Chapitre 37

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Nous sommes tous dans la voiture qui mène aux urgences. Elle n'a pas voulu appeler. Sûrement pour que l'on ne pose pas trop de questions sur la scène pas très bien réalisée. Même si ma nouvelle famille n'y a vu que du feu. J'aimerais pousser un cri, dire quelque chose ou faire quelque chose. Mais je n'arrive pas à bouger encore moins à parler et je peine à respirer. L'habitacle s'imprègne de l'odeur du sang et les gouttelettes rouges se transforment en flaque sur le siège arrière. Les jumeaux étaient contents de me revoir sur le coup mais quand ils ont vu mon état, la panique les a envahis. James essaye de me murmurer des mots réconfortants tandis que Trevor conduit à toute vitesse. Malgré que ce soit une heure tardive, les voitures sont aussi sur la route. J'ai beaucoup trop mal, je lutte de toute mes forces pour ne pas céder aux ténèbres qui m'appellent et j'aimerais pouvoir lancer un « Accélère ! » mais je n'ai pas la force. Je m'agrippe à la main de Tyler aussi fort je peux pour contenir ma douleur mais je crois que je lui fais un peu mal vu la grimace qu'il tire. Une dizaine de minutes plus tard, nous arrivons aux urgences et James se proposent pour aller chercher quelqu'un. Il revient ensuite accompagné d'une équipe de pompiers et d'un brancard. J'entends des murmures, des éclats de voix, puis plus rien. Juste le silence et le noir autour de moi.

...

Je suis réveillée par les moniteurs autour de moi qui produisent un son exaspérant. J'essaye d'esquisser un moment, mais mon corps entier est tout endolori. J'écarquille un peu plus mes yeux et découvre que je ne suis pas la seule dans la pièce. Tyler et James sont assis dans un coin de la chambre.

« - Salut... je murmure la voix cassée.

- Cameron ! lancent les jumeaux.

- Ça va ?

- Ce serait plutôt à toi que l'on devrait poser cette question, marmonne Tyler.

- Tu vas bien ? reprend James.

- Comme tu peux le voir, effectivement, je vais bien. Quand est-ce que je peux sortir d'ici ? C'est juste l'affaire d'un ou deux bleus et d'une lèvre fendue, je suis vraiment trop nulle, je vais casser tous les vases de votre maison, hein. Je vais vous devoir beaucoup d'argent après, je mens en rigolant.

- Tu as vraiment brisé ce vase ? demande Tyler.

- Oui, pourquoi ?

- Non, rien...

- Doooonc, quand est-ce que je peux sortir ?

- Cameron... Tu t'es pris un bout de verre dans le ventre, tu vas rester au moins deux jours de plus, pour être sûr que les points de suture ne s'ouvrent pas ou autres. Tu pourras retourner au lycée la semaine prochaine, chanceuse... dis Tyler.

- Vraiment ? Je peux me lever, j'affirme. Je veux sortir d'ici. »

Mes cousins me regardent d'un air exaspéré comme si je faisais ma princesse mais je ne supporte pas les hôpitaux. J'en ai horreur. Après avoir vu Grayson mourir dans son lit d'hôpital, je n'ai pas pu résister à la douleur et j'ai pris les hôpitaux en grippe. Ils n'avaient pas fait ce qu'ils auraient pu faire, ils ont achevé de le tuer. Ils auraient pu le sauver. Il aurait pu vivre.

« - Cameron, tu dois rester ici encore quelques jours... souffle James.

- Je veux sortir d'ici, je répète, déboussolée.

- Pourquoi ? Tu veux retourner faire la fête et faire n'importe quoi avec Dylan ? s'emporte Tyler.

- Non... Mais, qu'est-ce que tu en sais ?

- Parce que Dylan voulait savoir où tu étais après être sortie si vite de chez lui et en échange je voulais savoir où tu étais pendant ces quatre jours. »

Je hoche la tête silencieusement, je n'ai pas la tête à me disputer. Pas maintenant en tout cas.

« - Pourquoi étais-tu injoignable ? reprend James.

- Parce que j'étais trop occupée à faire la fête et faire n'importe quoi avec Dylan.

- Cameron... On s'est inquiétés ! On a même failli appeler la police.

- Nan, chauuuud, je me moque pour alléger la situation.

- Cam, on te parle sérieusement, me coupe Tyler. »

Je lève les yeux au ciel.

« - Vous êtes allés au lycée ?

- Oui. Maman nous a obligés. On est arrivés il n'y a pas très longtemps. Dylan va bientôt venir. »

Je hoche de nouveau la tête silencieusement. Je fixe la fenêtre sans rien dire pendant un long moment.

« - Mademoiselle, vous ne pouvez pas être là, lance une infirmière.

- J'en ai le droit. Pour peu que je sache c'est mon frère qui est en train de mourir, je lance en pleurs. Personne ne me fera sortir de là avant qu'il soit sur pied, avec moi sur le chemin de la sortie de ce putain d'hôpital.

- Mademoiselle, ne me forcez pas à appeler la sécurité. Je sais que c'est difficile de voir votre frère dans cet état-là, mais nous faisons du mieux que nous pouvons pour le soigner malgré des blessures très graves. Maintenant laissez-moi faire mon travail.

- Votre travail, je ricane, vous n'avez rien fait pour lui depuis son arrivée. Vous êtes incompétente.

- J'appelle la sécurité dans la chambre 326, dit-elle en prenant sa radio. Adolescente rebelle. »

La sécurité arrive presque dans l'instant mais je ne flanche pas. Je ne quitterai pas cette chambre tant que l'on ne me dira pas que Grayson va bien. Qu'il va s'en sortir. Mais je suis sûr que tout va bien et que dans quelques jours, nous retournerons à la maison, ensemble.

Comme je refuse de bouger, l'homme de la sécurité m'empoigne les bras, mais je hurle. Soudain, le bip régulier de la machine qui mesure son rythme cardiaque produit un son constant. LE son constant.

« - Grayson, non, Grayson. Reste. RESTE POUR MOI. Grayson, je crie alors que l'infirmière se précipite vers son corps. Vous voyez. Vous l'avez achevé. Vous n'avez pas fait ce que vous pouviez, je murmure. »

Je réussis à me dégager de l'étreinte du garde et précipite à mon tour vers le lit où siège mon frère mort. Je pleure toute les larmes de mon corps pendant plusieurs heures. Jusqu'à ce que les larmes ne coulent plus mais que la douleur soit quand même là, à me torturer le cœur.

« - Cameron ? Cameron. Tu étais... plus là, lance Tyler.

- Oui...

- Dylan est là, on va euh... te laisser avec lui.

Je tourne la tête lorsqu'ils se lèvent pour sortir et j'essaye d'enlever la perfusion que j'ai à la main pour sortir.


« - Cam. Ça va ? Tu vas bien ?

- Sors-moi de là. »

CameronOù les histoires vivent. Découvrez maintenant