Chapitre 25 : Les amis ne sont pas jaloux

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Je me réveille en pleine confusion, encore perdue entre rêves et cauchemars. Mais il ne me faut pas bien longtemps pour me souvenir de l'endroit où je me trouve. Les événements de la veille me reviennent brutalement à l'esprit, me prouvant bien qu'ils ne relèvent pas de mon imagination. Je m'accroche à ce que je n'ai pas pu inventer : les aveux de Jared par exemple. Il ne m'a jamais semblé aussi proche de moi - bien que nous n'ayons eu aucun contact physique. En fait, il s'est livré à moi. Pas entièrement, mais partiellement. Et il me semble que c'est déjà un grand pas.

Dans le coin opposé de la pièce, celui-ci est paisiblement endormi dans son lit - preuve supplémentaire que ma mémoire ne me joue pas de tour. Une mèche brune retombe sur ses yeux et se soulève au rythme de son souffle. Je n'avais jamais remarqué à quel point il peut paraître vulnérable sous ses airs de gros dur. Il me donne presque envie de le protéger. De quoi ? Je n'en sais rien. Car même s'il refuse de me l'avouer, je sens qu'il garde un secret enfouit. Un secret qui, comme moi, le ravage sûrement de l'intérieur. C'est sans doute pour cette raison que nous sommes parvenus à trouver un terrain d'entente - même si autre point en commun n'aurait pas été de refus...

Sans le réveiller, je ramasse mes tongs et m'échappe discrètement de sa chambre. Je ne préfère pas être là lorsqu'il se réveillera. Question de bon sens.

Avec un peu de chance, Maia ne sera pas encore levée. Je n'ai jamais déserté une seule nuit notre chambre - jusqu'à hier soir - ce qui, venant d'elle, ne peut être qu'une nouvelle source de questionnements.

J'appuie aussi doucement que je le peux sur la poignée et glisse ma tête dans l'entrebâillement de la porte.

- Elle daigne enfin se montrer.

Raté.

Maia est assise en tailleur sur son lit, un flocon de vernis entre les mains, l'air très concentré sur ses ongles de pieds.

- Où tu étais passée ?

Un mensonge, vite !

- Je suis allée faire un tour, dis-je le plus calmement possible.

- Bip bip, fait-elle d'une voix aiguë. Quand je suis rentrée hier soir, tu n'étais plus là.

Pire qu'un flic, je songe. Maia a tendance à oublier que j'ai seulement un an de moins qu'elle, mais ça ne l'empêche pas d'être surprotectrice et de s'intéresser à mes moindres faits et gestes. D'ordinaire, j'esquive, mais aujourd'hui, je décide du contraire.

- Je suis allée dormir dans la chambre de Jared.

Brusquement, elle relève la tête et me fixe, les yeux exorbités.

- Tu plaisantes ! s'exclame-t-elle. J'ai loupé un épisode, là ?

- Il ne s'est rien passé, Maia. Nous avons fait lit à part.

Elle plisse les paupières.

- Amis, c'est bien ça ?

Je ne relève pas. À quoi bon ? Moi-même je doute de l'exactitude de ce mot pour qualifier notre « relation ».

- J'essaie juste de comprendre, Abby, continue-t-elle en reprenant son activité de vernissage.

- Changeons de sujet, tu veux ?

- À ta guise.

Secouant la tête, je me mets à marmonner des paroles inintelligibles dans ma barbe. Pourquoi, Diable, est-ce si compliqué... Dylan et Maia, par exemple, tout semble si simple, si naturel. Mais oui, bien sûr ! Dylan et Maia !

À corps perduOù les histoires vivent. Découvrez maintenant