Raymond Bossy
-Ma première surprise a été de découvrir que la conception biblique de la Santé ne se rapportait pas à un état de l'être humain impliquant par exemple un sentiment de bien-être, d'intégrité du corps ou des capacités fonctionnelles, mais était une notion relationnelle. Elle consiste en effet dans le fait d'être tourné vers Dieu, dans une relation de confiance à son égard. Il en résulte juste et paisible avec soi-même, les autres et le reste de la création.
-En reformulant les choses autrement, on pourrait dire que l'être humain est en Santé lorsqu'il retrouve sa juste place au sein de la création, sa place de créature dépendante de son Créateur, entretenant de justes et confiantes relations avec lui-même et les autres êtres humains, tout en gérant la création selon les directives divines.
-La notion de Santé dans cette dynamique relationnelle est transmise de façon frappante dans le récit du fils prodigue. Alors qu'il est dit de ce fils (le cadet) qu'il revient chez son père dénutri, en haillons et honteux, il est mentionné : « Ton père a tué le veau engraissé parce qu'il (ton frère) l'a retrouvé en bonne santé. » Si ce fils est déclaré en bonne santé, ce n'est certainement pas parce qu'il est dans un état de complet bien-être physique, mental et social, lui qui est dénutri, meurtri, au plus bas mentalement et isolé socialement, mais bien parce qu'il est revenu vers son père et qu'il y a retrouvé sa place de fils.
-Il y a en effet une autre notion qui ressort fortement dans la bible en lien avec la Santé, c'est la dimension communautaire. Celle-ci se démarque de la définition très individualiste de l'OMS. Même si chaque être humain est reconnu pour ce qu'il est, devant assumer ses propres responsabilités, il n'est pas considéré en dehors de son tissu familial, social ou national.
-Il y a des priorités sur le plan relationnel, comme nous l'avons vu précédemment avec le mobile: si la relation avec Dieu est premièrement mise à sa place, les autres relations se mettront en place.
-La santé n'existe pas pour elle-même, comme un objectif ultime. Elle correspond plutôt au cadre qui nous permet d'accomplir notre destinée humaine. C'est à partir du moment où j'ai retrouvé ma juste place au sein de la création que je peux développer sainement mes relations, oeuvrer efficacement et de façon bénéfique pour tous.
-Comme nous l'avons vu, nous ne sommes pas créés pour pouvoir siroter tranquillement notre jus de fruits exotiques au bord d'une rivière paisible en admirant un paysage idyllique, libre de toute préoccupation. Selon ma compréhension du projet de Dieu envers l'humanité, nous avons été créés en vertu de son amour, pour pouvoir partager la plénitude de la vie avec lui (Père, Jésus, Saint-Esprit), dans son intimité et son amour. Nous vivons pleinement notre identité lorsque nous vivons en sa présence, que nous le louons, l'adorons et l'honorons de toutes sortes de manières, dont notamment l'amour partagée entre nous tous, êtres humains de la création. Si c'est pour cela que nous avons été créés, c'est ainsi que nous nous épanouirons pleinement et pourrons donner le meilleur de nous-mêmes.
-Si nous lui confions notre vie, Dieu va progressivement nous restaurer au plus profond de nous-mêmes, afin de nous faire devenir ce que nous sommes appelés à devenir. Il va nous conduire à maturité dans notre relation avec lui, avec nous-mêmes, avec les autres et dans notre façon de gérer la création. Cette maturation et cette transformation intérieure ne se feront souvent pas sans égratigner notre orgueil, nos fausses croyances, notre égocentrisme, nos idées et, donc, non sans une certaine souffrance. Même si le but de Dieu n'est pas de nous faire souffrir, il est capable de mettre à profit n'importe quelle circonstance de notre monde déchu, y compris la maladie et la souffrance, pour nous faire devenir tels qu'il avait prévu que nous soyons, cela, évidemment, pour autant que nous choisissons d'entrer dans ce projet.