Love Bites

Épisode 5 - 2 Miraculée

Andrea, qui pourtant a habituellement le sommeil lourd, éprouve toutes les peines du monde à s'endormir, son esprit décidé à repasser en boucle les événements des dernières quarante-huit heures. L'enquête, déjà compliquée, a viré dans la démence et l'horreur quand les deux policiers se sont fait tuer à l'hôpital. En un instant, les divagations de Hunter, qu'elle prenait jusque-là pour un allumé, ont cessé de faire sourire.

Et que dire de la femme brune, la suspecte qui a bien failli les tuer, elle et son père, indifférente aux balles et aux coups ? L'excuse des drogues de combat, comme ils l'avaient d'abord soupçonné, ne la satisfait plus. Est-ce que les vampires existent vraiment ? Si oui, qu'est-ce que cela implique pour le monde dans lequel elle vit ? Elle a déjà vu la noirceur de l'humanité dans sa carrière de flic, mais si des monstres marchent parmi les hommes, cachés et relégués au rang de légendes urbaines, c'est qu'elle a fait fausse route pendant toutes ces années. Combien de crimes non résolus sont l'œuvre de non-humains ?

La question de Sienna se pose également. Pourquoi, entre toutes les victimes potentielles, une de ses connaissances, qui plus est la petite amie de Taylor, s'est retrouvée embarquée dans cette histoire ? Les coïncidences sont rares dans la vie, comme le dit son père, mais dans les crimes, elles n'existent pour ainsi dire pas. La jeune femme semblait particulièrement confuse, notamment pendant sa déposition, mais Andrea commence à nourrir des doutes : et si Sienna n'était plus tout à fait humaine ? Les médecins n'ont en tout cas pas été capables de trouver une explication à son miraculeux rétablissement.

Toutes ces questions sans réponses la travaillent et l'empêchent de dormir. Bientôt, même son meilleur anti-cernes ne pourra plus rien pour elle. Et où a bien pu passer Taylor ? La femme-flic a bien compris que certaines de ses absences, les semaines passées, étaient liées à sa relation discrète avec Sienna, mais comme cette dernière se trouve dans la chambre d'à-côté, elle commence à s'inquiéter pour de bon. D'autant que sa cousine ne daigne pas répondre à son téléphone... Taylor a beau avoir l'air fragile et innocente, elle a tout de même failli se faire tuer par un tueur en série qu'elle a elle-même été chercher... Autant dire qu'il y a de quoi s'inquiéter.

Elle croit entendre un bruit et aussitôt le demi-sommeil se dissipe. Elle prête l'oreille, attentive. Rien, d'abord, puis un craquement léger sur le parquet. Proche. Très proche. Non pas dans le couloir, mais bien dans sa chambre. Sa main vient aussitôt chercher l'interrupteur de la lampe de chevet, une sueur froide coulant dans son dos.

Toujours, dans ces moments, les actes les plus simples deviennent compliqués et il lui faut un moment pour trouver le fil de la lampe et remonter celui-ci. Elle est à présent certaines que quelqu'un se trouve juste à côté.

Un autre craquement.

Elle appuie finalement sur l'interrupteur et l'ampoule s'allume, éclairant faiblement la pièce. Elle sursaute en apercevant une silhouette, à un mètre à peine de son lit. Elle plisse les yeux pour s'habituer à la luminosité.

— Sienna ? dit-elle alors à voix haute.

La jeune femme aux cheveux verts semble reprendre conscience, comme si elle se réveillait soudainement au milieu d'une crise de somnambulisme. En simple chemise de nuit, se cache les yeux avec le bras, sans doute gênée elle aussi par la lampe. Il lui faut quelques instants, mais elle pose finalement le regard sur Andrea, un mélange d'interrogation et d'intensité dans les yeux.

— Ça va ? lui demande Andrea.

— Je... Qu'est-ce que je fais ici ?

Elle paraît particulièrement pâle. Blafarde même. Andrea hésite, puis elle retire les draps et se lève. Elle prend la jeune femme par le bras, constatant que sa peau est fraîche. Que fera-t-elle si Sienna est vraiment devenue une vampire, comme elle s'en doute ? Elle n'a pas l'air agressive ou dangereuse pour le moment, mais ne risque-t-elle pas de perdre l'esprit d'un moment à l'autre et de se jeter sur elle ? Ne devrait-elle pas juste s'enfuir, ou mieux, aller chercher son arme et l'abattre ?