Chapitre 33

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Satsuki chargea son arme dans la voiture et veilla sur les autres membres du gang en donnant des instructions à distance. Aïssa se trouvait à l'arrière avec le détenu, ligoté, et sa femme de main, excitée à l'idée de commettre un meurtre.

Le chauffeur se dirigea vers un site abandonné : une ancienne entreprise. Le gang de Boris s'y cachait.

Le jeune Thaïlandais balbutiait, transpirant. Il s'apitoyait sur son sort.

— On fait comme tu as dit ? demanda la femme de main.

— Oui, on reste sur mon plan de base, attesta Aïssa, qui lustrait son arme à feu. Quand je dirai « cible », je te laisserai conclure !

— Oui ! Je te couvrirai, défendit Satsuki, prête au combat.

Le conducteur arrêta le moteur et se tourna vers ses passagers. Il montra du doigt le lieu qui se dessinait à quelques mètres.

— Bien, on descend, ordonna Aïssa.

Dès qu'ils arrivèrent à destination, une rubalise quadrillait les lieux. Cela limitait les déplacements des personnes extérieures. Comme l'otage Thaïlandais l'avait révélé, la rubalise servait de prétexte en mentionnant de futurs travaux. En réalité, elle servait de camouflage pour leur planque.

La nervosité dévorait le jeune homme. La substance chimique continuait à le ronger, il montrait de plus en plus de signes de faiblesse.

Aïssa avança avec le garçon, déterminée. Satsuki fermait la marche, soucieuse. Les choses pouvaient dégénérer, elle souhaitait donc anticiper.

Le jeune homme se présenta face à un portail qui donnait sur un immense parking. Il composa le code d'entrée et pénétra les lieux le premier. Les hommes d'Aïssa suivirent quelques minutes après.

Le prisonnier, toujours agonisant, contourna les caméras et se dirigea vers un autre accès. Satsuki surveillait leurs arrières et donnait des instructions aux dix hommes.

Les portes s'ouvrirent avec son badge sous les yeux d'Aïssa. Cette dernière pressa le jeune homme. Ils tombèrent sur un établissement en piteux état. Au sein des locaux, il y avait des cartons et des caisses sur leur trajet. Les murs délabrés accentuaient l'insalubrité des lieux. Aïssa avançait avec beaucoup de sang-froid.

Plus ils cheminaient dans l'enceinte du bâtiment, plus les voix des mafieux se faisaient ressentir. Le jeune homme serrait les dents et craignait de s'aventurer davantage. La sanction était rude pour les traitres.

— Avance ! Sinon, je t'explose la cervelle, jura Aïssa, habitée par la rage.

Deux portes blindées automatiques s'ouvrirent sur une grande salle de réception. Les jeunes membres du gang de Boris jouaient à des jeux d'argent et se droguaient. Au fond de la salle, un autre membre, plus âgé, sirotait un verre d'alcool. Il s'agissait du chef.

Aïssa rejetait l'odeur de transpiration mélangée aux différentes substances illicites. Elle croyait se trouver dans une fosse à lions. Subitement, son regard se posa sur l'autre sortie. Deux autres portes blindées se dressaient. Elle aperçut la silhouette de Satsuki ; elle comprit instantanément.

Sans hésiter, elle se faufila avec le jeune homme au milieu de la bande. Les jeunes ne réagissaient pas. Ils étaient tous sous l'emprise de la drogue. Parmi eux, Boris eut une réaction étrange en voyant Aïssa. Il n'attendait personne.

— Bichette, que fais-tu ici ?

— Retire ce surnom de ta bouche, je te ramène un colis et en échange tu me dois de l'argent.

— Ton visage ne me dit rien, s'étonna Boris qui demandait à ses associés de se taire car ils faisaient trop de bruit.

Aïssa jeta au sol le Thaïlandais inconscient. Elle sortit une fiche avec les notes des dernières recettes réalisées. Tout en bas de celle-ci, il y avait inscrit les dettes des clients. Boris en faisait partie.

— Giulia ! Tu dois de l'argent à Giulia ! hallucina Aïssa.

