Chapitre 58

24 3 1
                                    

21h54. Yudan patientait dans une voiture de service. Elle stationnait à plusieurs mètres du commissariat. Elle travaillait de nuit. Dans la rue peu fréquentée, de la neige recouvrait le trottoir. La quarantenaire attendait sagement l'arrivée de sa coéquipière. Elle lui avait donné rendez-vous avant de commencer ses missions. La policière écoutait ses derniers messages vocaux, tuant le temps à sa manière.

Deux minutes s'écoulèrent. Quelqu'un s'approchait de son véhicule. Yudan remarqua Bom traumatisée. Elle ouvrit la portière et la laissa s'installer.

Bom retira son bonnet et sécha ses larmes sous les yeux ahuris de sa partenaire. Après une bonne inspiration, elle lui raconta sa mésaventure à l'hôpital. Elle n'avait plus d'autre choix que de se plier à la volonté de sa cliente. Avec la tueuse à gage dans les parages, cela ne la rassurait pas. Elle n'aimait pas le chantage mais la situation pouvait empirer. Son père courait un grave danger.

— J'ai peur qu'il lui arrive malheur, craqua la jeune femme.

— Écoute-moi, apaisa Yudan, je t'ai dit que notre système avait des failles : la corruption ! Je n'ai aucun pouvoir mais toi tu peux encore changer les choses. Si tu estimes qu'il y a un loup dans cette affaire et que l'accusée est innocente, tu dois aller au bout.

— Le mépris de Bokyung est une insulte !

— Dans cette affaire, elle n'a rien à perdre, souligna Yudan. C'est simplement une manière de te dire « Attention, je peux tout changer ». La presse peut tuer une personnalité publique et ça, elle le craint. Imagine les titres, la famille Jang laisse n'importe qui rentrer dans leur cercle. Ce serait la honte pour elle. Si son fils est réellement parfait, elle ne devrait pas insister pour que tu accélères l'examen judiciaire ! Fais cet entretien avec lui et après tu fixeras les règles.

Yudan renifla et se contenta d'écouter sa collègue.

— Bom, je te considère comme une petite sœur et ta réussite est aussi la mienne.

— Que proposes-tu ?

— Comme nous sommes dans une situation alarmante, je pense avoir un contact qui pourra peut-être nous aider.

— Qui ?

La policière n'en était pas fière car elle savait qu'elle prenait des risques en divulguant cette information.

— Je l'appelle Robine des bois, s'amusa Yudan. C'est une fille qui doit avoir peut-être ton âge ou un peu plus. Je n'ai jamais cherché à l'arrêter car elle vole les riches. Etant donné leur mépris dans ce pays, ça m'arrange bien !

— Tu penses qu'elle connaît ces histoires de gang entre l'Ouest et l'Est de Séoul ?

— Certainement, elle pourrait peut-être nous aider !

— Aïssa a dit qu'il pourrait s'agir de Minseok, le chef du gang de l'Ouest. Ça serait intéressant de se renseigner à ce sujet.

— Tu sais que sans preuve tangible, ça pourrait se retourner contre toi, étant donné son statut.

— C'est pour ça que je ne soulève pas cette idée, clarifia la détective. Bokyung tuerait mon père sur le champ ! Aïssa joue peut-être la carte de la défense pour alléger sa peine mais j'ai l'impression qu'elle est droite dans ses bottes. De plus, le témoignage d'Hana colle avec le fait que Minseok enchaînait des petits boulots tout en gardant le secret sur sa véritable situation. Déjà, on a le profil du manipulateur.

— Je vois...

Yudan sortit sa montre et indiqua à sa collègue qu'elle allait au commissariat.

— Bientôt, j'irai à la Seoul National University. On se tient au courant !

Gangnam stationOù les histoires vivent. Découvrez maintenant