Chapitre 40 : Tout est chaos

10 2 0
                                    

La soirée était étrange. Comme dans un film en noir et blanc, les couleurs avaient disparu pour Ethan. Il ne savait plus où il se trouvait, ni qui il était. Le chaos s'était emparé de son crâne cassé en millier d'éclats polis.

Il était seul au fond de son cerveau, Clair avait disparu de son champ de vision, en même temps que sa chambre, son lit, sa table de chevet, et la fenêtre au bord de laquelle fumait son compagnon.

Il n'avait pourtant fermé les yeux qu'une petite poignée de seconde. Rien qu'un peu, un tout petit peu.

Lorsqu'il les rouvrit, il était dans un long couloir blanc et gris. Un vieux, très vieux fauteuil roulant trônait fièrement en plein milieu du tunnel au plafond si haut qu'on ne pouvait le distinguer clairement. Des sortent de sangles de cuir avaient été installées sur les accoudoirs, pour les mains, et sur le dossier, pour la taille.

Malaisant, même pour le docteur Leroy.

Il était dans le plus ancien pavillon de Sainte Marie. Mais il était fermé depuis des années, même pas encore rénové malgré les financements de l'Etat. Que se passait-il ?

Les murs étaient décrépis et partiellement fissurés. A gauche, des fenêtres hautes et crasseuses filtraient la lumière du soleil. A droite, des portes de fer dotées d'une fenêtre avec des barreaux. Comme en prison.

Des gémissements inhumains en sortaient. Les gémissements des patients à jamais enfermés dans l'hôpital. Ethan tremblait, sentait la sueur coulait le long de ses tempes. C'était désagréable Ce n'était pas normal, quelque chose de mystique était en train de se dérouler.

Mais quoi, impossible de le savoir.

— Clair ? Tu es là ?

Le silence le plus épais possible lui répondait par la négative. Ethan pouvait entendre les battements agités de son propre cœur. Il commençait sérieusement à paniquer. Car il ne contrôlait rien. Absolument rien.

Le couloir semblait ne pas avoir de fin, c'était surréaliste. Le médecin avança de quelques pas, pendant que les cris désespérés des patients résonnaient dans ses oreilles. Il n'aimait pas ça. Pas du tout.

Il jeta un coup d'œil entre les barreaux de la première porte à sa droite. Il ne voyait rien, et ce n'était pas la faute de sa vision défectueuse : la pièce était plongée dans les ténèbres les plus profondes qu'il ait jamais vu. Plus profonde encore que la cave dans laquelle sa nounou l'enfermait quand il faisait des bêtises quand il était plus petit. Comme Alix Deschamps.

Une sorte de message avait été inscrit au couteau sur la porte, mais il était parfaitement impossible à lire. Plus Ethan se concentrait, moins il arrivait à saisir ce qui était gravé sur le fer. Ça ne tenait pas debout. Ça ne faisait aucun sens dans sa tête. Peut-être que cette dernière lui jouait des tours ?

Et que dire de l'ambiance du vieux pavillon ? Il n'y était allé qu'une seule fois, ce qui lui avait laissé une impression de vétusté, mais pas à ce point. Que se passait-il ?

Une sorte d'onde de choc traversait régulièrement Ethan, faisant vibrer tout son corps à l'infini. Elle n'était pas synchronisée avec son cœur. Non.

Elle était synchronisée avec celui de l'hôpital.

L'homme aux cheveux roux ne comprenait pas ce qui était en train de se dérouler, alors il avança avec lenteur dans le couloir, s'arrêtant à chaque porte pour voir s'il y avait quelque chose à l'intérieur. Quelque chose qui lui permettrait de comprendre sa situation.

Le couloir avait une fin. Une grande porte en bois sculptée se trouvait au fond. La pulsation qui frappait Ethan venait de derrière cette porte, il en était persuadé. Alors il continuait d'avancer, sans rien dire, sans rien tenter de plus qu'un coup d'œil entre les barreaux des fenêtres.

Mais bien sûr il n'y avait rien.

Les vibrations devenaient plus intenses à chaque pas qui le rapprochait du bout du tunnel. Allez, plus qu'à dépasser une porte, et Ethan allait enfin arriver au fond du couloir.

Il n'y avait rien derrière les barreaux de la dernière cellule, mais il s'en était douté.

Il était enfin arrivé devant la porte.

Il mit la main droite sur la poignée ronde, et la fit tourner avec beaucoup de minutie et de précision.

Un flash blanc éclata soudainement devant ses yeux.

Ethan jaillit brusquement de son lit.

Un cauchemar. Mais si réel.

Clair était à côté de lui.

— Ça va Ethan ? Tu trembles...

L'intéressé était en nage.

— Oui... Oui ça va. Ça va. Juste un cauchemar. Horrible.

Son compagnon le prit dans ses bras, et lui caressa doucement le visage, déposant au passage un petit baiser sur sa joue valide. Le rêve venait enfin de se terminer.

Clair s'installa au-dessus du médecin, le chevauchant, et se coucha sur lui.

— Pour te protéger des vilains monstres qui pourraient tomber du plafond. Ne t'en fait pas, il n'y a rien sous le lit.

Il devait avoir raison. Mais Ethan avait la sensation de toujours percevoir la pulsation.

Heureusement qu'il ne travaillait pas le lendemain.


Sac de PapierOù les histoires vivent. Découvrez maintenant