Clair était on ne pouvait plus gêné. Il s'était fait entraîner dans une histoire pas possible : Marilyn l'avait convié à un rendez-vous « entre amis » dans un café de sa connaissance.
Super.
C'était un petit établissement à thème, victorien en l'occurrence. La seule serveuse du café portait une tenue de domestique d'époque, particulièrement élégante, qui lui allait comme un gant. Le patron, lui, portait un petit gilet caractéristique, et avait même une petite montre à gousset dorée, dont la chaine dépassait de la poche dans laquelle elle était glissée. Le duo semblait agir en parfaite synergie, cela devait faire quelques temps qu'ils travaillaient ensemble.
L'endroit était décoré avec goût, Clair devait bien l'admettre. Le cadre était très beau, et fourmillait de nombreux détails qui trahissaient un certain investissement dans l'ambiance du lieu. Le patron avait certainement payé cher l'aménagement de son café.
Ce qui en revanche était de mauvais, mais vraiment de très mauvais goût, c'était le jaune criard de la veste de Marilyn. Le jeune homme ne savait ni comment ni pourquoi elle s'était retrouvée avec une horreur pareille, mais il ne lui en dirait rien, bien entendu. Trop timide et civilisé pour ça.
Surtout trop timide. Comme d'habitude.
La carte des boissons était accrochée un peu partout aux murs de l'établissement, bien encadrée à chaque fois, au-dessus des tables. Clair trouvait cela plutôt esthétique, sans pour autant le souligner verbalement. Il avait tout simplement trop peur de prendre la parole, surtout en premier.
Il réfléchit un instant au sujet de la boisson qu'il allait commander. Il hésitait entre le chocolat viennois et le thé vert à la menthe, les deux le tentaient vraiment. Il opta finalement pour le chocolat, le thé allait être pour la prochaine fois.
Si jamais il y avait une prochain fois. Et honnêtement, il ne savait pas s'il le voulait ou non, il changeait d'avis toutes les trente secondes. Il en saurait plus à la fin de ce petit rendez-vous.
La serveuse arriva à leur table, un grand sourire sur son visage doux et agréable. Le jeune homme la trouvait vraiment belle, et surtout, surtout, élégante. Elle serait sans aucun doute son type s'il était hétéro.
— Bonjour ! Vous avez fait votre choix ? Un capuccino pour toi Marilyn ?
L'intéressée devait vraiment venir souvent pour qu'on se souvienne de ce qu'elle prenait d'ordinaire. D'un autre côté, le café n'était pas bondé non plus, alors les gérants devaient bien connaitre les clients, même ceux qui ne venaient que rarement.
Mais le fait que la serveuse tutoyait Marilyn montrait sans aucun doute que cette dernière venait au moins une fois par semaine.
— C'est ça ! Et toi Clair, tu prendras quoi ?
La serveuse haussa un sourcil à l'entente du prénom du garçon aux cheveux rouges. Elle ne fit rien d'autre de déplacé, ce qui arrangea l'intéressé, même si cela ne le dérangeait pas plus que cela. Il avait l'habitude, ça avait été pire quand il était encore à l'école. Là il avait vraiment souffert. « T'es qu'une fille ! », « ton prénom est MOCHE », « t'es pédé, t'es pédé ! ».
Des souvenirs qu'il préférait enfermer au fin fond de son subconscient. Il savait parfaitement que son père ne voulait que des filles, il s'était vengé comme il avait pu. Il ne s'était pas arrêté à là.
Clair décida subitement d'interrompre ses pensées, la dame attendait.
— Pardon... Je vais prendre un chocolat viennois s'il-vous-plait.
— Ça marche, c'est noté ! Un capuccino et un chocolat viennois !
Et sur ce, la jeune femme tourna les talons, et marcha jusqu'au bar, où elle aida le patron à préparer les boissons. Pendant qu'il s'occupait du café, elle fit mousser le lait et entama la préparation du chocolat.
Clair était particulièrement mal à l'aise, incapable de faire le premier pas. Alors il baissa machinalement les yeux.
— Ça va ? demanda Marilyn d'un air étonné.
— Je... oui, oui ça va... c'est que c'est un peu compliqué pour moi en ce moment. Oh, mais je ne veux pas t'embêter avec ça.
— Tu ne m'embête pas du tout !
Eh merde. Il ne voulait pas poursuivre la conversation plus loin. Dans quel guêpier s'était-il encore fourré au juste ?
— Au contraire, je serais ravie de te connaître un peu mieux ! Tu as dit que ça faisait sept ans que tu fais du pole dance, ça te fait quel âge ? Ah mais tu n'es pas obligé de répondre si tu es gêné.
Trop tard pour ça ma petite demoiselle. L'intéressé répondit calmement, sans mâcher ses mots, contrairement à ce qu'il faisait d'ordinaire.
— J'ai eu vingt-quatre ans jeudi dernier.
— Jeudi dernier... hmmm... Ah, on était le sept je crois !
— Le huit. Pardon...
La jeune femme semblait réprimer un rire, peut-être nerveux, ou peut-être pas, Clair ne savait pas trop
— Ah, je me suis trompée on dirait, désolée !
La discussion était partie pour être longue. Très longue.
Le jeune homme n'avait qu'une seule envie : retourner chez lui pour dormir. Pour autant, il commençait un peu à apprécier la jeune femme pour son franc parler. Il allait tout de même demander conseil à Ethan.
VOUS LISEZ
Sac de Papier
Mistério / SuspenseLes habitants de Sainte Haelen n'osent plus sortir de chez eux. La raison ? Le mystérieux tueur au sac de papier qui sème la terreur depuis six mois. Une seule solution pour que la police puisse l'attraper : Ethan Leroy, psychiatre de renom, habile...