Épisode 4 - 8 Mary Foster

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La porte de la petite maison s'ouvre et un homme apparait. Une grosse trentaine, mal rasé, les traits fatigués. Mais surtout, il émane de lui cette aura désespérée, si commune à ceux qui ont perdu quelqu'un de façon brutale. Pour Jake, c'est quelque chose de quasiment tangible.

— Bonjour Monsieur Foster. Jake Sullivan, nous avons parlé au téléphone. Voici mon assistante, Andrea.

— Oui, oui. Entrez. Je vous en prie.

Le privé et sa fille suivent l'homme à l'intérieur. Dans l'entrée, Jake remarque aussitôt les paires de chaussures pour femme et pour enfants, qui n'ont pas encore été rangées. Des photos décorent le mur : sur l'une d'entre elles, l'homme qui les accueille y apparait, plus jeune, accompagnée d'une femme brune au sourire généreux. Sur une autre, une petite fille joue dans un parc.

— Elle a quel âge, demande Jake pour entamer la discussion.

— Neuf ans.

— Elle est à l'école ?

— Non. Chez ses grands-parents, à San José. Le temps que les choses s'arrangent.

Jake se demande cyniquement si tout n'aurait pas été plus simple dans sa vie, si Cecilia lui avait été arrachée de la même façon. Peut-être qu'il n'aurait pas eu autant besoin de se consacrer à son métier. Peut-être qu'il n'aurait pas perdu son bras et sa carrière. Peut-être même que les choses se seraient mieux passées avec sa fille. La tragédie ne frappe jamais les bonnes personnes.

Monsieur Foster les emmène dans le salon, qui porte encore les stigmates d'une décoration féminine. Andrea et le privé s'assoient sur un canapé mou.

— Une bière demande leur hôte ?

— Pourquoi pas, répond-t-il.

L'homme acquiesce et va chercher trois bières dans le frigo. Il s'installe ensuite dans un fauteuil de mauvaise qualité et décapsule la bouteille.

— Vous enquêtez sur les meurtres, c'est ça ?

— Oui. Nous avons été mandatés par la famille de l'une des victimes et nous faisons une investigation en parallèle de celle de la police.

— Je comprends. Comment je peux vous aider ?

— Pouvez-vous nous parler de votre épouse, demande Andrea avec une voix emplie de compassion.

— Tout le monde appréciait Mary. Elle était douce, serviable, toujours prête pour aider. Elle travaillait et tout se passait bien avec son boss et ses collègues. Elle devait bientôt avoir une promotion.

Discours typique quand on commence à discuter avec la famille d'une victime, se dit Jake. Les morts sont toujours des personnes gentilles, aimées de tous et sans problèmes. Jusqu'à ce que l'on creuse... Personne n'est exempt de secrets et les gens les plus ordinaires cachent souvent les plus atroces.

— Donc personne ne lui en voulait d'après vous ?

— Non. J'arrive toujours pas à croire que quelqu'un s'en soit pris à elle.

— Vous étiez avec elle quand c'est arrivé ?

Jake boit une gorgée de bière, tout en observant avec attention leur interlocuteur. Il doute que celui-ci soit lié au meurtre, mais il ne faudrait pas écarter la possibilité aussi tôt.

— Oui.

Il se gratte le bras. En général, les gens ont plutôt tendance à se toucher le visage quand ils mentent ou ressentent de la gêne.

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