— Inspecteur Jimenez, nous avons reçu un appel d'une dame. Elle a retrouvé le corps d'une femme coiffée d'un sac de papier kraft !
Gabriel manqua de lâcher sa tasse de café.
— Encore ce fils de pute... Où ça exactement ?
— Dans le sud de la ville, dans une benne à ordures de la rue Marquèz. On va envoyer une équipe médico-légale d'ici peu.
— Bien... Alicia ! On décolle immédiatement !
Gabriel était à la fois furieux et dépité. Il espérait secrètement que le tueur se lasse, mais au fond de lui il savait que ce ne serait jamais le cas. Ce genre d'individu ne pourrait s'arrêter qu'à sa mort. Ou, plus probable, qu'à son incarcération.
Gabriel et Alicia Kidmann, la jeune qu'il était supposé former, prirent un véhicule, mirent le gyrophare à fond et traversèrent la ville du nord -là où se situait le commissariat- vers le sud. La moitié du trajet se fit dans le silence le plus compet, avant que la jeune femme ne prenne la parole, afin de briser la glace.
C'était à peine sa cinquième journée.
— C'est encore lui inspecteur ?
— Oui, c'est certain. Je n'ai pas de mots pour décrire ce que je ressens... Et il va encore falloir que je remplisse des tas de papiers... La journée ne pouvait pas mieux commencer. Je crois que c'est votre première intervention sur une scène de crime ?
— Oui, en effet. Je vous avoue être un peu angoissée, ça ne me rassure pas vraiment...
— Je comprends, d'autant plus que cette affaire est un peu spéciale. Nous travaillons dessus depuis six mois, mais rien ne semble avancer. Pire, le tueur au sac de papier semble de plus en plus raffiner son modus operandi. Il va sans doute nous falloir une paire de nouveaux corps pour espérer le choper et le foutre en prison... Si on ne l'abat pas avant comme le chien qu'il est.
Alicia fit une petite moue de désapprobation. Gabriel prit cette réaction très sainement, contrairement à n'importe lequel de ses collègues. Il était trop épuisé de ses nuits blanches pour se mettre en colère contre elle. Ce n'était de toute façon pas dans ses habitudes, il était trop calme pour ça.
— Pardon, je me suis emporté... Je devrais un peu plus soigner mon langage.
— Oh ne vous en faites pas, je comprends... Ce type pousse tout le monde à bout, c'est normal. Le maire ne devait pas instaurer un couvre-feu d'ailleurs ?
— Normalement oui, mais tout prend tellement de temps... Combien de morts il faudra pour qu'ils réagissent là-haut ? Dix, douze de plus ? Peut-être davantage. Si vous voulez mon avis, c'est du grand n'importe quoi.
La voiture de Gabriel Jimenez était enfin arrivée sur les lieux du crime. Ou, pour être plus exact, sur les lieux où l'assassin avait « dissimulé » son corps. Il se foutait littéralement de la gueule du monde.
Une dame d'un certain âge, peut-être la cinquantaine, était en état de choc sur le trottoir. Deux policiers l'encadraient et essayaient de lui poser des questions, mais elle ne semblait pas avoir la force de répondre.
Une benne à ordure assez grande était ouverte largement. Gabriel se pencha doucement dessus, et constata avec horreur la vérité.
Le cadavre d'une jeune femme avait été déposée délicatement à l'intérieur du contenant. Sur sa tête siégeait triomphalement un sac de papier kraft, avec des trous pour les yeux. Ces derniers étaient ouverts en grand, une expression de terreur figée sur leur surface.
— Et de treize... Bordel fait chier !
L'un des agents s'approcha de Gabriel et lui fit son rapport.
— Cette gonzesse est femme de ménage, elle vidait les ordures du bâtiment en face quand elle est tombée sur le corps. A quelques heures près c'étaient les éboueurs qui le trouvaient.
— Je vois... Bouclez la zone, l'équipe médico-légale ne devrait pas tarder.
L'inspecteur s'éloigna d'une dizaine de mètres de la scène du crime et sortit un paquet de cigarettes de poches de son pantalon. Il se saisit du briquet planqué dans l'autre poche, et se grilla une clope, histoire de décompresser.
Il avait commencé à fumer il y a quatre mois, quand lui et son équipe avaient fini par comprendre qu'il s'agissait d'un tueur en série. Au début, c'était surtout pour faire comme ses collègues fumeurs, pour se donner un minimum de contenance. Puis avec le temps, la cigarette était devenue sa meilleure amie quand il apprenait la découverte d'un nouveau corps.
Journée de merde.
La sirène caractéristique du véhicule employé par l'équipe de scientifiques de la police se fit entendre. En attendant qu'il soit complétement à l'arrêt, les collègues de Jimenez avaient déjà déposé les fameuses banderoles jaunes, afin d'empêcher les civils de se rapprocher de la scène de crime.
Alicia prenait des notes dans son calepin, celui qu'elle se trimballait depuis lundi. Gabriel trouvait cela insupportable, mais ne se serait jamais permis de le lui dire, il était tout de même un minimum courtois.
— Allez, encore un cadavre... Quand est-ce que ce cauchemar va s'arrêter...
« Pas avant longtemps » songea l'inspecteur Jimenez. Pas avant très longtemps.
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Sac de Papier
Mystère / ThrillerLes habitants de Sainte Haelen n'osent plus sortir de chez eux. La raison ? Le mystérieux tueur au sac de papier qui sème la terreur depuis six mois. Une seule solution pour que la police puisse l'attraper : Ethan Leroy, psychiatre de renom, habile...