Gangnam station

Chapitre 21

Le lendemain, Satsuki sortit de la salle de bain avec une valise dans laquelle se trouvaient des machines à tatouer.

La tireuse, une fois dans le salon, prit place sur le sol à côté de la table basse. Dans cette même valise figuraient des contrats entre son ancienne patronne et elle. Aïssa, curieuse, se joignit à Satsuki. Elle s'empara d'un document sur lequel un arrangement apparaissait. Ce type de fichier correspondait à un accord signé par Giulia avec Satsuki. Cette dernière commença à préparer un document similaire avec Aïssa.

— Si tu souhaites prendre la place de Giulia et reprendre son affaire, je dois signer un accord avec toi.

— Tu veux dire un pacte, corrigea Aïssa, souriante.

— Oui, dès que tu signeras en bas de ce papier, je tatouerai ton nom sur ma cuisse.

Aïssa n'avait pas l'air de comprendre cette forme d'arrangement.

La tireuse expérimentée retira son pantalon sous les yeux de Juhee qui venait de les rejoindre. Le nom de Giulia était tatoué sur sa cuisse. Elle activa la machine à tatouer et déposa lentement l'aiguille sur sa peau. Elle raya le nom de son ancienne patronne.

— C'était la preuve de ma fidélité envers elle.

— Elle était d'accord avec ça ? s'étonna Juhee, abasourdie.

— Oui, confirma Satsuki.

Aïssa ne prit même pas l'initiative de lire le contenu du contrat. Elle savait à peu près de quelle manière Giulia pouvait procéder avec ses employés. Elle ne s'attarda pas et signa.

Juhee se retira, déçue, elle savait que sa meilleure amie ne reviendrait pas sur sa décision.

— Je suis votre femme de main ! se prosterna légèrement Satsuki. J'écoute votre premier ordre !

La femme en profita pour tatouer le prénom d'Aïssa juste en dessous de celui de Giulia. Aïssa se pencha et lui demanda de faire la même chose sur le bras gauche, presque à hauteur d'épaule.

— Je veux le nom de Giulia.

— Tout de suite, se dépêcha Satsuki.

— Dernière chose Sat.

— Oui ?

— Arrête de me vouvoyer, continue de me parler comme avant.

Satsuki afficha un léger sourire et tatoua Aïssa qui serrait les dents.

Juhee trouvait cela absurde. La Coréenne ne put se résoudre à s'isoler. Au moment où elle franchit la porte des toilettes, son téléphone vibra. Aïssa l'entendit et échangea un regard intense avec elle.

Satsuki interrompit la séance de tatouage et sortit son arme à feu qu'elle braqua sur Juhee.

Aïssa lui ordonna de décrocher et de mettre le téléphone sur haut-parleur. Juhee sentit la tension monter et s'exécuta aussitôt.

— Minjae ?

— Noona*, où es-tu ? Tu n'es pas chez toi ?

— Je suis à l'hôtel...

— A l'hôtel ? s'étonna Minjae qui avait l'air de se déplacer en voiture.

— Peu importe où je me trouve, je veux savoir où sont mes petites ?

— D'abord, je veux être sûr d'une chose.

Juhee demeura sans voix.

— Giulia ? Je peux le dire à Minseok ? C'est officiel ?

Aïssa grimaça de douleur.

— Elle a tout fait sauter... oui, affirma Juhee, mal.

— Bien, rendez-vous ce soir à Incheon, au centre d'art.

— A quelle heure ?

— 19h, indiqua Minjae, le ton grave.

— Avant de raccrocher, tu peux me dire si Arshneel est encore en vie ?

— Tu connais déjà la réponse. Comme Minseok l'a dit, un homme contre un homme !

— Minjae, tu l'as tué oui ou non ? s'impatienta Juhee, sur le point de faire une crise.

— A ce soir !

La ligne se coupa.

Juhee serra contre elle son téléphone. Elle se laissa tomber le long du mur avec des perles salées sur le visage. Aïssa tremblait, refusant de croire aux paroles de Minjae.

— Il ne l'a pas dit explicitement donc on va considérer qu'il est encore vivant ! exposa Aïssa qui gardait espoir.

Satsuki voulut consoler Juhee mais Aïssa lui ordonna de terminer le tatouage.

— Lorsqu'on échangera toutes les deux, on le fera uniquement en japonais, proposa Aïssa qui parlait dans la langue maternelle de sa femme de main.

— Compris, valida Satsuki.

La femme de cinquante ans serra les poings. Arshneel, je te fais confiance, tu dois résister et survivre !!! bouillonnait intérieurement Aïssa. Un plan commençait à germer.

Note*: Noona signifie "grande sœur". Ce terme est utilisé par un homme qui a une relation proche avec une femme plus âgée que lui.