Chapitre 30 : Croire en l'amour

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À cet instant, il sait qu'il a gagné, je n'ai aucun doute là-dessus, et la pression qu'il exerce sur ma main me le confirme. En ce qui me concerne, je ne peux pas en dire autant. Une fois de plus, je n'ai pas su lui tenir tête et je me demande bien si j'y parviendrai un jour. Pas sûr.

Lorsque je reprends conscience de l'état de ma tenue, grâce - ou à cause - de l'odeur nauséabonde d'alcool séché qui s'en échappe, je m'empresse de mettre de la distance entre Jared et moi.

- Hum, tu peux... te... tourner... pendant que je me change ? je demande timidement.

Il s'exécute avec un haussement d'épaules.

- Et ne t'avise pas de regarder.

Mon avertissement le fait rire.

- Tu ne seras pas la première fille que je vois nue.

Le naturel avec lequel il évoque ses « relations » précédentes me met terriblement mal à l'aise. Évidemment je me doute qu'il a de l'expérience, mais, malgré tous les efforts que je fournis, l'envie de vomir est proche. L'imaginer avec une autre fille suffit à m'écœurer.

Tout en le surveillant du coin de l'œil, je me dirige vers l'armoire et me tourne pour me déshabiller. C'est une délivrance de ne plus sentir la moiteur de mon haut. Triomphante, je jette le bout de tissu dans un coin de la pièce.

- Très joli.

Mon corps se fige, en alerte.

- Jared ! je m'exclame en cachant ma poitrine - bien que je sois toujours de dos.

- Quoi ? s'étonne-t-il en prenant des accents aiguës. Je regarde juste la photo accrochée à ton mur.

Ne trouvant pas de réponse, je grogne dans ma barbe et enfile précipitamment un soutien-gorge et un tee-shirt propres - le rire étouffé de Jared en arrière-fond.

- Quoi ? Tu as sincèrement cru que j'étais en train de te mater ?

- Pas du tout ! je proteste.

Je retourne m'asseoir à côté de lui, les joues empourprées, et garde les yeux baissés sur le sol. L'idée qu'il ait profité du moment où j'avais le dos tourné pour m'observer m'a peut-être effleurée...

- Je sais être sage, tu sais, m'assure-t-il avec un clin d'œil. Même si j'avoue que c'était assez tentant.

Mon cœur bat à tout rompre, prêt à exploser.

- Ce sont eux, ton frère et ta sœur ? s'enquiert-il, son sérieux retrouvé, en pointant la fameuse photo sur mon mur.

Le souffle court, j'acquiesce.

J'ai encore beaucoup de mal à réaliser que dans moins de deux jours je serai à Kansas City. Je me demande si Paul aura enfin perdu sa première dent de lait, ou si Eïleen aura des tonnes d'histoires à me raconter sur ses copines. Quel qu'en soit l'objet, j'ai hâte de les voir. C'est l'unique point positif que j'ai trouvé à mon retour.

- C'est marrant, ils ne te rassemblent vraiment pas.

Jared paraît fasciné par la photo, ce qui me laisse stupéfaite.

- On me le dit souvent, je plaisante en riant. À croire que j'ai été adoptée.

Son front se plisse, l'air tendu, sur la défensive.

- Il n'y a aucun mal à ça, réplique-t-il sèchement.

- Oh, euh, c'était... maladroit, j'ajoute aussitôt, regrettant ma bêtise et craignant de l'avoir blessé.

À corps perduOù les histoires vivent. Découvrez maintenant