XVII

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Faith

À l'heure de midi, fidèle à ma triste coutume de solitude, je m'installe à l'une des tables les plus isolées de la cantine. Le repas qui nous est servi est tout sauf réjouissant, des asperges avec de la sauce d'une étrangeté répugnante, et je n'ai rien d'autre dans mon assiette. Deux heures seulement se sont écoulées, et l'épuisement me gagne déjà. Un livre devant moi, je tente péniblement de ne pas enfouir mon visage dans mon assiette, exténuée. Mes paupières se ferment, mais un bruit sourd me tire du sommeil que je n'ai pas encore atteint. En sursaut, j'ouvre les yeux pour découvrir trois filles qui me sont inconnues. Une aux cheveux châtains et aux yeux verts, une blonde aux yeux marrons, et une brune aux yeux bleus, se tenant devant moi. La brune, fronçant les sourcils, glisse son téléphone sous mon nez après avoir frappé sa main contre ma table.

— Tu n'es qu'une salope ! s'exclame-t-elle.

Les deux autres derrière elle approuvent d'un hochement de tête.

— Tu as osé poser tes sales mains sur mon mec, alors qu'un simple mot, "pute", suffit pour te désigner dans une conversation !

Perplexe, je cligne des yeux. Tout ce que je voulais, c'était dormir.

— Qu'est-ce que tu as à dire ? Que c'est lui qui t'a forcée ? Hein ? insiste-t-elle, eh bien moi, je lui ai parlé, et il m'a dit qu'il était ivre et que c'est toi qui l'as forcé !

Je fronce les sourcils. Si je comprends bien, elle est la petite amie de Steve, et c'est presque une semaine plus tard qu'elle vient me chercher des ennuis avec cette histoire.

— Parle ! m'ordonne-t-elle.

Je prends alors mon plateau et me lève, la contournant tout en l'ignorant. Je poursuis mon chemin lorsque soudain, sa main s'agrippe à mon plateau, le faisant tomber au sol. Mon verre et mon assiette se brisent, souillant mes vêtements et le sol.

— Tu comptes m'écouter, oui ou non ?

Si j'avais eu l'audace, j'aurais répondu "non". Mais je n'ai pas le courage. Elle frappe ma joue violemment, faisant tourner ma tête sur la droite.

Tous les regards convergent vers le spectacle que nous leur offrons. Certains rient, d'autres se retiennent.

— En six mois de relation, Steve ne m'a jamais trompée, et ça ne risque pas d'arriver !

Elle se trompe beaucoup, idéalisant, lui et leur relation. Elle s'apprête à me tirer les cheveux quand une main saisit son bras.

Monsieur Johnson.

Il la fixe durement, et les lèvres de la fille dont je ne connais pas le nom commencent à trembler, non pas de tristesse, ce serait trop beau, mais parce qu'elle tente de forcer un sourire.

— Trois heures de colle, annonce-t-il, ton nom ?

— Brianna Peale, murmure-t-elle.

— Ramasse. Attends-toi à une convocation dans le bureau du principal.

Elle redresse la tête, et Monsieur Johnson libère son emprise sur son bras pour saisir le mien, me conduisant derrière lui. Tenant son plateau de la main droite et mon poignet de la gauche, nous avançons rapidement sous les regards amusés des élèves. Quittons la cantine pour rejoindre la cour de récréation, puis nous dirigeons vers les vestiaires, l'endroit le plus proche. Il s'installe, et je fais de même sur le banc en face du sien, comme la veille.

— Qu'est-ce qu'elle te veut ?

— C'est la copine de Steve, réponds-je.

Il soupire, prenant une bouchée de son assiette. Mâchant avec confiance, il fronce les sourcils, agacé. Mastiquant presque avec dégoût, il avale puis prend une gorgée d'eau avant de tousser.

Forgotten MemoryOù les histoires vivent. Découvrez maintenant