— Comment ça ? se raidit Boris. Elle a clamsé, nous n'avons plus rien à voir ensemble !

— Tu envoies tes petits merdeux faire tes sales besognes et toi tu en profites pour ne pas payer tes fournisseurs. C'est pas équitable !

— Je ne comprends pas, se mit à rire Boris qui dégaina son arme. Tu n'es pas en position de parler. J'ignore qui tu es mais se pointer comme ça à l'improviste ici, chez un gangster, va te coûter très cher !

La femme de cinquante ans prononça le mot « cible » en japonais. D'un coup, Satsuki débarqua et tira sur l'épaule de Boris. Ce dernier fléchit une jambe et ordonna à ses membres de rappliquer mais les dix hommes d'Aïssa s'invitèrent au spectacle et ouvrirent le feu.

Boris tenta de se coucher à plat ventre. Il réussit difficilement et assista au massacre de ses hommes. Pendant que Satsuki accompagnait les tirs, elle l'empoigna par le bras et le maintint debout. En quelques secondes, ses hommes périrent. Il n'en croyait pas ses yeux et se laissa tomber à nouveau.

Le jeune otage resta au sol, aspergé par le sang de ses acolytes. Certaines victimes gisaient dans leur liquide rouge et d'autres restaient cloîtrées sous les tables. Les dix hommes d'Aïssa se répartirent stratégiquement dans la salle, sous les ordres de Satsuki, scrutant les moindres faits et gestes de leurs ennemis.

Aïssa se rapprocha de Boris et le fixa droit dans les yeux avec un air assassin.

— Un arrangement, c'est un arrangement.

— Tu n'as pas à te mêler de ça ! grogna Boris, l'épaule endolorie.

— Qu'il est drôle ! s'étouffa de rire Aïssa. Tu n'as pas l'air de comprendre le contexte, effectivement ! Je reprends la maison. Je remplace Giulia.

— Tu la remplaces ?

— Exactement, souligna la femme de cinquante ans, tu n'as pas payé ta note Boris. Giulia est partie mais son business prospère toujours. Je me rends compte que tu es un sale type, tu te sers des petits comme de vulgaires jouets et tu les fais payer à ta place.

Boris lui cracha au visage. La tireuse donna un coup de tête à Boris et le plaqua au sol avec violence. Aïssa afficha un air enjoué et effaça la substance répugnante de son visage.

— Il faut que la nouvelle s'ébruite, qu'on sache que je t'ai fait la peau, prononça-t-elle en douceur.

— Tu bluffes !

— Les gars, fouillez tout le bâtiment et ramenez-moi mon argent, dicta Aïssa. Satsuki, je veux des témoins et que la nouvelle s'étende. Je veux qu'ils sachent tous que la reine de Séoul se nommera Aïssa ! Descends ceux qui ne servent à rien. Moi, je m'occupe de Boris.

— Entendu ! s'exclama Satsuki.

— On peut trouver un accord ! perdit la tête, Boris. Tu ne peux pas me descendre comme ça, Giulia aurait accordé un délai supplémentaire.

Les dix hommes d'Aïssa gardaient un œil sur la scène. Ils désiraient voir comment leur nouvelle patronne allait réagir.

— Boris, stoppa Aïssa, tu avais le temps nécessaire et j'en suis sûre, tu avais suffisamment d'argent pour recouvrir ta dette mais tu as préféré jouer au petit crevard ! Il faut que tu saches une chose mon petit Boris, je ne suis pas Giulia, je suis Aïssa et j'écrase les cafards sur le champ ! Tu te torches avec des billets pendant que les petits ramassent des pièces médiocres. Tu es fou !

Aïssa fit semblant de tourner le dos à ses associés et à sa victime. Elle sortit son arme furtivement et appuya sur la détente. Le revolver siffla et logea une balle dans la tête de Boris. Ce dernier tomba net, le visage ensanglanté. Aïssa reçut quelques gouttes de sang et s'essuya les joues.

— Je m'occupe des corps, assura Satsuki qui regardait Aïssa s'éloigner.

Celle-ci rejoignit la sortie et regagna la voiture dans laquelle le chauffeur l'attendait.

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