Chapitre 50

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Je connecte mon téléphone à l'enceinte et mets en route la chanson. Les premières notes résonnent dans la pièce et je me place au centre. Je commence avec un grand jeté, une arabesque et une double attitude qui me donnent une sensation de plénitude. C'est comme si je comblais un des vides qui étaient en moi depuis si longtemps, comme si je redevenais moi-même après tout ce temps. Je danse et mes souvenirs déferlent dans ma tête et la musique prend possession de moi. Des frissons me parcourent lors de ma cabriole et je finis en beauté par mes pirouettes. Je garde la tête haute comme maman me l'a appris. Lorsque se jouent les dernières notes de musique, je lève les yeux vers le plafond et aperçois Noah qui me regarde à travers une salle vitrée, fier. Il est enfin fier de moi après tout ce qu'il s'est passé entre nous et je ne lui en serai pas plus reconnaissante.

La prestation finie, les jurys se contentent de me regarder et, quelques secondes après, ils se mettent à applaudir. Ils se concertent et un instant plus tard, l'homme au milieu me regarde en souriant. J'ai tellement peur que mon ventre fait dix-huit bonds par seconde et j'ai juste envie de vomir tout ce que j'ai mangé à midi.

« - Tu es la bienvenue au sein de la Los Angeles Dance Academy. Tu étais tout simplement époustouflante. Les émotions que tu as mises dans ta prestation étaient tellement authentiques que l'on ressentait toute la détresse présente dans tes mouvements. Nous avons l'honneur de t'accueillir ici. Toutes les modalités de ton inscription se feront avec Mme. Kate. Tu peux disposer. »

On ne me laisse pas le temps de répliquer que la femme qui venait me balader dans les couloirs quand je suis arrivée, ouvre la porte violemment, comme si on venait de la biper. Elle m'accompagne jusqu'au vestiaire.

« - Je suis Mademoiselle Kate, mais appelle moi juste Kate. Ton niveau est assez élevé, alors... dit-elle en réfléchissant à voix haute. Tu auras cours le mardi, jeudi et samedi avec le groupe à dix-sept jusqu'à vingt-et-une heures. Le lundi et mercredi, de dix-huit heures à vingt-deux heures. Aucun retard n'est accepté. »

Sa phrase à peine finie, elle claque la porte. Elle est pressée cette Kate.

Je me change, encore essoufflée et en sueur. Ce que le jury m'a dit m'a profondément touché et je suis tellement contente d'avoir repris la danse. Tout cela grâce à Noah. Elle me permet de m'exprimer sans les mots ce qui est parfois assez difficile avec moi...

Je me dépêche de sortir et je cours rejoindre Noah qui m'attend derrière la porte et je l'embrasse. Je l'aime, je l'aime. Je m'écarte de lui avec pour objectif de lui avouer ce que je ressens mais rien ne sort. Pour combler le vide, je lui demande comment il a trouvé ma chorégraphie.

« - J'en avais le souffle coupé. C'était... Tu étais juste magnifique. Gracieuse. Je n'ai pas les mots.

- Merci, c'est grâce à toi tout cela.

- Je n'y suis pour rien, il faut juste parfois forcer le destin. »

Noah m'embrasse sur le front et nous partons, heureux, et rentrons chez lui, après que je me sois changée. Le trajet dure une demi-heure, à peu près, et je manque de m'endormir plusieurs fois. Je suis épuisée. Comme si j'ai fait la prestation de ma vie et que mon énergie s'est envolée à la fin de la chanson. Quand nous entrons dans sa chambre, je m'affale sur son lit et lui, s'assoit sur sa chaise. Pendant quelques minutes, j'apprécie le silence serein qui s'est installé. On n'a pas grand-chose à dire car on est juste fatigués. Au bout d'un certain temps, Noah se racle la gorge.

« - Cameron ?

- Oui ?

- Tu dois rentrer chez toi.

- Je sais... Mais... Je ne sais pas, je n'ai plus envie... J'ai peur.

- Jamais tu ne revivras ce que tu as vécu. Plus jamais ta tante, ni personne, ne remettra la main sur toi. Je te le promets. »

Au final, il me convainc de rentrer et une demi-heure plus tard, nous sommes sur le chemin de la maison de mes cousins.

Quand j'arrive à destination, mon ventre fait des nœuds et une boule se forme dans ma gorge. Je ne m'imaginais pas qu'un endroit me donnerait de telle sueur froide. Ma main tremblante pousse la portière mais à la dernière minute, je me rétracte et me recroqueville sur mon siège.

« - Noah, s'il te plaît,ne me laisse pas, je murmure.»

CameronOù les histoires vivent. Découvrez maintenant