High Spies - Tome 1

Chapitre 25

Brian regagna la Résidence vers dix-neuf heures. Il trouva ses coéquipiers installés autour de la table du salon, concentrés sur la lecture de leurs notes et manuels en rapport avec les formations dispensées par le Bureau. Un doux parfum de thé à la menthe flottait dans l’air.

― C’est rare de vous voir tous aussi studieux en même temps, observa-t-il en se déchaussant à l’entrée. Ne me dites rien, un contrôle surprise se prépare ?
― Dans le mille, répondit Yoey.
— Un agent de l’équipe 9 était de corvée de paperasse ce matin lorsqu’il a entendu des instructeurs discuter en utilisant leur fameux code secret, expliqua Luna en prenant un biscuit sur le plateau de thé.
― Ensuite son équipe et celle d’Hiroshi se sont débrouillées pour faire envoyer deux juniors dans la salle des profs, renchérit Lucas. L’un d’eux a réussi à faire entrer un micro miniaturisé en se faisant confisquer un jouet sur lequel il l’avait fixé. Du coup, ils ont pu les écouter pendant leur pause-café. Se retrouver uniquement entre eux ne les a pas empêchés d’employer leur code, mais on a la confirmation qu’ils programment bien un contrôle dans trois jours. Quant à savoir sur quelles disciplines, c’est une autre affaire.

Outre les stages spéciaux de formation et les examens officiels auxquels les agents du Bureau avaient droit une fois par an, aucun des contrôles et tests de connaissances n’était signalé à l’avance. Ceux-ci, plus fréquents et imprévisibles, n’étaient annoncés aux agents que dans l’heure précédant le début de l’épreuve.

Aussi, le corps enseignant mettait un point d’honneur à garder ces contrôles secrets jusqu’au dernier moment, dans le but d’empêcher les agents de s’y préparer.

― Ils ont été diligents, repris Brian. Comment ils ont appris qu'il y aurait un contrôle ?
― Pendant une discussion, un senior a lâché quelque chose au sujet d’un séjour en Italie qu'il désignait comme le pays natal de la prof de Droit international, informa Lucas. Mais tout le monde sait qu’elle vient d’Espagne, alors ça a semblé louche. En repassant en revue leur discussion, on s’est rendu compte qu’ils parlaient des préparatifs d’un prochain contrôle, et peut-être même de l’une des disciplines visées.
― Vous vous retrouvez un peu dans tout ça, les filles ? demanda Brian à Sidney et Britney.
― Un peu, oui. Ils nous ont expliqué le concept.
― Ce que je ne comprends pas, c’est que les instructeurs aient l’air de tenir coûte que coûte à dissimuler aux agents tout ce qui concerne les contrôles, dit Sidney. Est-ce qu’il n’y aura pas de conséquences s’ils découvrent que des agents ont manigancé pour les avoir quand même ?
― Il n'y a pas à s'inquiéter, dit Brian en s'asseyant dans le canapé. En fait, tout le monde voit la situation comme un jeu dans lequel nous les agents avons pour rôle de collecter des infos sur les contrôles à l’avance. Les instructeurs eux ont pour but de dissimuler ces infos de manière à nous surprendre le moment venu. Et cette tradition date d'avant notre recrutement à tous. On raconte même qu'un ancien agent major a déjà réussi à soutirer tout le contenu de l'épreuve à un prof en lui faisant du chantage.
— Wow, on peut vraiment aller aussi loin ? s'étonna Sidney.
― À cette époque, tout dépendait de l'audace de chacun et de ce que les agents étaient prêts à risquer, dans la limite de ce qui est légal, expliqua Brian. Mais aujourd'hui, ça m'étonnerait que le QG laisse passer un comportement aussi osé.
— Le plus drôle, c'est que notre règlement interne a interdit le chantage envers les instructeurs juste après que cette rumeur ait commencé à faire du bruit, ricana Yoey. Je me demande toujours qui a réussi cet exploit. Pour oser faire chanter un prof, il doit en avoir dans le bide.
— Vu que nous sommes des espions pleins de ressources, les instructeurs emploient toutes les ruses possibles pour dissimuler des informations sur le moment et le contenu des prochains contrôles, repris Lucas à l'intention de ses soeurs. Utiliser des codes secrets en fait partie. Il y a aussi certains signes indicateurs qui reviennent souvent si on est assez observateur, comme le fait que les instructeurs veillent plus tard le soir, qu'ils se concertent plus souvent que d’habitude, ou que des salles sont préparées en attente d'un examen. Essayer de glaner des informations au sujet de ces contrôles en exerçant ses facultés d’espionnage n’est ni interdit, ni sanctionné, et en plus ça nous permet de faire nos preuves. J’irai même jusqu’à dire qu'au fond, c’est ce qu’ils attendent de nous.
― Je comprends mieux, dit Sidney. On se sent un peu prises au dépourvu et moi en tout cas je ne suis pas certaine d’avoir de bons résultats à ce premier contrôle, mais ça à l’air excitant malgré tout.
― C’est normal, intervint Luna en servant une tasse de thé au Leader. Et ne vous en faites pas. Vu que vous êtes nouvelles et que vous avez pris le train en route en ce qui concerne les cours, ce contrôle sera de pure forme pour vous. Les formateurs n’attendront pas grand-chose de vous pour un début. Ils seront juste agréablement surpris si vous obtenez de bonnes moyennes.
― Même si nous sommes actuellement en train de tricher vis-à-vis du concept de ces contrôles surprise ? demanda Sidney, le sourire aux lèvres.
― Au fond, ça revient un peu au même, hésita Lucas. S’ils ont la preuve que certains agents sont au courant pour le prochain contrôle, en nous surprenant tous en train d’étudier par exemple, ils pourraient soit le reporter à un moment où on ne s’attend pas, soit l’avancer brusquement. À demain matin, par exemple.
― Comme la dernière fois, ajouta Yoey en feuilletant un manuel de mécanique. S’ils voient que les lieux de rencontre habituels des agents sont un peu trop déserts, que toutes les places sont prises à la bibliothèque ou que la majorité des agents sont en train d’étudier précisément dans la période où ils préparent un contrôle, ça pourrait réduire tous nos efforts à néant. On s’est donc tous passés le mot pour étudier en cachette, ou sans en avoir l'air, de préférence à l’abri des caméras du QG.
― Pour moi, peu importe, dit Brian en sirotant son thé. Je prendrai ce contrôle comme il vient, sans "tricher".
― Tu dois vraiment être très sûr de toi pour ne pas essayer de réviser un peu, dit Lucas.
― Cette fois, c’est plus une question de savoir ce que je vaux vraiment à un contrôle auquel je ne me suis pas préparé à l’avance. Si je ne suis pas capable d’obtenir une bonne moyenne à ces tests naturellement, ma place de chef d’équipe aura clairement l’air usurpée. Et je ne suis pas le seul Leader à le penser.
― Une question d’honneur, estima Yoey. J’aurai bien fait comme toi, mais je me sens trop désarmé face à un éventuel contrôle pour y aller sans réviser. Et vu que ça peut jouer sur nos points d’accréditation personnels, j’aime autant ne pas trop foirer.
― Pareil, renchérit Lucas. Je crois que je n’ai pas relu mes notes de tout le mois précédent. J’ai l’impression de ne plus rien avoir en tête. Maintenant que je suis averti, je ne peux certainement pas me présenter à ce contrôle sans rien tenter.

La porte d’entrée s’ouvrit sur Mayumi, qui entra dans se presser dans l’appartement, le regard inexpressif.

― Tu arrives juste à temps, lui dit Brian. On t’attendait pour aller dîner.
― Je croyais que vous seriez déjà au réfectoire. Qu’est-ce que vous faites ?
― Le prochain contrôle est confirmé, alors on a décidé de bosser un peu, l’informa Luna. D’ailleurs, si tu veux relire deux ou trois trucs avant, c’est le moment ou jamais.

Le regard absent, Mayumi se laissa tomber sur un pouf à même le sol et cala son menton dans le creux de sa main.

― Ça ira. De toute manière, ça m’étonnerais que ce contrôle soit maintenu.

Ses camarades saisirent la pointe de gravité contenue dans ses paroles. Ce n’est qu’à ce moment-là qu’ils remarquèrent l’expression sonnée de Mayumi.

― Quelque chose ne va pas ? s’inquiéta Brian.

Elle inspira profondément.

― Vous savez, Weber, le leader de l’équipe 2...
― Kurt ? Oui, évidemment.
― On l’a retrouvé mort en circulation il y a quelques heures. Le Comité d’Enquête est encore sur les lieux.
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