Chapitre 16

72 6 6
                                    

Satsuki composa le code de la porte blindée et brandit son arme devant elle lorsqu'elle s'ouvrit.

Elle remarqua sur le canapé Giulia baignant dans son propre sang et Juhee à ses côtés, en pleurs avec deux armes en mains. Aïssa se jeta sur elle et la serra dans ses bras puis empoigna la main de Giulia.

Cette dernière souffrait de plusieurs blessures.

— Ma belle, tu m'entends ? demanda Aïssa.

— De moins en moins, je ne vais pas passer la nuit, avoua Giulia qui agonisait.

— Satsuki, il nous faut un médecin et vite ! hurla Aïssa méconnaissable.

— Laisse tomber, c'est mort pour moi... suffoqua Giulia.

Juhee était en larmes et essayait d'expliquer la situation.

— J'étais dans mon restaurant... et Giulia est venue. Elle m'a dit tout ce que je devais savoir. Je devais la suivre sans discuter.

— Ce fumier de Minseok savait... il savait que j'allais rendre visite à Juhee et la mettre en sécurité. Il a verrouillé le secteur de mon immeuble avec ses hommes ! Pourtant, nous n'avons pas été suivies, déclara Giulia.

— Il a descendu tout le monde, poursuivit Juhee.

— Comment a-t-il su ? Et tes filles ? se figea Aïssa qui venait de trouver les plaies profondes de Giulia.

— Deux de mes hommes sont allés à l'adresse de leur école, rassura Giulia qui donnait les coordonnés à sa femme de main.

Des balles s'étaient logées au niveau du bassin et des cuisses.

— On ne peut pas te laisser ici, lança Aïssa avec fermeté.

— Arrête de me faire parler, grimaça Giulia qui respirait de plus en plus difficilement, j'ai profité de la vie à ma façon et c'est déjà très bien !

— Ne dis pas n'importe quoi ! s'apitoya Aïssa.

Satsuki examina les lieux pendant que les trois femmes se chamaillaient. Elle contempla discrètement les différents impacts de balle et tomba sur un membre du gang de Minseok inconscient, puis sur un téléphone au sol près de la table américaine. Un message, qui datait de quelques heures auparavant, s'affichait au nom de « Contact » :

Arshneel a des ennuis. Fais ce qu'on a dit et peut-être que mon boss vous épargnera.

Dès que Satuski ferma le message, la page d'accueil du téléphone s'afficha. Elle vit soudainement Juhee et ses filles.

— Qui est ce fameux contact ?

Les trois femmes se turent. Aïssa n'avait pas l'air de comprendre.

— Juhee ? insista Satuski qui lisait à voix haute le contenu du message.

— Que se passe-t-il ? interrogea Aïssa.

Giulia observa Juhee avec beaucoup d'attention mais celle-ci ne souhaitait pas répondre. Elle arracha son téléphone des mains de la tireuse.

— Juhee ? s'impatienta Aïssa.

— Minjae... répondit Juhee.

— Quoi ? Tu connais ce type mais comment ?

— On le connaît toutes les deux, avoua Giulia à Aïssa, je donne le micro à Juhee.

Aïssa et Satsuki se croisèrent du regard. Les deux femmes semblaient rêver.

— Un jour, Arshneel et moi avions eu une discussion, relata Juhee qui tentait d'atténuer le sang de Giulia avec son pull, Arshneel est devenu fou quand il a su que ta relation avec Minseok était officielle. Je lui ai dit qu'il était louche et Arshneel a joué les détectives.

— Comment aurais-je pu le deviner ? Comment aurais-je pu savoir qu'Arshneel avait des sentiments pour moi ? s'agaça Aïssa.

— Aïssa, tout le monde le savait sauf toi... Il t'offrait toujours des choses et même aujourd'hui il a continué à chercher ton fils. Il voulait que tu le regardes autrement, bordel !

— Je ne voyais pas les choses de cette façon...

— Aïssa, tout comme moi, Arshneel était fou amoureux. Quand il a su que tu sortais avec Minseok, ça l'a rendu malade. Il a préféré s'écarter. C'est dans les ténèbres qu'il a réussi à obtenir le contact de Minjae. On ignore comment, conclut Giulia suffocante.

Son visage, marqué par la douleur, devenait de plus en plus pâle.

— Juhee te doit des explications, vous devez quitter les lieux sur le champ, supplia Giulia.

— On ne peut pas te laisser ici, fléchit Aïssa inconsolable.

— Je vais faire exploser l'immeuble, je ne peux pas laisser ce repère à Minseok.

— Qu'est-ce que tu racontes ? s'écria Juhee, les yeux rivés sur Giulia.

— J'ai déjà appuyé sur la télécommande pour activer la bombe, fit remarquer Giulia en la sortant de sa poche.

— Tu n'es pas sérieuse ? rugit Aïssa impuissante.

— C'est comme ça dans ce monde, il a montré qu'il était plus fort que moi et j'ai perdu. Satsuki a le code de secours pour aller vous confiner dans un de mes repères situé à Gangnam. J'ai de l'argent, des clés, des biens... j'ai tout ce qu'il faut ! Je te les lègue Aïssa, les papiers sont déjà prêts...

— Giulia, je t'en prie, implora Aïssa qui la serra dans ses bras.

— J'ai été à la tête d'un gang, tout comme mes parents, je n'allais pas bien finir ma jolie, dit-elle en posant ses lèvres sur son front, mais Aïssa lui arracha un baiser sincère. Ton beau visage va me manquer et toi, Juhee, même si je te déteste tu devras prendre soin d'elle et vivre jusqu'au bout pour me venger.

— Tu... tu m'en demandes trop ! balbutia Juhee, fâchée.

— Je sais, tu dois être honnête et lui dire ce qu'elle doit savoir ! exposa Giulia. N'oubliez pas que tout a pris forme à la station Gangnam. Maintenant, je vous invite à sortir car il ne reste que cinq minutes. Vous n'allez quand même pas me suivre ? Surtout là où je vais...

Satsuki emmena de force Aïssa qui tentait de relever Giulia. Dans sa tête, les souvenirs se mélangeaient à la réalité. Juhee boitait mais suivit les pas de ses deux partenaires sous le regard apeuré de Giulia se rapprochant de la mort.

Lorsqu'elles atteignirent le parking et qu'elles franchirent la sortie, plusieurs déflagrations retentirent. Une pluie de projectiles accompagnés de flammes illumina le ciel sombre. Pendant leur course effrénée, Aïssa, abattue, s'entremêla les pieds et trébucha. Juhee et Satsuki se dépêchèrent de la mettre debout et l'escortèrent. Elles s'enfoncèrent discrètement dans une ruelle. La voiture personnelle de Satsuki y était garée. 

Gangnam stationOù les histoires vivent. Découvrez maintenant