VINGT-DEUXIÈME JOUR ❥ ❥ ❥ let others know where they stand.

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Je dévale rapidement les escaliers après être sortie de ma chambre et fais irruption dans la cuisine, un sourire pendu aux lèvres. Je pique les clés de la boîte aux lettres avant de claquer un baiser sur la joue de ma mère qui lève brusquement les yeux de son bouquin pour me suivre du regard alors que je m'amuse à faire des pas chassés jusqu'à l'entrée de la maison.
— Je vais chercher Charlie avec Andreas à l'aéroport!
— Fais attention à t..., tente de me crier ma mère avant que je ne claque la porte pour me diriger jusqu'à la boîte aux lettres.

Je m'empresse d'ouvrir cette dernière et fouille à travers les multiples factures et publicités de manière à trouver la lettre que j'étais sensée recevoir aujourd'hui, dans laquelle se trouvent les résultats de mon examen de conduite. Je couine en mettant finalement la main dessus et déchire à la hâte l'enveloppe pour déplier le papier qui reposait à l'intérieur. J'inspire un bon coup avant de lire le contenu de la feuille pour me mettre à hurler en sautant à pied joints, alertant probablement tout le voisinage. Des chiens se mettent à aboyer et je suis sûre que la vieille d'en face est à sa fenêtre.

Un coup de klaxon me sort soudainement de ma présente crise d'hystérie. Je lève les yeux pour apercevoir la voiture de mon meilleur ami se garer devant chez moi. Je fais la danse de la victoire jusqu'à la portière et colle le papier contre sa vitre pour lui montrer la raison de mon excitation. Je me glisse finalement dans la voiture après l'avoir contournée.

— Je suis titulaire du permis B!
— Je suis trop fier de toi, c'est absolument génial! Félicitation, dit-il après avoir frappé dans ma main pour reposer ses mains sur son volant. Tout le monde est attaché?

Je fourre le papier dans mon sac et boucle ma ceinture, souriant à en avoir mal aux joues.

— Yup!
— Alors accroche-toi bien Jeannot, parce qu'on va y aller à fond la caisse, déclare-t-il avant de démarrer pour quitter notre lotissement, direction l'aéroport.


***


Nous nous tenons devant les portes desquelles Charlie, sa mère, ainsi que sa petite sœur, devraient surgir. Étant donné qu'il y a pas mal de monde agglutinés devant cette sortie, attendant visiblement tout comme nous des membres de leur famille ou des amis, je suis montée sur le dos d'Andreas pour surplomber la foule et ainsi apercevoir ma meilleure amie sans problème au cas où elle se pointerait.

Lorsqu'une première vague de personnes apparaît, c'est l'agitation. Je lance un regard circulaire à la foule de personnes qui nous dépassent et ne réponds pas aux « Tu la vois? » que Andreas me pose environ toutes les cinq secondes. Tout simplement parce que je ne la trouve pas à travers tout ce beau monde. Je commence à m'inquiéter quand plus personne ne passe les portes et que la foule autour de nous s'estompe.

— T'es sûr que c'était ici qu'il fallait l'attendre?
— En fait, j'en sais rien. Mais j'te garde sur mon dos, Franny et on va jouer à « Où est Charlie? », d'accord?
— Oui Chef. Bâbord toute! Je me mets à rire en embrassant les cheveux d'Andreas alors qu'il vire à droite. Bâbord ça veut dire à gauche, idiot.
— J'avais une chance sur deux, et je..., je le coupe dans sa phrase en posant ma main sur sa bouche et pointe du doigt d'autres portes desquelles sortent un tas de personnes.
— Là bas!

Il ressert ses bras autour de mes genoux avant de se mettre à courir comme un dératé jusqu'aux portes en questions. Je m'accroche fermement à son cou en riant comme une dinde, secouée dans tous les sens par sa course. Une fois à la hauteur de cette nouvelle foule, nous apercevons très justement Charlie, sortir en tenant la main de sa petite sœur, suivie de près par sa mère. Je souris largement en reconnaissant le bonnet rouge de Nicolas fixé sur sa tête. En nous voyant, elle laisse tomber ses bagages et alors que je descends du dos d'Andy, elle se précipite vers nous pour nous enlacer en même temps. Je suis tellement heureuse de la revoir que j'en ai les larmes aux yeux. Andreas se met à pleurer, carrément.

