QUINZIÈME JOUR ❥ ❥ ❥ give me a long kiss goodnight.

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Je sursaute en entendant quelqu'un toquer à ma porte et souris en voyant mon frère passer sa tête dans l'entrebâillement de celle-ci, le téléphone de la maison à la main.
— Quelqu'un pour toi au téléphone, dit-il en me tendant le fixe.

Je m'empare de l'appareil et le colle à mon oreille alors que Tom s'occupe de sortir de ma chambre pour me laisser tranquille. Je repose le livre de révision que j'étais en train d'éplucher.

— Allô?
— Coucou ma Frankie.
— Charlie! Je suis trop contente que t'appelles, tu me manques!
— Tu me manques aussi mon petit cœur, comment tu vas?
— Tout va bien, tu sais, il se passe pas grand-chose, c'est mort à en faire jouir un nécrophile ici... Toi raconte, comment c'est la France?
— Doux Jésus, c'est la débandade, Franny.
— Raconte moi.
— Alors... Ma mère a une sœur, vois-tu, et cette sœur, c'est la plus grosse nymphomane de la famille, genre toute catégorie, tu peux pas être plus grosse chatte en chaleur qu'elle, je te jure, elle change de mec comme de string, elle a le feu au cul comme c'est pas possible.
— Surveille ton langage, je dis en riant.
— Pardon... mais c'est vrai, hein! Elle aime ça, ça se voit, je suis sûre que c'est le genre de morceau qui plairait à ton bouclé, là...

Je grimace un peu à cette pensée. Je sais pas si l'idée de l'imaginer avec quelqu'un d'autre me dérange ou me dégoûte carrément.

— Bref, son nouveau mec qui s'appelle Olivier, c'est un nom de français ça, Olivier... qu'elle a ramené au château... Bordel Frankie, en parlant du château, c'est un putain de palace, tout est bien décoré, et il est entouré d'une grande forêt, j'ai l'impression d'être une princesse, c'est juste trop beau. Mais le réseau craint et j'capte internet une fois sur deux... C'est pour ça que je t'appelle que aujourd'hui, d'ailleurs, ça capte bien. Je parlais de quoi déjà?
— Du m...
— Ah oui, me coupe-t-elle brusquement. Elle est excitée comme une puce, je l'entends au ton de sa voix. En général, elle est toujours assez passive et calme. J'te parlais de ma tante qui a ramené son keum à la petite réunion de famille, là... Hé bien ce très charmant Olivier a un fils. Il s'appelle Nicolas. Mon Dieu, Franny... C'est une pure merveille, une créature divine, un cadeau de la nature, il est parfaitement parfait. Il est beau, il est intelligent, il fait rire les enfants, il est gentil avec les vieux, il porte ses pantalons en bas des fesses et il a toujours un bonnet rouge American Apparel. C'est un gros français de base hein... Dans ses faits et gestes, dans sa manière de rire et de boire de la bière... Mais il parle bien l'anglais. On a brièvement discuté, parce que je suis trop mal à l'aise en sa présence, cet enfoiré m'intimide, mais il adore l'anglais et il un accent trop adorable! Déblatère-t-elle a une allure fulgurante. J'ai envie de lui pincer les joues quand il me parle et quand il grimace parce qu'il sait qu'il fait des fautes de temps ou quand il prononce pas bien les mots... je te jure, il me fait complètement capoter. Il est trop adorable, j'ai envie de l'emporter avec moi.
— Et qu'est-ce qui t'en empêche?

Silence. Elle bredouille quelques mots, cherchant quoi répliquer.

— On est cousins, finit-elle par dire. C'est crade. Enfin, je veux dire, ça craint quoi... J'peux pas.
— Mais vous êtes pas cousins cousins... C'est pas le fils de ta tante, vous avez aucun lien de sang à proprement parlé. Si ta tante est chaude comme une baraque à frites et qu'elle est volage profite de l'avoir sous la main, ton beau Nicolas, avant qu'il ne se volatilise parce que son père se sera fait largué.
— Non mais je te parle de label... Tout le monde nous qualifie de cousins, tu vois? Quand on doit s'asseoir à table pour manger, ma mère me dit « Vas avec ton cousin » et quand ma tante le cherche dans le château, elle me dit « Hey Charlie, t'as pas vu ton cousin et mon homme? » tu vois le genre? Ça marque mal si me rapproche de lui... Puis même, j'en suis incapable. D'habitude je fais fuir les gars parce qu'ils me prennent pour un morceau de viande, mais lui il me regarde pas pareil. C'est moi qui le fuis parce qu'il m'intimide trop, parce qu'il est trop parfait...
— J'ai le regret de vous annoncer, ma très chère demoiselle Tanner, que vous êtes en train de tomber amoureuse de votre soit disant cousin qui en fait n'est pas votre cousin du tout.
— Mais Frankie...
— Pas tout le monde n'est obligé de savoir que vous vous fréquentez, au pire! Vous pouvez faire ça cachés...
— J'sais pas si j'oserais...
— Qu'est-ce que la France t'a fait Charles? C'est l'air que tu respires qui fait de toi un mollusque tout flasque et dégonflé tel un poulpe dans la mer?
— Hé saloperie, tu m'appelles pas Charles, ou j'rentre et j'te marave! dit-elle en riant. Pourquoi les gens qui sont beaux et qui sont toujours hyper coolos et surtout beaux et... intelligents et beaux et gentils et beaux habitent toujours à des kilomètres de chez toi où n'existent que dans les films?
— C'est une question existentielle intéressante, je commence par dire avant d'être interrompue par les vibrations de mon téléphone.

Harry.

« J'arrive pas à dormir, passe à la maison. Maintenant. »


— J'y répondrais bien sous forme de dissertation en argumentant mes idées en de grands paragraphes distincts, si je n'avais pas à aller chez Harold là-maintenant-tout de suite.
— Toujours là pour nous empoisonner la vie, ce mec. Comment ça se passe avec lui, d'ailleurs?
— Honnêtement? J'le comprends pas. On passe une après midi ensemble puis il m'ignore pendant des jours après ça, puis il est froid avec moi et... ouais, je sais jamais dans quel état d'esprit je vais le trouver, donc c'est frustrant. Je comprends pas ce qu'il fait, ce qu'il veut et c'est vraiment le bordel et je commence à croire que ce que tu m'as dis l'autre fois, sur le fait que j'apprendrais à le cerner avec le temps, c'était n'importe quoi parce qu'il est indéchiffrable, il est trop lunatique et j'abandonne.
— Te décourage pas Frankie, tu finiras bien par comprendre pourquoi il est comme ça avec toi. Au pire si t'as vraiment du mal, demande à ses trois... ou peut-être quatre... je sais pas combien ils sont. A ses autres potes là, ils sauront probablement éclairer ta lanterne.
— Ouais, probablement... bon babes, je dois t'abandonner.
— Mouh, je sais, chouine-t-elle.
— Je veux que tu me rappelles vite pour savoir comment les choses se passent avec Nicolas le beau français. Fonce, d'accord? Te prends pas la tête, il est pas de ta famille. Donc c'est pas incestueux, ni rien, t'as le droit. Et si tu peux te connecter sur internet, envoie moi une photo de lui par mail, d'accord?
— Oui mon capitaine.
— Je t'aime.
— Je t'aime aussi mon petit chat, prends soin de toi. Si le bouclé te martyrise, j'en fais mon affaire quand je rentre.
— Rappelle moi vite.
— Promis. Je t'aime, chante-t-elle avant de raccrocher.

Je me lève, enfile mes chaussures et me dirige vers la chambre de mon frère dans laquelle je rentre. Il lève les yeux de son ordinateur pour m'interroger du regard.

— Tom, je vais avoir besoin de passer par ta fenêtre.



***

Mes désirs sont désordreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant