Janvier 3514
Encore peu familière avec la maison, Sera met un temps avant de se rendre compte que les escaliers sont plus loin de sa porte de chambre qu'elle s'en souvenait de la veille. Ce n'est pas très important, mais pour elle, il s'agit d'apprendre à se repérer dans sa nouvelle maison, dont la taille fait, par étage, le quintuple de leur ancien appartement.
Elle descend pour prendre son petit déjeuner, quand Ryūtaro la fait sursauter, arrivant près d'elle d'un pas rapide, déjà en chaussures alors qu'elle est encore en pyjama :
- Non, mais je ne vais pas manger ça ! C'est n'importe quoi !
Sera regarde son beau-père, sans comprendre. Elle ne le trouvait pas particulièrement étrange, avant ce matin, et bien qu'elle n'ait pas une haute opinion de lui déjà au départ, là, elle se sent totalement larguée. Comment sa mère a-t-elle pu épouser un type pareil ?
- Pardon ? demande-t-elle timidement.
Il lui tend une assiette vide, contrarié :
- Je ne vais pas manger ça ! répète-t-il. Allez dire à votre patron que je veux le voir.
Elle regarde l'assiette vide, et tente de ne pas le contrarier en prenant la vaisselle :
- D'accord...
Il secoue la tête et replie le bras, gardant l'assiette. Il dit avec un léger sourire :
- Non, si tu veux que ça marche, il faut que tu te mettes vraiment dans la peau de la serveuse. Honnêtement, qui se laisserait parler comme ça ? Déchaine-toi ! On recommence !
Il recule avec entrain, et revient au pas de charge, l'air plus contrarié encore que tout à l'heure. Elle ne s'en rend pas compte, mais par méfiance, elle prend quelques centimètres, et bombe le torse. Avant même qu'il n'ouvre la bouche, elle lance :
- Désolée, je ne suis pas de service, aujourd'hui, allez voir l'une de mes collègues.
Il rit, ravi.
- Pas mal ! Tu as vraiment bien travaillé ! Je dois aller au boulot. A ce soir, passe une bonne journée !
Il lui donne l'assiette, l'embrasse sur le front, et attrape sa veste en allant dans l'entrée. Elle n'a pas le temps de se poser de questions sur l'étrangeté de ce qu'il vient de se passer que sa mère arrive à son tour, lui demandant pourquoi elle a une assiette dans les mains, et la pousse à prendre son petit déjeuner. Elle se fait une raison : pas question d'arriver en retard au collège.
Elle aurait pu croire que le matin avait été un élément curieux, mais quand le jour suivant, il recommence, elle doit se faire une raison : le mari de sa mère est fou. Complètement fêlé.
- Maman, tu peux m'aider à mettre mes chaussures, s'il-te-plaît ? demande-t-il quand elle passe près de lui.
Sera secoue la tête, hésitante.
- A l'âge que tu as, tu peux le faire tout seul.
Il grimace, et fait ses lacets lui-même.
- De toute façon, tu ne fais jamais rien pour moi.
Elle hausse les sourcils, coite, et il lui lance un clin d'œil. La séquence doit être terminée, parce qu'il se lève de table et l'embrasse à nouveau sur le front avant de partir au travail.
Tout au long de la semaine, elle passe de la secrétaire, serveuse, à un chauffeur de bus, une grand-mère au sale caractère, et bientôt, elle comprend qu'il la fait jouer de petites scènes de ménage le matin : des disputes, des questions sur les courses à faire, des services à rendre, des avis, ou des demandes de direction. Alors elle se prête au jeu, et un matin c'est elle qui lance la scène la première, scandalisée :
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Métamorphe
FanfictionCycle I, Livre II D'un côté, il y a Taeko, et de l'autre, Sera, visages de l'apprentissage héroïque semé d'embuches et au cruel point commun d'un alter aux conséquences désastreuses : la métamorphose. Parce qu'il peut être si dur d'être soi quand on...