Ethan raccrocha brutalement, et bu son café d'une traite, manquant de s'étouffer au passage. Cela lui rappela immédiatement Natalia, qui pouvait fumer ses cigarettes en seulement deux taffes lorsqu'elle était en colère. Ce que lui avait dit l'inspecteur Jimenez avait fait plusieurs fois le tour de son cerveau, et le renversait presque littéralement. Il était furieux et désorienté comme il l'avait rarement été.
Il espérait que ce fichu policier ne l'avait pas mal pris, ni qu'il avait compris quelque chose qu'il ne devrait pas comprendre. Bah, dans tous les cas le médecin était bien plus malin que lui, il trouverait toujours le moyen d'échapper à son sort, c'était une certitude. Après tout, il avait réussi à se cacher pendant tout ce temps, et avait même été contacté par l'inspecteur pour l'aider à trouver l'assassin qui terrorisait la région depuis tout ce temps.
Quelle ironie du sort ! C'en était drôle à se tordre les boyaux.
Mais quoi qu'il en soit, aussi drôle que pouvait être la situation, il ne comprenait pas pourquoi un quatorzième corps venait d'être découvert. C'était tout simplement impossible. Impossible.
Il n'avait qu'une envie : voir de ses yeux le rapport concernant cette mort. Ainsi, il pourrait peut-être comprendre ce qu'il s'était passé. Peut-être que cela allait lui être utile pour plus tard.
Car Ethan n'était pas celui qui avait tué cette personne. Car c'était lui, le vrai tueur au sac de papier.
Mais alors, qui était le responsable de ce nouveau cadavre ? Un copycat peut-être ? Ça ne pouvait être que ça.
Un copycat... Pas de bol, et en même temps assez prévisible, c'est que le vrai coupable était original tout de même. Il avait eu l'idée du sac de papier kraft au bout de sa troisième victime. Le plus amusant était que les deux premiers corps n'avaient jamais été rattachés au tueur en série qui sévissait dans la région. Un coup de génie sans nul doute !
Ethan s'enfonça profondément dans son fauteuil, et lança un nouveau café. Une fois ce dernier prêt, le médecin prit tout le temps du monde pour le boire, savourant son goût assez prononcé pour une boisson en dosettes. Il réfléchissait à toute vitesse, cherchant un moyen de contourner la difficulté qui s'imposait à lui. Toute cette situation allait être assez tendue pendant les prochains jours, il allait falloir mener une réflexion intelligente.
Il aurait tout aussi bien pu arrêter sa série de meurtres et tout mettre sur le dos de l'imitateur, mais le pari était plus que risqué. En tant que psychiatre de renom, il ne devait pas commettre l'erreur de trop. Il devait trouver le coupable de ce « quatorzième » meurtre du tueur au sac de papier, et lui faire avouer qu'il n'était qu'un comédien spécialisé dans l'imitation de meurtres.
Car s'il expliquait à ces messieurs de la police que cette personne était l'autrice des quatorze meurtres, ils pourraient tout aussi bien le croire que se méfier du praticien.
Il était en effet évident que les méthodes des deux tueurs différaient sur quelques points. Même un amateur pourrait le prouver sans trop de difficulté. C'était absolument certain, Ethan n'avait pas besoin de lire le rapport concernant le nouveau cadavre pour s'en rendre compte.
Car le copycat n'avait pas le produit magique du psychiatre. Il n'avait pas le psychotrope que le véritable assassin avait développé dans le laboratoire privé sous sa maison.
Grâce à ce petit cocktail expérimental, Ethan pouvait soumettre ses victimes à leurs pires cauchemars. Ils voyaient ce que leur agresseur voulait qu'ils voient, leurs pires peurs condensées en deux ou trois piqûres. Et pour terminer de les terroriser, il portait ce sac de papier kraft sur la tête, ce qui était devenu sa marque de fabrique depuis les six derniers mois. Ajoutons à cela un petit micro permettant de modifier sa voix pour la rendre encore plus effrayante, et nous obtenions alors un résultat qui offrait des sensations mortelles à ceux qui les vivaient.
Il avait cependant échoué quatre fois à tuer par crise cardiaque ses malheureuses victimes. Pour les deux premières de sa longue série, le produit n'avait pas été bien dosé, et le psychotrope les avait littéralement tués d'overdose. Ce qui expliquait pourquoi on ne les avait pas encore rattachés au dossier du tueur en série.
Pour les deux autres, ce n'était qu'un pur manque de chance, Ethan devait bien l'admettre. Mais ce n'était pas non plus de sa faute si Clair l'avait appelé au mauvais moment. Résultat des courses : deux cadavres qui n'avaient pas pu servir les expérimentations du psychiatre.
Car ce n'étaient pas des meurtres gratuits. Le médecin avait besoin de les tuer, au nom de la science et de la curiosité scientifique. Quoiqu'il n'aurait pas dit non à tuer pour le plaisir, il n'aurait jamais hésité à se faire du bien de cette manière.
Il regarda furtivement sa montre : huit heures et vingt-six minutes. Il avait passé beaucoup de temps à se triturer le cerveau pour rien.
Il était temps de reprendre les dossiers de ses patients.
Il devait bien travailler pour gagner sa vie. Après tout, il était comme tout le monde.
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Sac de Papier
Mystery / ThrillerLes habitants de Sainte Haelen n'osent plus sortir de chez eux. La raison ? Le mystérieux tueur au sac de papier qui sème la terreur depuis six mois. Une seule solution pour que la police puisse l'attraper : Ethan Leroy, psychiatre de renom, habile...