— Mon bébé, tu m'as tellement manqué. Pars plus jamais, couine-t-il en nous serrant plus fort.

Il s'écoule un temps avant qu'elle ne se recule pour nous regarder l'un après l'autre. Elle sourit, les yeux brillants. J'ai l'impression qu'elle est encore plus belle que quand elle est partie. Elle se tourne vers sa mère que nous saluons ainsi que sa petite sœur, qui arrivent à sa hauteur. Nous sortons tous ensemble de l'aéroport pour aller charger un taxi des bagages de la famille Tanner. Une fois fait, sa mère l'autorise à partir avec nous et nous nous dirigeons tous vers la voiture d'Andreas excités comme des puces.

Je suis heureuse de me retrouver avec mes meilleurs amis. Leur présence m'est indispensable et avoir passé mes vacances sans eux m'a énormément déboussolé. Je suis contente que tout soit rentré dans l'ordre, qu'ils soient là de nouveau. Comme à l'allée, je monte à l'avant et Charlie se place à l'arrière. Nous commençons à brièvement discuter de son voyage et à quel point il était pénible, puis du fait que j'ai eu mon permis avant de se mettre à danser et chanter comme des débiles sur les chansons commerciales qui passent à la radio.

Une fois dans la chambre de mon meilleur ami, Charlie assise à la chaise de son bureau, Andy allongé dans son hamac et moi avachie sur son lit en train de manger une pomme, nous commençons à entamer le sujet de nos vacances. Andreas ouvre le bal.

— Quand je suis arrivé, on s'est tous regroupés dans la salle des fêtes. Je mentirais si je vous disais qu'il n'y avait pas de mecs canons. On portait tous nos uniformes, c'était assez étrange comme certains le portait mieux que d'autres. Le directeur de la colonie nous a vite fait expliqué les règles avant de nous présenter comment se dérouleraient nos vacances. C'était assez ennuyeux, m'enfin..., détaille-t-il en haussant les épaules. Après j'ai rejoins mon dortoir. J'étais dans une chambre avec trois autres mecs. Adam, un américain assez taciturne, une vrai tête d'ampoule. Nate, un gars qui savait pas trop ce qu'il foutait là apparemment, c'était un peu le fouteur de trouble de la chambre, mais on s'est beaucoup marrés avec lui. Puis Jolan, un irlandais trop adorable avec qui je me suis très bien entendu. Je crois qu'il était un peu dépressif, mais c'était un gars très intéressant. Il soupire en faisant mine de réfléchir. Mon premier jour de cours, annonce-t-il. Je me suis pas perdu! Alors j'étais content. C'était une heure de littérature et tous nos profs rentraient les uns après les autres pour se présenter, interrompant ce prof de litté absolument trop barbant. C'était drôle, il était tout déstabilisé, le pauvre. Et là, tout d'un coup... Mon prof d'histoire rentre dans la salle et se place juste devant le tableau dans son grand pull bleu marine et son jeans slim trop sexy et ça a été le coup de foudre pour moi, rêvasse-t-il. Il s'est présenté avec son charisme et ses petites boutades exquises... Je buvais ses paroles. Il aurait pu me parler de trucs qui m'intéressent pas, comme la technique qu'à la marmotte pour foutre le chocolat dans le papier Alu, que je l'aurais apprise par cœur. Je crois qu'il a capté que j'avais un peu le béguin pour lui et j'pense même qu'à la fin il en jouait parce qu'il était presque en train de flirter avec moi!
— Mon cul, ouais, fait Charlie en pouffant de rire.
— Toi, tu moules ta gaufre. J'mens pas! Frances, tu m'crois toi? Il me lançait des petites piques et tout. C'était trop évident. Puis le jour de notre départ, on a reçu une espèce de diplôme, avec nos notes et tout, et j'ai eu une trop bonne appréciation en histoire. Alors j'étais trop heureux. C'était vraiment bien comme vacances. J'ai fais un bout du retour avec Nate, parce qu'il habite à Manchester. Et voilà. C'était génial. Je m'attendais pas à ce que ce soit si bien, en fait je pensais que j'allais me retrouver coincé dans une chambre avec des casses couilles d'intellos qui ne pensent qu'à leur bourse d'étude et qui parlent de mathématiques à longueur de temps, mais même Adam, qui était le plus sérieux d'entre nous, était trop drôle! Puis les profs nous mettaient trop à l'aise et étaient patients avec nous, soucieux d'aller à notre rythme et tout, c'était parfait. C'est dommage que ce soit ma dernière année d'école, si j'avais su que ce programme existait avant, je serais allé là-bas pour réviser les examens qu'on a passé l'année dernière! Bref, soupire-t-il après avoir repris son souffle, ayant précédemment parlé d'une traite.

