Chapitre 22 : Tomber dans l'arène

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— Ne la tuez pas ! gronda la voix de LeFay derrière ses poursuivants.

« Tant mieux », pensa Elo. Elle aurait eu du mal à distancer une rafale de balles des deux zigotos qui la coursaient. Car ils connaissaient le terrain.

Le labyrinthe était un mélange de carrières aux murs irréguliers et d'un sol accidenté. Ici, la marque de la présence des mercenaires avait disparu ; plus de guirlande lumineuse ni de poutres au plafond. Elo courait désormais à la lueur de sa lampe et le réseau ne lui laissait guère d'option. La galerie sinueuse dans laquelle elle s'était engouffrée ne se fendait d'aucune intersection. Était-ce pour cette raison que les Chérubins avaient décidé d'y établir leur campement : parce que c'était un cul-de-sac ?

Soudain, le sol se couvrit d'anciennes installations en bois : là où le calcaire avait été trop creusé, des planches créaient un revêtement plat. Elo n'eut d'autre choix que de poser le pied sur l'une d'elles et celle-ci craqua à son passage. L'une des planches s'effondra à sa suite, obligeant ses poursuivants à jouer les funambules.

Elo continua sa course de plus belle, quand un trou s'annonça devant elle. Étroit, mais profond. Elle bondit, atterrit de justesse ; elle ne put retenir un sourire de fierté avant de s'élancer à nouveau. Un cri sourd lui fit guetter ses poursuivants : l'un d'eux venait de louper son saut et de se briser les jambes dans la cavité. Elle étouffa sa surprise d'une main sur le cœur, au moment où le sol s'effaça sous ses pieds dans un craquement de vieux bois. Elle ne tombait pas dans un simple trou ; elle glissait dans un boyau.

— Aaaah... !

La pierre effritée ralentissait à peine sa chute ; elle ne faisait que lui écharper la peau des coudes. La lampe lui échappa des mains et dévala la pente : l'effet stroboscope dura que quelques secondes avant que le faisceau ne s'immobilise brutalement... au fond d'une fosse d'os noirs. Elo s'enfonça à sa suite, comme dans une piscine à boules. Les os éclatèrent sous elle. Elle s'y vautra sans adresse, les mains pétrissant des restes... carbonisés. Sa lampe avait disparu sous eux ; elle la trouva près d'une bague en or, qu'elle n'eut pas le temps d'inspecter.

Swouch ! Le deuxième mercenaire glissait à sa suite. Elo s'empara de sa lampe et l'éteignit en se jetant vers l'avant. Elle avait roulé sur les premières marches d'un escalier aussi large qu'un gradin. Blottie le long de la contremarche, elle serrait les fesses pour s'aplatir contre la pierre. Elle n'avait pas vraiment eu le temps d'observer le terrain.

Le mercenaire déboula dans la salle aussi maladroitement qu'elle. Arrivé trop vite, il se prit les pieds dans les os, s'écroula. Elo l'entendit grommeler en cherchant son souffle ; elle retenait le sien.

Un rayon de lumière balaya l'air au-dessus d'elle. La radio du mercenaire grésilla.

— Czesław pour la Capitaine.

La lumière passa à nouveau au-dessus d'Elo. Sa tête rentra instinctivement dans ses épaules.

— Capitaine pour Czesław, répondit la radio.

Le son était faible. De nouveaux craquements indiquèrent à Elo que le mercenaire cherchait à se rapprocher de la bouche d'entrée pour récupérer le signal.

— Vous m'entendez d'ici ?

— Vous l'avez ? dit la Capitaine.

— Non, je l'ai perdue. Mais... Capitaine, j'ai trouvé quelque chose. Une salle avec des os.

— Va falloir être plus précis, soldat. C'est pas ça qui manque ici.

— Ça vous aide si je vous dis que j'ai atterri dans la Chambre des Secrets ?

Heka TombeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant