— Ça s'est déjà vu, argumentait Baudi les mains sur les hanches. Je me souviens, il y a cinq ans, quand un ristou s'était perdu. Tous les cataphiles s'étaient passé le mot pour descendre ensemble et aider.
Au milieu du couloir, le Major Ferraud, Baudi et Elo s'étaient écartées du groupe pour s'entretenir avec un certain Paul, le chef d'unité de Relais-2 qui venait de les retrouver. Tout était calme dans cette section des souterrains, mais encore une fois, le temps pressait : entre Relais-2, qui devait faire sortir un blessé, Baudi ainsi qu'Elo, et Relais-1 qui cherchait désormais les otages en danger.
Le Major avait curieusement écouté le plaidoyer de Baudi, qui soutenait le « plan » des cataphiles, rapporté par Elo, bien qu'exécuté par Rimbaud et Verlaine. Elle acquiesça gravement :
— Je me souviens aussi. Disons qu'il est possible de jouer sur un certain statu quo.
Le chef de Relais-2 désapprouvait.
— C'est trop dangereux. Si les cataphiles se mettent à descendre, on ne pourra pas les aider. Notre priorité, ajouta-t-il en pointant les secouristes qui s'éloignaient déjà, ce sont les blessés et les otages.
— Paul, soupira le major, ils descendent déjà quoiqu'il arrive... leur territoire est attaqué. Si on tolère quelques un et qu'on les encadre, au moins ils ne seront pas dans nos pattes.
Elo aurait voulu penser différemment, mais il était vrai que, d'ordinaire, les cataflics n'arrivaient déjà pas à repérer toutes les entrées ; il leur serait presque impossible de toutes les faire garder ou boucher en quelques heures : ils n'avaient pas assez d'effectifs. De plus, cela restait dangereux pour les cataphiles qui, comme les trois poètes, descendraient coûte que coûte pour voir d'eux-mêmes ce qu'il se tramait dans leur maison. La méfiance des cataphiles envers le corps policier pouvait bénéficier d'une trêve dans cette urgence ; s'il s'agissait d'une question de vie ou de mort, beaucoup tenteraient d'apporter leur aide du mieux qu'ils le pourraient. En tout cas, Baudi avait foi en eux.
— Pas de souci, intervint Baudi. Nous, on s'occupe d'embrouiller les Chérubins et, vous, vous ne nous mettez pas de contravention pour aujourd'hui.
Le Major leva une main :
— Non, non. Vous ne vous approchez pas des contractors. Hors de question.
Baudi se fendit du sourire assassin qui précédait souvent ses ripostes. Se plaçant derrière la poète, Elo posa ses mains liées sur l'épaule de son amie.
— Ce qu'elle veut dire, traduisit-elle posément, c'est qu'ils vont se charger de taguer par-dessus les marques de Phiphi pour effacer les entrées et prendre soin de boucher les accès conduisant au nouveau réseau. Accès qui sont non seulement dangereux pour tout le monde et qui une fois bouchés permettront, en plus, d'acculer les contractors. N'est-ce pas, Baudi ?
Le sourire de la poète s'adoucit.
— Voilà, dit-elle en plantant ses yeux dans ceux de la cataflic. Je ne l'aurais pas mieux paraphrasé.
Ferraud plissa les siens.
— Mmm. Des guides cataphiles encadrés par des unités de police et munis de bombes de peinture...
Puis, s'adressant à tous les participants :
— Disons cela.
Et vers son collègue :
— Paul, je recommande trois unités de quatre, plus un cataphile, pour commencer. Le double d'unité si ça fonctionne et qu'on galère toujours autant à circuler d'ici cinq heures. Mais ne prenez pas n'importe qui. Vérifiez qu'ils ont de l'expérience et les chatières à jour. Et dis au Capitaine qu'il se grouille à envoyer quelqu'un à la BNF pour trouver les plans et ces fameux Rimbaud-Verlaine.
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Heka Tombe
AksiyonAu cours d'une rave dans les catacombes interdites, Eloïse tente d'impressionner son nouveau béguin, quand Paris s'effondre. Elle est doctorante dans la grande École du Louvre, mais la réputation de sa cousine « pilleuse de tombes » menace ses rêve...