Il passe ses mains dans sa nuque et tourne la tête vers moi en souriant largement. Je crois que je n'ai jamais vu Andreas aussi épanoui qu'à cet instant. Ses grands-parents savent réellement ce qui est bon pour lui. Et je suis heureuse qu'à défaut de ne pas avoir de parents présents et ouverts sur sa sexualité, il soit aimé de ceux qui s'occupent de lui.

— J'ai horreur du train, enchaîne Charlie. Quand on a prit le train sous la Manche pour aller jusqu'en France, j'ai cru que j'allais crever. J'étais angoissée et j'avais qu'une seule envie: rejoindre la terre ferme, même si aller en France m'emballait pas tant que ça. C'est vrai, j'veux dire... aller me perdre dans un château pourri avec toute ma famille pour réviser ça me plaisait pas des masses. Puis j'sentais tellement que ma sœur allait me gaver au possible... Quand on est arrivé, des tas de gens sont venus nous dire bonjour. Des gens que je connaissais pas pour la plupart. Et quand ma tante a débarqué, elle s'est tout de suite jetée sur moi, parce que... je sais pas trop en fait, je crois qu'elle m'a toujours adoré. Là, elle m'a présenté son mec et j'me rappelle putain, il est arrivé, comme ça, avec son bonnet rouge..., dit-elle en touchant le morceau de laine présentement perché sur sa tête. Et il a commencé à parler à son père et bon... comme j'étais un peu rouillée en français, j'ai pas tout compris. Mais je me suis tout de suite sentie intimidée par sa présence. Quand nos regards se sont croisés, j'ai eu l'impression d'être dans un film. Le temps s'est arrêté... Andreas commence à mimer un violon en faisant une moue moqueuse. Charlie se vexe et s'interrompt pour se lever et aller le frapper avant de se mettre à rire. Arrête de te moquer Andreas! Elle s'assoit avec précaution sur le hamac aux cotés de mon meilleur ami avant de poursuivre. Il m'a serré la main. C'était trop bizarre, parce que je m'attendais à ce qu'il me fasse la bise, ou j'sais pas... enfin. Il m'a serré la main en me disant bonjour et puis ma tante lui a dit que j'étais anglaise et alors là... Il a commencé à essayer de me parler en anglais et je me suis mise à rougir et... wow. Ça me fait des papillons dans le ventre rien que d'y repenser. C'était tellement... enfin, vous savez...
— Tu es tombée amoureuse.
— Ouais, soupire-t-elle.
— Et du coup, qu'est-ce qui s'est passé?
— Au début, j'avais beaucoup de mal à rester près de lui. Il s'en est rendu compte et il a cru que je l'évitais parce que j'aimais pas son père et l'idée que ma tante fréquente quelqu'un de nouveau, un truc comme ça. Et... c'était tellement adorable, mon Dieu. On a commencé à trainer ensemble et puis au fur et à mesure, on s'est rapproché. Il m'aidait à réviser comme il pouvait. Il a été attentionné envers moi comme jamais personne ne l'a été. Puis il m'a embrassé contre cet arbre, je vous en ai parlé à tous les deux... Et après, on a commencé à sortir ensemble. Quand on a finalement dû se séparer parce que les vacances étaient finies, il m'a donné son bonnet et il m'a dit qu'il viendrait le récupérer cet été. Donc normalement, il devrait venir après les exams... J'ai tellement hâte de vous le présenter. Je suis sûre que vous allez l'apprécier. Même toi, Andy.
— Ca m'étonnerait, mais bon...
— Arrête d'être de si mauvaise foi, bébinou... Tu sais que tu restes mon préféré..., minaude-t-elle en déposant des baisers papillons sur ses joues. Et toi, Frankie? finit par demander ma meilleure amie. Tu nous as pratiquement rien dit sur ce qui est arrivé avec Harry.

Mon sourire tombe. Je fronce les sourcils en pensant à ce que je pourrais dire, en cherchant par où commencer avant de soupirer en jetant le trognon de ma pomme à la poubelle. Je replie mes jambes contre ma poitrine en passant mes mains sur mon visage, sentant une boule se former dans ma gorge. On ne peut pas dire que mes vacances aient été aussi belles que celles qu'ont passées mes meilleurs amis. Je ne suis pas jalouse d'eux. Je suis vraiment très heureuse qu'ils aient passé un bon moment... mais je me demande juste quand est-ce que la roue va finir par tourner pour moi. Soudainement, je sens des bras m'entourer et je reconnais tout de suite la douceur et le parfum de Charlie. Nous sommes très vite rejoint par Andreas qui caresse mes cheveux. Je les regarde, les larmes aux yeux avant de soupirer en haussant les épaules.

— Je sais même pas pourquoi ça me fait cet effet là. J'me laissais pas faire au début. Mais plus le temps passe et plus ça me touche. Je crois que c'est vraiment la frustration de ne pas le comprendre. Ca me démolit complètement d'être rejetée sans arrêt. Je me mets à soupirer puis à renifler, ravalant mes larmes. C'est pitoyable, mon attitude est vraiment pitoyable. On a passé cette journée ensemble, avant que vous partiez. C'était super, vraiment. On a appris à plus amplement se connaitre et depuis, ça a été une sorte de cauchemar. Harry c'est le genre de gars qui sait pas ce qu'il veut. Un coup il est cool avec moi, un coup il me déteste. Je sais pas ce que je fais de mal. J'ai beau me poser un milliard de questions, retourner les situations dans tout les sens, j'ai jamais aucune réponse. J'essaye de le comprendre, mais il me repousse inlassablement. Ils me dévisagent tout les deux avec une moue désolée sur le visage. Je dois vous plomber le moral, maintenant. Vous avez passé des moments géniaux et moi je casse votre délire avec mes vacances pourries.
— Lâche ce que t'as sur le cœur, Franny. Tu sais très bien qu'on est pas là pour te juger, me rassure Charlie d'une voix douce.
— Mh... On était en de bons termes et il a décidé de tout foutre en l'air. Comme d'habitude. Il m'a fait déplacer pour que je lui donne l'heure de mon téléphone parce qu'il avait un rencard et il voulait pas être en retard. Je suis la seule à trouver ça louche? Il pleuvait des trombes d'eau dehors. Et tout les gars du groupe étaient avec lui ce jour là. Il voulait me rendre jalouse, non?
— C'est évident, j'crois, commente Andreas en haussant les sourcils.
— Continue, m'incite Charlie, les traits de son visage tirés.
— Je lui ai littéralement hurlé dessus, ce soir là. J'ai dis que je me cassais... juste parce que je voulais rentrer chez moi, vous voyez. Mais les gars qui écoutaient à la porte, ont cru que je partais pour de bon, que je mettais fin au contrat. Alors le lendemain, ils sont venus me chercher. Liam, je dis en pointant le châtain du doigt sur un poster accroché au mur de la chambre pour que Charlie puisse mettre un visage sur ce prénom, m'a suivit dans la rue avec Louis, je pointe le mécheux du doigt en esquissant un sourire. Et ils m'ont invité à boire le thé avec les deux autres, Niall et Zayn. Ils m'ont remonté le moral et m'ont demandé de rester malgré le comportement de Harry, soit disant parce que je le changeais et...

Je lève les yeux vers mes meilleurs amis et les surprends en train de s'échanger un regard.

— Et quand je leur ai dit que j'avais pas l'impression de changer le bouclé, ils ont eu la même réaction que vous, ils se sont regardés! Pourquoi est-ce que vous vous regardez tous, putain de merde! C'est quoi cette manie à la fin!
— Pour rien, fait Andreas en détournant le regard.
— C'est drôle parce que c'est très justement ce que Louis s'est empressé de me dire juste après.
— Continue de raconter, Franny, reprend Charlie en lançant un regard noir à Andreas.

