Chapitre 4

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D'une démarche guillerette, Luna évolua à découvert en direction de sa cible, un homme bedonnant d'une quarantaine d'années prostré devant le quai. Il surveillait les alentours d'un regard farouche. L'homme plissa les sourcils en voyant approcher la jeune fille. Sans s'en préoccuper outre mesure, Luna adopta un air égaré.

― Excusez-moi, monsieur. Vous n'auriez pas vu passer une bande de pêcheurs, par hasard ? Je devais les retrouver ici et je suis un peu perdue.

L'homme observa un court silence, l'air de se demander si la jeune fille en face de lui était parfaitement niaise ou si c'était de circonstance.

― Non, je n'ai vu passer personne de ce genre, maugréa-t-il. Et entre nous, je ne crois pas qu'il fasse un temps idéal pour la pêche.
― Bon, j'ai dû me tromper d'emplacement, dit-elle, ignorant la dernière remarque du gardien. Au fait, il est à vous ce porte-monnaie, par terre ?

Elle indiqua un point au sol, derrière son interlocuteur. Dès que l'homme se fut retourné, Luna tira un mouchoir de sa poche et s'en protégea les narines. De l'autre main, elle attrapa la bombe aérosol, en pulvérisa le contenu au visage de sa cible et le fit tomber au sol d'un croche-patte. Puis elle recula de quelques pas et attendit que le soporifique fasse son effet. Dix secondes plus tard, Luna s'approcha prudemment et perçut sa respiration régulière, caractéristique d'un sommeil profond. Mayumi et Lucas accoururent dans sa direction.

― Je crois que c'était le dernier à monter la garde près d'ici, avança Lucas.
― Il devrait en avoir pour une demi-heure au moins à roupiller comme ça, prédit Luna en rangeant son mouchoir et la bombe aérosol. A vous de jouer. Je vais donner un coup de main aux autres.
― Soyez prudents, insista Mayumi. Si tout se passe bien on se retrouvera à l'entrée du port dans trente minutes.

***

Mayumi et Lucas évoluèrent en silence dans le couloir sombre et étroit qui desservait les cabines du pont inférieur du Moonlight. Pour une raison inconnue, tous les feux étaient éteints et les lieux demeuraient étrangement calmes.

Lucas, équipé d'une paire d'écouteurs à l'extrémité ornée d'une petite ventouse, auscultait chaque porte sur leur passage. Ce gadget, une espèce d'hybride entre des écouteurs et un stéthoscope, était destiné à capter et amplifier le moindre son circulant entre les murs d'une pièce non-insonorisée, des ronronnements d'une personne endormie jusqu'au contact de pieds nus sur une épaisse moquette. Son apparence anodine permettait aux agents d'épier des conversations sans éveiller les soupçons, du moment qu'ils en dissimulaient l'extrémité au regard des passants.

Une douzaine de portes plus tard et malgré l'amplificateur poussé à son maximum, Lucas n'avait toujours identifié aucune chambre occupée.

― Laisse tomber, il n'y a pas l'air d'y avoir âme qui vive ici, lança sa coéquipière en considérant le sol poussiéreux et les énormes toiles d'araignées qui pendaient au plafond. A mon avis, il y a un bon moment que cette partie du navire n'est plus habitée.

Lucas rempocha ses écouteurs.

― Ça veut dire qu'on va devoir encore descendre d'un niveau ? demanda-t-il.
― Plutôt chercher vers l'avant. Ce ferry est suffisamment grand et les occupants dont tu as parlé sont sûrement massés du côté bâbord, avec leur otage pour pouvoir le surveiller. Nous pouvons toujours nous enfoncer pour voir s'il y a du monde, mais ça m'étonnerait.
Ils observèrent quelques secondes de silence, l'oreille tendue. Les compartiments arrières du navire étaient dans le calme absolu.

― Tu dois avoir raison. Si ces cabines ne servent pas, c'est qu'ils doivent être rassemblés au même point.

Leur émetteur diffusa un signal sonore, les informant de l'entrée d'une communication.

High Spies - Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant