Chapitrea 104 : M'écouter

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Carole était épuisée mentalement par la discussion qu'elle avait avec sa « nouvelle amie ». Cette dernière avait le même prénom qu'elle, un visage similaire au sien, et même une orientation sexuelle identique à la sienne. Les deux étaient bisexuelles, avec une préférence pour les femmes, si possible avec une forte poitrine. Youpi joie...

Cela étant dit, les similitudes s'arrêtaient là. Carole avait définitivement eu un moment de recul en apprenant le travail de son interlocutrice. Cette dernière était informatrice, et travaillait pour ceux qui avaient les moyens de se payer ses services. Elle ne s'en était pas cachée, et lui avait même proposé lesdits services, pour peu que sa camarade en ait besoin. La première information était gratuite, il fallait raquer pour les suivantes.

La femme aux cheveux rouges s'était alors souvenue d'une certaine Gueule-de-fouine. On lui en avait parlé quand elle était encore dans le trafic de shit de Sainte Haelen, un personnage mystérieux, mais manifestement bien réel.

Gueule-de-fouine était une femme étrange, qui proposait un service d'information assez précis et efficace, le genre de personne dont les forces de l'ordre et la pègre ne pouvaient pas se passer. On lui avait dit qu'elle la reconnaîtrait en la voyant, le style vestimentaire de cette personne étant d'un mauvais goût caractéristique.

C'était bien elle, il n'y avait aucun doute possible. Carole Lewis était la fameuse informatrice, et Carole Damien était rentrée en contact avec elle de la pire des manières. Pour autant, la femme aux cheveux rouges, si elle avait bel et bien eu peur, n'en avait pas été paralysée de terreur. Après tout, madame Lewis -ou mademoiselle, sa récente interlocutrice ne savait pas trop- avait eu l'air amusée. Ce ne devait pas être la première fois que ce genre de chose lui arrivait.

Elle avait laissé à la jeune femme un air similaire à celui d'un personnage de cartoon. Elle ne faisait définitivement pas partie du même monde qu'elle. Le plus suspect était qu'elle ne semblait pas avoir d'ennemi, sinon l'informatrice n'aurait pas pu discuter avec la pickpocket. Comment faisait-elle pour survivre dans cette ville de fou ? Que voilà une bonne question.

Alors qu'elle était plongée dans ses pensées, Carole entendit le bruit caractéristique de l'interphone. Quelqu'un voulait la voir, et la jeune femme se doutait bien de qui il pouvait s'agir.

Elle se leva à la hâte en manquant de trébucher, et appuya sur le bouton pour que son visiteur puisse discuter avec elle.

— Carole, c'est Clair. Je peux te voir ?

— Je t'ouvre tout de suite !

Aussitôt dit, aussitôt fait. La femme aux cheveux rouges déverrouilla la porte du hall d'entrée, et attendit que son frère frappe chez elle. Le jeune homme arriva assez vite, et toqua. Carole, qui attendait devant l'entrée, lui ouvrit.

Il avait une mine affreuse.

— Entre, je t'en prie. Tu veux boire quelque chose ?

— Oh, je ne veux pas te déranger plus que ça, vraiment.

— D'acc, fais comme tu le sens. N'hésite pas à me demander si tu changes d'avis. Ça va ? Tu as une petite mine.

En plein dans le mille, Clair avait un peu détourné le visage, comme il le faisait à chaque fois que sa sœur touchait un point sensible.

— Je peux m'asseoir ? J'en aurai pour quelques temps à te raconter ce qu'il s'est passé. En gros je me suis disputé avec Ethan. C'est la première fois.

Aie. Voilà qui tombait mal. Et en même temps ce n'était guère étonnant. Clair avait un air plus affirmé depuis que sa sœur l'avait revu il y a peu, après plus d'un an de silence de part et d'autre. Les jumeaux s'étaient enfin retrouvés, et il semblait qu'ils étaient plus forts que jamais ensemble.

— Je vois, je vois... Tu peux te mettre dans le canapé, je te sors des cookies.

— Merci Carole. Merci.

La jeune femme ouvrit le placard situé dans la cuisine à l'américaine, et sortit les fameux biscuits. Elle les servit dans un bol large, et les installa sur la table basse à côté du canapé.

— Je... Ethan... Ah, comment dire... Il a une « amie » mère maquerelle, elle est venue à la maison tout à l'heure. Elle avait envie de lui casser la figure, ça se voyait à sa tête.

— Ethan a quoi ?! Une amie mère maquerelle ? Tu n'es pas sérieux là ?

— Si, totalement. Moi aussi ça m'a choqué, je ne pensais pas ça de lui. C'est vrai qu'il n'a pas que des qualités, je m'en rends bien compte, mais là... là c'est trop. Je peux rester ici encore un peu ? J'ai peur de le confronter, je suis parti en étant assez en colère, c'est la première fois depuis qu'on s'est mis en ensemble.

Carole s'installa immédiatement sur les genoux de son frère, et laissa ce dernier s'affaler sur son épaule droite.

— On va voir ce qu'on peut faire pour Ethan, d'accord ? On appellera la police si ça devient trop dangereux.

Clair s'enfonça encore plus dans l'épaule de sa jumelle en guise de réponse. Il se mit à y hurler, comme il avait l'habitude de le faire du temps où il vivait chez mamie J.


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