Je soupire, laissant de nouveau tomber, tenant à libérer ce qui me pèse sur les épaules.

— Il m'a envoyé un texto dans lequel il me demandait de cuisiner un truc pour le soir même, alors qu'il était à son rendez-vous avec cette fille. Et les garçons se sont proposés pour m'aider...
— Et là, Harry est rentré au moment où tu déconnais comme une petite fifolle avec eux, me coupe Andreas.

Je lève brusquement les yeux vers mon meilleur ami, complètement bluffée.

— Comment tu sais?
— J'ai dis ça au hasard. C'est le genre de truc qui arrive dans les films, répond-il en haussant les épaules.
— Ah..., je fronce les sourcils en le dévisageant, les sourcils légèrement froncés, avant de continuer après un silence. Harry est donc rentré au moment où les garçons et moi, on dansait dans la cuisine...
— Tu dansais dans la cuisine des One Direction, avec les One Direction.
— Andreas, arrête de la couper, putain! s'énerve Charlie
— Mais ça va, calme toi! T'as tes règles ou quoi?
— Et, je tonne plus fort qu'eux, en appuyant sur cette seule syllabe pour les faire taire, ce qui fonctionne, je lui en voulais toujours pour ce qu'il m'avait fait la veille. Au début, je me suis excusée, mais je sais pas trop pourquoi en fait. Je pensais que c'était de coutume, je crois... On était en froid et voilà qu'il me retrouvait en train de faire mumuse avec ses potes... Je me suis sentie mal.

Charlie hausse les épaules en levant les yeux au ciel. Elle n'aime pas Harry, je le sais. Malgré le fait qu'elle soit objective dans tout, le fait que je m'excuse auprès du bouclé semble lui passer totalement au-dessus. Je continue:

— On a mangé tous ensemble. Puis là, il a commencé à parler de son rendez-vous. Hum. J'ai... j'ai pas fait une crise de jalousie, mais... c'était un peu évident que j'avais rien envie d'entendre sur son rencard. Alors j'ai quitté la table tout sauf discrètement et après on s'est un peu accroché dans la cuisine. Parce que j'étais de mauvaise humeur. Et parce qu'il s'est un peu amusé à remuer le couteau dans la plaie. Quand il m'a fait remarquer que j'étais jalouse, j'étais hors de moi alors je lui ai dis que je prenais deux jours de « congé ». Il m'a réellement laissé tranquille pendant deux jours. J'ai passé mon permis. Et là... il m'a appelé au beau milieu de la nuit, parce qu'il était bourré et il fallait que quelqu'un vienne le chercher.

Je reste pensive quelques secondes en me rappelant de cette nuit. Je souffle un coup.

— Quand je lui ai demandé ce qui l'avait poussé à boire, il m'a dit qu'il avait une peine de cœur, qu'il avait bu pour ça. Et en rentrant, il a voulu qu'on s'embrasse, puis... il était triste ensuite, il s'est excusé et il parlait de son comportement envers moi. Qu'il se contrôlait pas, qu'il s'en voulait... c'était vraiment étrange. En fait, c'est surtout l'effet que ça ma fait qui est étrange. Je pourrais pas expliquer. Il m'a appelé le lendemain. Je vous le donne en mille... il avait absolument tout oublié à cause des litres d'alcool qu'il s'était envoyé. J'ai dû tout lui raconter. Tout ce qu'il avait pu dire ou faire. Et il s'est énervé. Je savais qu'il s'énerverait... il m'a dit qu'il voulait pas que je saches ce qu'il avait pu me dire, qu'il aurait jamais dû se tourner vers moi. Et ensuite, il m'a dit qu'il voulait plus me voir pour un moment. Et depuis, j'ai plus de nouvelles.

Je mords dans ma lèvre en reposant ma tête contre l'épaule de Charlie.

— Je comprends que dalle. Tout me tombe dessus. Le seul bon moment que je tire de ces putains de vacances, c'est quand j'ai traîne avec mon frère. Harry me pourrit l'existence. J'ai plus envie de m'attarder sur lui, j'en ai trop marre de m'empoisonner la vie, de perdre mon temps à essayer de le comprendre. Ça mène à rien. T'avais tort, Cha. J'arriverai jamais à le cerner.

Ma meilleure amie me repousse brusquement de son épaule en arquant un sourcil. Elle se lève et commence à faire les cent pas en retirant son bonnet pour passer sa main dans ses cheveux. Andy et moi la regardons faire, attendant visiblement qu'elle dise quelque chose.

— Enfin Frances! explose-t-elle soudainement, ce qui nous fait sursauter tous les deux. Tu vas te secouer, un peu? Merde à la fin! Tu deviens quoi, là? Une putain de pleurnicheuse! Analysons les faits, veux-tu. Si sa bande de baltringues vient te trouver pour te dire de rester là à t'occuper de leur poto, c'est pas parce que t'es efficace en tant qu'esclave! Si monsieur Harry Styles prend tant plaisir à te faire remarquer que t'es jalouse, c'est parce qu'il a envie que tu sois jalouse, c'est parce qu'il a envie de le savoir, que t'es putain de jalouse, ma très chère Frances Williams. Elle est vraiment en colère. Te faire venir chez lui pour avoir l'heure, c'est un putain de prétexte pour te voir et accessoirement te mettre au courant de son petit rencard. Si il te demande de l'embrasser quand il est bourré, si il te dit toutes ces jolies choses, si il te présente des excuses en jouant la carte de la tristesse, c'est parce qu'il est le genre de gars qui devient trop bavard quand il a un coup dans le nez. Surtout qu'il assume pas ce qu'il a pu dire juste après. Hum, très classique! C'est tellement évident, putain, mais t'es aveugle ou bien? Elle commence à jurer en français. Harry est amoureux de toi, lâche-t-elle ensuite en se stoppant face à moi.

Andreas retient son souffle et tourne la tête pour scruter ma réaction. Je reste interdite. Un silence règne dans la pièce pendant de nombreuses secondes. Charlie me fixe dans les yeux, comme pour me persuader que ce qu'elle dit est vrai. C'est tellement absurde. Si Harry était amoureux de moi, il n'agirait pas comme ça. Enfin, je veux dire... Il essaierait de me séduire, le connaissant. Il ne chercherait pas à me faire fuir... si?

— Harry est pas amoureux de moi.
— Bah voyons! s'exclame-t-elle en frappant dans ses mains. J'ai toujours eu l'intime conviction que t'étais le cerveau de la bande, mais pour le coup, t'es vraiment stupide de pas t'en rendre compte! J'ai pas raison Andreas?
— Je lui ai dis un peu la même chose hier.

Je finis par me lever à mon tour, complètement assommée par la tonne d'informations que je viens d'assimiler, par les conclusions de mes meilleurs amis et par la présente idée qui flotte dans mon esprit, celle-ci étant que peut-être, Harry serait amoureux de moi. Je m'approche de la fenêtre et regarde à travers celle-ci en réfléchissant encore. Harry amoureux de Frankie. Je me mets à rire.

— Non, ça sonne tellement faux. Harry amoureux de moi? Sérieusement? Écoutez. Je suis celle qui vit cette histoire, d'accord? Je suis la personne dont Harry se sert pour faire ses corvées. Il est définitivement pas amoureux de moi, sinon je l'aurais senti, il me l'aurait montré. Vous êtes extérieurs à cette « relation ». Vous voyez pas comment il me traite. Et peut-être que je raconte d'une manière qui vous laisse croire qu'il serait « amoureux » de moi... Mais c'est vraiment, vraiment pas le cas. Sincèrement.

Je me tourne pour regarder le poster de Andy et fixe longuement Harry sourire aux cotés de ses meilleurs amis avant de reposer mon attention sur les miens qui me dévisagent. Aucun d'entre eux n'ajoute un mot. Un coup à la porte nous distrait soudainement de notre conversation et la grand-mère d'Andreas apparaît dans l'encadrement de la porte.

— Quelqu'un veut une tasse de thé?
— On descend, Nana, lui répond-il.

Elle sourit largement avant de disparaître. Après un moment, Charlie inspire longuement pour expirer calmement et tend la main en ma direction en esquissant un sourire. Je crois qu'il est inutile de s'attarder sur cette conversation. De toute façon, nous ne tomberions pas d'accord. Je contourne le lit et me saisis de sa main et guidées par Andreas, nous nous rendons dans la cuisine de manière à aller prendre le thé.

Mes désirs sont désordreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant