Chapitre 14 : Le poids des convictions

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Les sourcils froncés, la doctorante lisait les inscriptions de la pierre tombale à la lueur des flammes, se demandant ce qui pouvait bien intéresser sa cousine ici. Si le carnet mentionnait qu'il fallait suivre le marquage laissé par Philibert Aspairt, Elo n'avait aucune idée de quoi faire de ces informations. Elle s'était dit que visiter la tombe pourrait l'éclairer – après tout, c'est ce que sa cousine faisait tout le temps – elle remettait désormais en doute son instinct.

Éteinte par économie, la frontale ceinturait toujours sa tête ; Elo gratta sa chevelure coincée sous l'élastique. Son petit chignon noir sautilla.

Perdue dans ses pensées, elle fit le tour de la stèle encastrée dans le mur ; en inspecta tous les recoins. La poussière des catacombes avait sali le calcaire blanc en traces aléatoires. Soudain, à la base de la pierre, une gravure attira son attention... car elle était pâle, récente et, dessous, de la poussière fine était éparpillée.

Un A et un P enchâssés l'un dans l'autre ; comment un exemplaire des marques laissées par Philibert avant son trépas pouvait-il se trouver sur sa propre tombe ?

La mâchoire d'Elo se tordit d'inquiétude. Lana était-elle passée par ici et avait copié le monogramme ? Était-elle de mèche avec ces mercenaires ? Elo secoua la tête : Lana travaillait toujours seule et fuyez tout type d'organisations, secrètes comme officielles. Elle ne faisait confiance à personne. Excepté à quelques amis en de rares occasions. En tout cas, elle n'avait jamais fait confiance à Elo, ni pour lui partager ses aventures ni pour partager ses trouvailles... jusqu'à l'arrivée du carnet sur la table en marbre du Café de Caylus, par le biais de l'une des avocates de son cabinet, avant de disparaître dans le désert Égyptien !

Elo passa le doigt sur le monogramme ; du calcaire se colla à sa peau : la marque était effectivement fraiche. Ses yeux, élargis par la curiosité, murmuraient presque : « Qui t'a tracé... ? »

— LeFay est passé par là y a quinze minutes, grogna une voix. Y avait rien à signaler.

Elo sursauta. Le son provenant de la droite, elle prit ses jambes à son cou dans l'autre sens. Quelqu'un ajouta :

— Le principe d'une ronde, Ugo...

— Ça va, je sais !

— Et puis avec LeFay y a jamais rien à signaler, jusqu'à ce qu'une bande de jeunes occupe une salle où ils auraient pas dû être, qu'ils fassent le bordel avec des câbles qu'ils auraient pas dû toucher et que l'explosion coordonnée soit décoordonnée, alors...

La conversation emportée des deux mercenaires couvrit ses pas précipités. Elo longea le mur à la recherche d'un recoin sombre où se terrer. Les bras devant elle, le souffle absent et les yeux exorbités, elle claudiquait comme un zombie cherchant son prochain cerveau. Derrière un pseudo pilier, une chatière s'ouvrait au ras du sol et elle s'y engouffra avant de voir apparaître des bottes à semelles épaisses.

— N'oublie pas de respirer, dit Ugo d'un air taquin.

—... maintenant on est coincé sous terre parce que l'accès est bouché ! Et la Prêtrise qui nous assomme : « Nia nia nia le trésor est forcément sous l'ancienne abbaye comment ça se fait que ça avance pas... Nia nia nia il n'y a jamais qu'une seule entrée... si vous ne le remontez pas dans les quarante-huit heures vous serez livrés à vous-mêmes... Et si vous aviez su maîtriser Magpie, on en serait pas là... ! » Comme si on n'était pas capable de trouver trois bouteilles de pinard ! On est des chasseurs de trésors, bordel ! Pas des vendeurs à la sauvette.

Soudain, les pleurnicheries du mercenaire cessèrent.

— Et bah tiens ! Y avait rien à signaler ? Cinq bougies à baignoire, ça choque personne ?

Heka TombeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant