21.1. Ce qui touche les cœurs

6 3 0
                                    

Juillet 3517


Après plusieurs jours de battement, au cours desquels on leur parle entre-autre des stages en agence, l'effervescence est telle que Taeko doit attendre des heures tardives pour trouver du calme. Calme qu'elle peine à conserver, elle aussi largement intéressée par ces partenariats à venir. Elle revient de sa session d'entrainement, quand elle retrouve Shinso assis sur les marches devant les portes de l'internat.

- Tu n'es pas allé t'entrainer, ce soir ? demande-t-elle en inclinant la tête pour la regarder.

Il sourit en secouant la tête.

- J'y suis allé ce matin. J'ai évité les foules, et ça m'a épargné de finir à la même heure que toi. Sauf que maintenant, je n'arrive pas à dormir.

Elle se moque, riant franchement :

- Tu as essayé les infusions, les douches chaudes, ou les bouillottes ?

- J'ai pas de bouillotte.

Elle se laisse choir à côté de lui, et répond sur le ton de la confidence qu'elle en a une, s'il veut qu'elle lui prête. Il la remercie d'un hochement de tête, et la regarde se vautrer sur le reste des marches, une jambe allongée en avant, et le reste très inconfortablement étalé le haut.

- T'es bien, là ? demande-t-il avec un sourire en coin.

- Là tout de suite, oui. Dans dix minutes, j'ai mal partout, mais c'est une autre histoire. J'ai juste envie de le faire. Quand j'aurais les marques en lignes sur le corps demain, tu pourras être fier de savoir pourquoi.

- Je ne suis pas sûr qu'il y a matière à être fier, rit Shinso en tournant la tête vers l'allée.

Elle hausse les épaules en regardant autour d'eux à son tour. Il n'y a personne dehors, à cette heure. Et avec la chaleur qu'il fait la journée, elle se demande bien pourquoi. Les cigales hirugashi sont encore bien bruyantes, même si la soirée est passée depuis longtemps, pour laisser place à la nuit, et la brise fraiche qui passe entre les arbres ne suffit pas à en couvrir le bruit.

- Je ne pensais pas qu'on pouvait trouver autant de cigales en agglomération.

Méditant une minute ce qu'elle vient de dire, l'adolescent répond simplement :

- Je les ai toujours entendues. Et je vis en ville.

- J'ai toujours vécu en ville. Mais là où j'étais... il n'y avait pas de végétation. Ceci explique peut-être cela.

- Très certainement. Tu t'y connais en cigales ?

Fouillant un peu dans sa mémoire, Taeko laisse sa tête se reposer sur la marche derrière elle, accentuant la pression des marches dans son dos. Elle débite finalement, les bras croisés :

- Climat humide, donc vit en région sud ou extrême nord. Aime le bois de cyprès, cèdre et bois dur. Les femelles sont plus fines que les mâles.

- Sud ou nord ? répète-t-il intrigué. C'est pas du tout le même climat.

Elle tourne la tête vers lui :

- Climat continental humide et climat subtropical humide. Je crois qu'elle n'est pas très exigeante.

- Vu comme ça...

- Tu n'as pas l'air très exigeant non plus, enchaine-t-elle.

Il la regarde, et elle poursuit, en essayant de faire de son analyse une liste rapide comme elle vient de le faire :

- Tu es distant, mais pas asocial. Tu mange souvent avec du monde, mais ne parle pas beaucoup pendant les repas. Tu peux faire équipe avec n'importe qui, ne demandant personne. Tu n'as pas l'air très exigeant : tu te conforme facilement à ce qui t'entoure.

MétamorpheOù les histoires vivent. Découvrez maintenant