17.1. Ce à quoi on ressemble

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Juin 3517

Ça ne fait pas deux jours que le mois de juin a commencé que Noa appelle Taeko pour lui parler de son costume. L'enveloppe qui apparait sur le rebord de sa fenêtre dans le même temps, ensablée, lui dit où ils se retrouveront ce soir, et elle travaille encore sur la tenue qu'elle portera. Elle laisse tomber pour le moment, intriguée davantage par l'œuvre de l'hyperacousique qu'intéressée à l'idée de passer deux heures de plus sur le tissu qu'elle métamorphose sans relâche depuis la veille. Alors elle sort de sa chambre, sa veste sur l'épaule, les manches retroussées. Elle doit faire partie des rares à ne pas porter l'uniforme d'été, mais elle ne peut pas prendre le risque de tomber malade, avec le temps anormalement frais.

Surtout qu'elle doit avouer que Noa Nagako travaille dans un réfrigérateur, et qu'il est hors de question que son alter lui tienne chaud. Réguler sa température corporelle a beau être un « truc » qu'elle sait faire, moins elle utilisera son alter aujourd'hui, et mieux elle se portera. Elle traverse tout le lycée, pour arriver devant la porte métallique qui s'ouvre avant qu'elle n'ait le temps de ralentir.

- Bonjour ! l'accueille joyeusement l'adolescente.

La métamorphe lui adresse un sourire fatigué, et fronce le nez en se rendant compte que la température dans la pièce est bien plus haute qu'elle ne le pensait.

- Tu as l'air d'être gelée, lui explique rapidement Noa. Bon, j'ai fait quelques analyses supplémentaires, et j'ai trouvé un truc qui m'intrigue. Alors je voulais te demander : tu peux absolument tout métamorphoser ?

Taeko ne met pas longtemps à réfléchir à si elle doit lui dire ou pas, avec le sang qu'elle a récolté et son intelligence, l'autre lycéenne a tous les moyens de s'en assurer. Non, ce qu'elle cherche, c'est le cas particulier de quelque chose qu'elle n'aurait pas réussi à métamorphoser :

- Non, d'aussi loin que je me souvienne, je peux transformer n'importe quelle matière en autre chose. Pourquoi ?

- Je voudrais voir les évolutions d'une transformation sur objet, si ça ne te dérange pas. Voir s'il y a du mouvement entre les molécules encore après ton passage ou non. Ça m'aidera à savoir si la matière que j'ai mise au point pour toi est la bonne.

- Pour moi ? s'étonne-t-elle. Tu veux dire que tu as inventé un tissu ?

- Et il va falloir que tu en apprennes la formule ! dit-elle fièrement dans le cas où tu n'aurais pas ton costume sur toi. Mais ne t'inquiète pas, c'est la bonne matière, et je me suis arrangée pour que ce soit confortable. Regarde ça.

Elle se lève pour attraper une grande chute de tissu, et l'étire avec une facilité aberrante.

- Elle est élastique, pour que tu n'aies pas à la métamorphoser à chaque fois, et elle est chaude, même si ses mailles sont assez espacées pour que ton alter ne se bloque pas en suspension autour de toi, dit-elle en faisant référence au nuage de particules qui l'entoure à chaque métamorphose. Il prend facilement la couleur que tu veux, poursuit-elle en le faisant devenir bleu d'une torsion électrique, et il est doux au touché à l'intérieur.

Ce n'est pas la première fois qu'elle le remarque, mais bien que Noa tente d'attribuer une grande part de ses mérites à Aike, son assistant robotisé, elle n'en demeure pas moins d'un génie incroyable. La façon qu'elle a de gérer d'ailleurs ses outils le montre bien.

- Et donc, ton costume donne ça, pour le premier jet. Je me suis basée sur ton dessin, et je n'ai pas réussi à l'améliorer. Les lignes étaient simples, et honnêtement, je ne voyais pas comment rendre ton croquis... meilleur.

Ce qui la gêne, ce n'est pas de ne pas avoir apporté sa patte à l'ouvrage, mais de ne pas avoir trouvé ce qui manquait à un dessin d'adolescente, qui n'y connait pourtant pas grand-chose.

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