de cette bande d'agitées dont je redoutais la puissance. D'après ce que j'avais compris, Adam allait faire parti de la bataille, même ci ses réactions me faisaient plutôt dire qu'il s'en désintéressait complètement. Une vraie énigme ce garçon.
Alors que j'allais l'examiner de façon plus appuyé, ses iris d'un noir persan harponnèrent les miennes. Je ne pus soutenir son regard que quelques secondes avant que mes yeux ne se détournent d'eux même. J'avais raison, ce gars était dangereux. Réussir à me faire détourner le regard était un véritable exploit. Cela voulait-il dire qu'il était plus dominant que moi ? Plus létale ?
Par mégarde, mes pupilles s'étaient arrêtées sur la créatrice folle aux armes rocambolesques. Assise juste à côté d'Aeden, la petite elfe n'arrêtait pas de le toucher et de le tripoter, ce qui n'avait pas l'air de plaire à la Princesse. Ça n'avait pas l'air de lui plaire du tout vu le regard plein de haine et de mépris qu'elle lui lançait. Examinant plus attentivement cette excentrique habillée d'une combinaison de travail bien trop grande pour elle, je dus admettre en mon for intérieur son extrême beauté. De petite taille, son visage en forme de cœur et son allure générale de poupée de porcelaine contrastaient avec la dangerosité des armes et objets qu'elle créait et manipulait à sa guise et à la perfection. D'après les quelques informations que j'avais pu glaner sur elle grâce à des recherches approfondies, la petite Awëna venait d'une tribu qui c'était depuis longtemps éteinte. Une tribu qui avait choisi de délaisser la nature pour s'adonner à la construction de technologies magiques. Une activité qui leur avait couté la vie. Ce petit clan avait été massacré par peur et avarice. L'histoire d'Awëna me faisait compatir à son sujet, elle aussi avait perdue tout ce qui lui était chère durant un massacre. Malgré tout, elle n'était pour moi qu'une inconnue et une potentielle menace. Les pouvoirs des elfes étaient encore plutôt méconnus et mystérieux, aussi, ce petit bout de femme avec une case en moins était à garder à l'œil.
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Les Ombres des Mondes : la reine dragonne et le mercenaire noir
Paranormal« Mais dans quelle merde je m'étais encore fourrée ? ». Lorsque Astrid Vasilikos voit débarquer dans le cabinet vétérinaire glauque dans lequel elle travaille de nuit Auxanne Archigos, couvert de sang et de blessures, elle pense que son heure de mou...