Mars 3513
Sera s'habille ce matin. Ça l'étonne de le faire, mais elle a décrété qu'elle ne resterait plus dans sa chambre, à se morfondre, pendant que tout le monde vit sa vie dehors. Ça ne lui ressemblait pas, il y a trois mois, et elle n'a pas envie que ce soit définitivement elle.
Sera avise rapidement tous les miroirs de sa chambre qu'elle a décrochés, cachés, ou tout bonnement jetés. Elle se sent en sécurité, à l'intérieur. Mais Seal a raison : une adolescente de son âge devrait sortir un peu, voir du monde. Voir plus de monde, et surtout, des jeunes de son âge à elle.
- Dire que j'ai pris l'habitude de trainer dans un bar...
Elle hausse les épaules en enfilant son sweat à capuche et son jean. Un jour de semaine, personne de son collège ne sera dans la rue, elle peut se risquer à aller voir. Juste voir. Un petit par un petit pas, comme son ami lui a recommandé.
- Et si tu n'arrives pas à retourner à l'école, je m'arrangerais quand même pour que tu aies les cours. Tu ne peux pas prendre de retard sur ta deuxième année, tu risque d'avoir du mal à le rattraper ensuite, si tu veux vraiment y retourner.
A ce moment là, elle n'en n'avait vraiment pas envie. Mais si Seal se proposait de lui faire passer les cours et de lui expliquer, elle pourra au moins se dire qu'elle n'a pas terminé en phobie scolaire, juste... en agoraphobie avec les collégiens.
La capuche sur la tête et les cheveux d'un crème rosé, elle traverse la rue. Sa mère est partie travailler tôt ce matin, elle rentrera assez tard, assez pour qu'elle fasse semblant d'avoir été en cours, alors, sachant que le collège ne l'appellera pas : ils n'ont plus le bon numéro. Lorsque sa mère en a changé, elle a oublié de leur donner le nouveau, et aujourd'hui, ça l'arrange bien.
Elle met ses mains dans ses poches au moment où le vent commence à se lever, et après près d'une heure de marche dans le silence bruyant de la rue un jour de semaine, elle arrive en face de son collège. Elle regarde le bâtiment, fait un pas, puis un autre, et finalement, elle se retrouve devant la loge du gardien, qui met un temps à la reconnaître :
- Tiens donc, tu es revenue, toi ?
- Je... voudrais... voir le directeur, pour lui en parler, justement. Je peux entrer ?
- Bien sûr ma grande, mais pas de bêtises, hein, dit-il avec un clin d'œil.
Elle retire sa capuche de réflexe en passant le portail, entre dans le hall, retire ses chaussures pour mettre ses chaussons, qui l'attendent toujours dans son casier, et sans trop y penser, elle monte l'escalier. Ce n'est qu'en arrivant devant la porte du bureau qu'elle se met à trembler.
- Mais qu'est ce que je fous ici ?!
La porte s'ouvre sans qu'elle n'ait une seconde pour faire demi-tour, et le vieil homme la dévisage, finissant par demander :
- Qu'est ce que tu fais ici ?
- Je... peux vous... parler ?
Sera commence déjà à avoir des sueurs froides. Elle ne maîtrise absolument plus rien, et manque de tomber en arrière quand il pose sa main sur son front, inquiet.
- Je vais t'emmener à l'infirmerie.
La cloche sonne, et elle se met à pleurer :
- Non, s'il-vous-plaît !
Il l'attrape alors par le bras, la tire à l'intérieur, et la fait s'asseoir sur le fauteuil devant le bureau. Il s'empresse de lui servir un verre d'eau, et de sortir une couverture, dont il doit se servir lors de ses nuits passées au bureau pour lui mettre sur les épaules. Il ne fait pas le tour de son bureau ensuite. Monsieur Nobutoki est un adulte auquel pas mal de monde fait confiance, tout simplement parce qu'il inspire, avec ses yeux rouges luisants, et ses cheveux encore flamboyants un quelque chose que la plupart des membres du personnel enseignant n'ont pas : du charisme.
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Métamorphe
FanfictionCycle I, Livre II D'un côté, il y a Taeko, et de l'autre, Sera, visages de l'apprentissage héroïque semé d'embuches et au cruel point commun d'un alter aux conséquences désastreuses : la métamorphose. Parce qu'il peut être si dur d'être soi quand on...