16: Accident émotionnel

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- « ... Cependant, l'explosion ayant eu lieu il y a quinze minutes a tout de même fait une victime. Une jeune femme âgée d'une trentaine d'année qui faisait son plein à la station essence a été, d'après les médecins, tuée sur le coup. Nous n'avons pas encore son nom car ses papiers ont périt dans les flammes mais les enquêteurs ont précisé qu'il s'agissait d'une femme brune aux yeux verts, mesurant environ un mètre soixante. C'était une information en direct de Sacramento. »

Jan sentit des sueurs froides dans son dos et sa vue se brouilla. La veille au soir, Lisbon avait glissé dans une conversation qu'elle n'avait plus d'essence et qu'elle irait faire le plein le lendemain matin. Les phrases de la journaliste se répétaient dans sa tête. « femme brune aux yeux verts », « tuée sur le coup »,...

Il se trouvait dans la salle commune des membres du CBI, devant un écran de télévision tout neuf. A ses côtés, Cho, Rigsby et Van Pelt gardaient le silence, n'ayant aucune conscience du bouleversement intérieur que vivait Jane.

- Elle ne répond pas au téléphone. Mais ce n'est peut-être pas elle, ce n'est sûrement pas Lisbon, murmura Van Pelt plus pour se rassurer que pour rassurer ses collègues.

- Merde, déclara Rigsby. Pourquoi elle serait en retard alors ? Merde...

Cho observait Jane du coin de l'œil. Ce dernier tentait de se souvenir des paroles exactes de sa supérieure. « à peine assez d'essence pour rentrer chez moi », « m'arrêterai à le station essence pour faire le plein en venant au boulot demain ». C'était ses mots exacts. Il ne voyait pas une seule raison qui pouvait le faire espérer que Lisbon ne soit pas la victime. Il imagina le corps calciné de sa supérieure et eu de la peine à garder un souffle régulier. Ses muscles se contractèrent et une colère brutale s'empara de lui. Lentement, il s'approcha de l'écran de télévision.

- Jane, l'appela Cho.

L'asiatique sentait que Jane allait exploser. Son comportement était des plus anormaux et ses yeux s'étaient assombris. Le consultant n'entendit même pas son nom et il continua à marcher droit devant lui. Une fois qu'il fut assez près de la télévision, il passa son bras derrière l'écran et le projeta sur le sol d'un geste vif et brutal, coupant la parole à la présentatrice et faisant exploser la vitre dans un fracas épouvantable. Van Pelt laissa échapper un cri et Rigsby recula d'un pas, complètement interloqué. Cho avait fermé les yeux et rentré la tête dans ses épaules. Jane contempla le désastre dont il était l'auteur puis sans dire un mot, il sortit de la pièce, marchant lentement jusqu'aux toilettes pour hommes. Il avait peur et ce qu'il venait de commettre ne le rassurait pas. Il entra dans les toilettes et se regarda dans le miroir. Il fallait qu'il aille voir de lui-même mais pour cela, il fallait avant tout qu'il se calme et remette son masque d'homme parfaitement bien dans sa peau.

Cho s'approcha des débris et commença à ramasser les plus gros pour que personne ne se blesse. Il fut vite rejoint par Rigsby et Van Pelt. Alors qu'ils étaient tous les trois penchés, évitant soigneusement de se couper les doigts, une voix retentit derrière eux.

- Mais qu'est-ce qui s'est passé ici ? Qui a fait ça ?

- Patron, vous êtes là ! s'exclama Van Pelt. Oh mon Dieu, on a cru que c'était vous...

Lisbon ne comprit pas tout de suite de quoi parlait son employée.

- Comment ça ? J'étais juste coincée à cause d'une explosion qui...

Elle s'interrompit soudain, observant les débris qui jonchaient le sol, et elle comprit que son équipe était au courant. Ils avaient vu les informations et avaient pensé qu'elle était la victime de l'explosion de la station essence. C'était pour cela qu'ils la regardaient tous avec un air affolé et soulagé à la fois.

- Je ne suis pas la victime, je n'étais pas encore arrivée à la station. A vrai dire, j'étais à quelques dizaines de mètres. J'ai eu une chance incroyable...

Elle observa ses employés un par un, légèrement émue de les voir tous aussi bouleversés.

