Je referme la porte à clef et jette un coup d'œil au salon. Tante Kristen est assise sur le canapé, les bras croisés, l'air songeur.
– Je suis de retour, lancé-je pour attirer son attention.
– Ah, te voilà ! Tu m'as fait une sacrée frayeur, hier soir, dit-elle. J'ai hésité à t'emmener aux urgences...
– J'ai eu un gros coup de chaud, mais ça va beaucoup mieux.
– Tu ne te sens pas fatiguée, nauséeuse, étourdie... ? s'inquiète-t-elle.
– Je vais bien, tata.
– Ton père a appelé.
Évidemment. La panique oppresse instantanément mes poumons.
– Qu'est-ce qu'il voulait ? fais-je en m'étranglant à moitié.
– Prendre des nouvelles. Je lui ai dit que tu étais avec une amie.
Mon rythme cardiaque se calme, mais l'intérieur de mon ventre continue de trembler affreusement.
– Abby..., poursuit Kristen, le regard méfiant. Tu sais que tu peux avoir confiance en moi, n'est-ce pas ?
Je hoche la tête, sans cesser de fixer mes pieds. Dans les moments d'émotion, il vaut mieux garder les yeux baissés.
– Ava et moi, on va à une fête... ce soir, je bredouille pour faire diversion. J'ai ta permission ?
– Bien sûr, dit-elle en me souriant. Amuse-toi autant que tu veux. Les vacances sont faites pour ça.
Au fond, j'aurais aimé qu'elle m'interdise d'y aller. Ça m'aurait fait une excuse valable pour me défiler et Ava n'aurait pas pu objecter.
– Mais fais attention, me prévient-elle d'un ton ferme et assuré. Je ne veux pas voir les pompiers débarquer devant chez moi.
J'esquisse un petit sourire vague qui doit sûrement me donner l'air encore plus triste. Je me hais d'avoir accepté l'invitation et, par la même occasion, de ne pas avoir encore partagé un moment privilégié avec Tante Kristen. Je suis la pire nièce qui existe sur cette Terre. Damnez-moi, sur-le-champ. Mais elle ne semble pas m'en tenir rigueur. Celle-ci me retire de mon affront psychologique en m'entourant de ses longs bras. Cette marque d'affection me redonne le sourire et, surtout, le courage d'affronter cette stupide fête.
***
Comme prévu, Ava arrive à dix-neuf heures tapantes, un sac prêt à craquer dans chaque main.
– Tu as emmené toute ta garde-robe, ou quoi ?
– N'exagère pas, j'ai seulement pris quelques tenues.
Quelques me paraît insensé dans sa bouche.
– Pousse-toi, ça pèse ! se plaint-elle.
Je désespère en voyant la multitude de vêtements éparpillée dans ma chambre. Je ne peux pas croire qu'elle n'ait pris que quelques tenues. Ma garde-robe paraît ridicule à côté et c'est peu dire. Ava se met à trier les vêtements en mettant les jupes d'un côté et les robes de l'autre. Il y en a de toute sorte, allant de la plus banale jusqu'à la plus provocante. En jetant un coup d'œil, je tombe sur une robe ou, devrais-je dire, un morceau de tissu rouge pétant. Je doute qu'il recouvre la totalité du corps d'Ava, non. Paniquée à l'idée qu'elle puisse porter ça à la soirée d'Emy, je cache le tissu en dessous du tas – de sorte qu'elle ne le trouve pas.
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À corps perdu
RomanceAbbigail, dix-huit ans, discrète et peu sûre d'elle, retourne comme chaque été en vacances chez sa tante. Mais ces quelques jours passés sous le soleil écrasant de Floride vont chambouler son existence qui, jusqu'à présent, lui a toujours semblé vul...