XIX

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Faith

Le trajet s'étire dans une lenteur endormante, et déjà près d'une demi-heure s'est écoulée depuis notre départ. Ce voyage à Paris, que je croyais réservé à des visites culturelles, prend une tournure inattendue avec une course d'orientation. Bien sûr que nous ne pouvons pas échapper à une course d'orientation dans les bois français. L'hiver règne dans le nord de la France, et la seule diversion qui nous est offerte est une course d'orientation, n'est-ce pas magnifique ?

Les voix des filles résonnent à l'arrière du bus, tandis que je m'efforce à rester concentrée sur la mélodie de la musique qui résonne dans mes écouteurs. Nous avons tous la même tenue, imposée même aux enseignants, un survêtement blanc associé à des chaussures d'un bleu étrange, un mélange assez moche. Mes cheveux que j'ai du attacher en deux longues couettes reposent sur mes épaules.

Le soulagement naît lorsque le supplice qu'est ce trajet touche à sa fin. Nous quittons le bus pour nous retrouver face au sentier menant à la Forêt domaniale de Meudon. Un silence paisible règne, brisé uniquement par le chant des oiseaux et les jacassements des élèves, bien sûr.

Madame Miller, professeur de sport, rompt ce silence avec son annonce :

— Faites des équipes de deux maximum !

Un bref regard autour de moi me montre que chacun a trouvé son binôme, sauf une seule personne. Et qui est cette personne ? Moi !

Sans blague ?

— Mademoiselle Davis, vous êtes seule ? interroge Madame Miller.

Non, non, je suis très bien entourée là.

— Oui, réponds-je.

— Rejoins l'équipe de ton choix, déclare-t-elle.

Un mutisme collectif m'accueille. Apparemment, personne ne veut de moi, disons que c'est compréhensible.

— Faith, nous n'avons pas tout ton temps, insiste Madame Miller, pressant ma décision.

Je ne peux simplement pas m'intégrer à une équipe qui me refuse. De plus, ce moment devient extrêmement gênant.

— Je fais équipe avec elle.

Je me retourne pour faire face à Monsieur Johnson, comme si la chose qu'il venait de dire était la chose la plus normale du monde.

— Alban ? Tu...

— Personne n'a dit qu'il était interdit de faire équipe avec un élève, n'est-ce pas ? questionne-t-il, si personne ne la veut, moi, je veux bien.

Madame Miller hoche la tête en soupirant, tentant de dissimuler son agacement.

— Afin que vous vous familiarisiez avec l'endroit, le concept sera plutôt simple, commence-t-elle.

Elle distribue des feuilles à chaque binôme.

— Ce sont des cartes, précise-t-elle, vous devrez placer un plot quelque part dans la forêt. Si l'endroit où vous vous trouvez n'apparaît pas sur la carte, vous êtes hors zone. Une fois le plot posé, vous pourrez revenir ici.

— Vous pouvez commencer, annonce Monsieur Johnson.

Je m'approche donc de lui et il saisit un plot. Il me fait un signe de la tête et nous nous en allons. Il prend le chemin opposé à celui que la majorité de la classe a prit.

— Merci, chuchoté-je.

— C'est que vous êtes super solidaires dans cette classe, pas vrai ?

Forgotten MemoryOù les histoires vivent. Découvrez maintenant