Chapitre 1 : La rencontre

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J'enfile ma paire de tongs puis me jette un dernier coup d'œil dans le miroir de l'entrée, histoire de me savoir présentable. Je n'ai pas pris le temps de m'occuper de ma tignasse brune alors je l'attache rapidement en une queue-de-cheval. Voilà qui fera l'affaire.

–      Ne rentre pas trop tôt ! me crie Kristen depuis la cuisine.

J'étouffe un rire. Mon père serait fou de savoir qu'elle me laisse sortir le soir, sans couvre-feu.

–      C'est promis.

Je pousse la porte d'entrée et me rue à l'extérieur. Le soleil m'éblouit, si bien que j'ai du mal à garder mes yeux grands ouverts. Le ciel est d'un bleu éclatant et la chaleur accablante, mais j'adore ça.

La plage se trouve à seulement quelques pas de la maison de Tante Kristen, je m'y rends en peu de temps. Le doux claquement des vagues et le sable fin me persuadent une fois de plus que je suis bien en Floride, loin de tout. J'emplis mes poumons d'air puis expire, doucement, tout doucement.

Tu ne rêves pas.

–      Oh, hé, Abby !

La voix de mon amie me ramène instantanément à la réalité. Ava me fait signe au loin. Je me mets à courir comme une folle dans le sable et manque de m'écraser la figure à maintes reprises. Maladroite, deux pieds gauches, c'est bien moi.

–      Tu m'as tellement manquée, copine ! s'exclame-t-elle en me serrant dans ses bras.

Derrière, Emy et Aaron suivent le mouvement et me sautent dessus. Une vague de joie m'envahit en les retrouvant. L'année a été longue sans eux, je m'en rends compte.

–      C'est fou comme vous êtes bronzés !

Je ne peux pas m'empêcher d'éprouver une pointe de jalousie. J'ai l'air malade à côté d'eux.

–      Ça, ma vieille, c'est le résultat d'une année au soleil, lance fièrement Aaron. Si tu t'installais ici tu verrais que tu ne serais plus aussi blanche qu'un cachet d'aspirine.

Je fronce les sourcils, vexée qu'il fasse allusion à la pâleur de ma peau, et lui donne un coup de coude dans les côtes. Il fait mine de se tordre de douleur, ce qui a le don de m'agacer davantage. Pourquoi faut-il toujours que l'on me sous-estime ? Certes, ma silhouette frêle n'aide pas mais, après tout, il ne faut jamais se fier aux apparences.

–      Alors, quoi de neuf à Kansas City ? me demande Emy tandis que nous marchons le long de la mer.

Elle agite sa longue chevelure dorée dans son dos. Emy fait partie de ces filles agaçantes qui n'ont aucun défaut physique apparent. Elle a de grands yeux bleus, un teint de pêche et de longues jambes aux mollets galbés.

–      Oh... rien de bien intéressant. C'est le néant total.

Évidemment, je n'ai aucune envie de gâcher cette ambiance parfaite avec mes histoires de pauvre petite enfant triste.

–      Espérons que ça le sera moins ici, répond-t-elle de sa voix douce et apaisante.

Je redoute une seconde qu'elle m'ait percée à jour. En plus d'être très belle, Emy a une intuition hors du commun. Il est presque impossible de lui cacher quelque chose, ce qui est pas mal effrayant quand on y pense.

–      Et Jesse ? Comment va-t-il ? je m'empresse de demander afin d'éviter tout autre confusion de sa part.

Mes amis sont tous étonnés de ma question et échangent des regards gênés. À vrai dire, je le suis autant qu'eux. Encore une fois, je ne réfléchis pas avant de parler. Un silence stupéfait plane durant quelques secondes.

À corps perduOù les histoires vivent. Découvrez maintenant