- Je ne comprends toujours pas ce qui s'est passé, déclara-t-elle en posant son sac à main sur une table et en s'approchant de la télévision en mille morceaux.

Cho observa ses deux collègues et d'après leurs regards, il en déduit que c'était à lui de parler.

- Jane a... plutôt mal réagit.

- Qu... Ce n'est quand même pas Jane qui a cassé la télé ?

Cho hocha la tête.

- Il est devenu fou, ajouta-t-il. D'ailleurs, il faudrait que vous alliez le rassurer. Dites-lui que vous êtes en vie avant qu'il ne fasse une autre bêtise.

Lisbon regarda tout autour d'elle le cœur battant, pour voir si elle apercevait Jane.

- Les toilettes pour hommes, indiqua Rigsby.

La jeune femme ne se fit pas prier et elle traversa le couloir en courant, se dirigeant vers la porte sur laquelle était dessiné un petit bonhomme bleu. Jane avait eu si peur pour elle qu'il s'était montré brutal et incontrôlable devant l'équipe. Elle ne pensait pas que son consultant soit capable d'un tel acte. Qu'est-ce qu'il lui était passé par la tête, bon sang ?

Elle poussa la porte d'un geste sec et découvrit Jane les deux mains de chaque côté d'un lavabo, le visage penché en avant. En entendant la porte grincer, Jane releva son visage et il sentit son estomac faire des sauts périlleux. Il était tellement persuadé qu'elle était morte, tellement sûre de devoir faire de nouveau un deuil insupportable. Il avait eu si peur de replonger dans un état lamentable qu'il avait du mal de réaliser que Lisbon était là, devant lui, en vie.

La jeune femme s'était arrêtée quelque secondes pour observer la réaction de Jane mais en découvrant à quel point il semblait anéanti, elle ressentit un élan de tendresse pour lui qu'elle ne contrôla pas. Elle reprit sa course vers lui et passa ses bras autour de son torse pour le serrer du plus fort qu'elle pu. Elle entendit Jane murmurer son nom et sentit ses bras autour de ses épaules lui rendant son étreinte. Elle retint ses larmes. Des larmes qui mêlaient la joie de savoir à quel point Jane tenait à elle et le soulagement d'être en vie. Pendant quelques secondes, elle revit les flammes s'élevant au-dessus de la station essence et ressentit de la peur. C'était seulement maintenant qu'elle réalisait que ça aurait pu être elle.

Jane ne voulait plus lâcher Lisbon. En la voyant entrer dans la pièce, il avait failli croire à un fantôme. Il n'avait plus aucun espoir qu'elle soit en vie et pourtant, elle l'était. Il repensa à la télévision qui était désormais absolument inutilisable. Finalement, il sentit Lisbon se détacher de lui.

- Ce n'était pas moi, je n'étais pas loin mais je n'y étais pas encore. J'étais bloquée, je suis désolée, j'aurais du vous appeler, je n'ai pas pensé que ça passerait aux infos, j'ai...

Jane se pencha et l'embrassa sur la joue, ce qui la fit taire immédiatement.

- Je voudrais oublier les horribles minutes qui je viens de passer, Lisbon, alors n'en parlons plus.

Lisbon plongea ses yeux verts dans les siens et elle sentit qu'il était sincère. Il ne lui en voulait pas de ne pas avoir donné de nouvelles, il voulait juste faire comme si ce début de matinée n'avait jamais existé.

- D'accord, répondit-elle. Mais ce n'est pas avec un baiser sur la joue que je vais oublier ce que vous avez fait à la télé...

Elle vit un sourire se dessiner sur les lèvres de Jane et elle sourit à son tour.

- Alors qu'est-ce que je dois faire pour me racheter ?

- Ne vous rachetez pas. Rachetez une télé.

- D'accord, répondit Jane. Mais une qui ne donne que des bonnes nouvelles alors...

- D'accord...

Jane passa ses bras autour d'elle pour la serrer une dernière fois. Elle répondit à son étreinte de quelques secondes puis ils sortirent des toilettes pour hommes, le sourire aux lèvres. Il ne restait plus qu'à expliquer la cause des dégâts à Hightower et ce ne serait pas le plus facile. Qu'importe puisque Lisbon était en vie, et par conséquent, Jane aussi.

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