Chapitre 55

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La journée se termine et Dylan m'attend plus loin pour ne pas se faire remarquer. Nous voir ensemble ferait un très bon de sujet de conversation pour certaines personnes et je n'ai pas vraiment envie d'être le centre de celles-ci. J'ai dit aux jumeaux que j'avais besoin de marcher et que je rentrerai à pied. Cela dit, ce n'est pas totalement faux. Je rentre à pied... mais avec Dylan. Pour ce qui est de Noah, je ne l'ai pas croisé lors du reste de la journée, sauf en cours, mais je n'étais pas à côté de lui, du coup je lui ai juste envoyé un message pour le prévenir.

Je rejoins Dylan et pendant quelques minutes, un blanc gênant s'installe entre nous. Nous nous regardons et nous explosons de rire, comme si nous étions de bons vieux amis.

« - Dylan. Il faut que l'on parle sérieusement, je commence.

- Cameron, je sais, mais je... j'ai peur d'en parler. Ca rendra tout...

- Encore plus réel. Je sais.

- Cameron, je t'aime.

- Dylan, arrête. C'est faux. Je t'ai trompé et humilié devant tout le monde et tu as fait de même pour moi. Ce n'est pas de l'amour.

- Si.

- Je suis toxique pour toi. Regarde ce que j'ai fait. De même pour moi. On se tuait à petit feu l'un et l'autre et... ce n'est pas bien. Il faut que tu vives. »

Plus je parlais, plus je me rendais compte d'une chose. Que je suis toxique pour tout le monde. Je suis même nocive pour moi-même. Je me détruis à petit feu. Je détruis tout ce que je touche. Je tue les gens sans m'en rendre compte. Je suis dangereuse. Je fais même du mal à Noah en le recalant à chaque fois qu'il veut m'aider car je sais que les lendemains meilleurs qu'il me promet n'arriveront jamais. Pourtant, je sais qu'il ne veut que mon bien. Je me souviens de Grayson qui me mettait en garde contre les garçons qui détruisent les filles avec une relation toxique car ils sont eux-mêmes détruits de l'intérieur. C'est ironique car je fais maintenant partie de ces gens... Il me manque tellement.

« - Dylan... Tu veux bien m'expliquer ce qu'il s'est passé ? »

Je ne pouvais plus rester dans l'ignorance. Toutes ces rumeurs sur ce qu'il s'était passé avec Dylan, je les connaissais par cœur. Mais je ne connaissais pas la vérité. Je le scrute, attendant une réaction mais il reste de marbre pendant quelques minutes. On arrive devant chez lui et voyant qu'il ne dit toujours rien, je me prépare à retourner chez moi. Il me tourne le dos et fixe le perron de sa maison. Je murmure un bref « salut » et m'en vais. Quelques secondes plus tard, il m'appelle. Je me retourne mais il est encore dos à moi, devant sa porte.

« - Cette soirée devait être l'une des meilleures. Je croyais que tu m'aimais et mes parents étaient enfin revenus. Mais, tu as disjoncté et ton a... ton autre petit ami, aussi... dit-il alors que je m'approche. »

Une fois à sa hauteur, je remarque les larmes qui sillonnent ses joues. Elles laissent des traces comme si elles voulaient marquer au fer blanc leur présence. Cela me brise tellement le cœur que je ne fais pas attention au titre de petit ami qu'il a attribué à Aspen.

« - Ecoute... Je n-, je commence.

- Laisse-moi finir, me coupe-t-il bruquement. Il t'a balancé et tu n'as pas voulu assumer les conséquences de tes actes. Tu te droguais, tu fumais, tu sortais avec lui et avec moi. T'es sortie et t'avais laissé un bordel pas possible. Tout le monde a commencé à paniquer et... Aspen était bien content. Je voulais te rejoindre, te demander des explications, mais, Noah et ta tante avaient été plus rapide que moi. J'ai dû rester écouter ton oncle qui s'excusait car il n'était pas au courant de tout ça. J'ai dû rester écouter mes parents et ceux d'Aspen dire à quel point ils avaient honte de toi et que tu n'étais qu'une salope. J'ai dû rester voir Aspen jubiler. Le repas s'est terminé en silence et chacun est retourné chez soi. Sauf moi. J'ai inventé que j'étais invité à dormir chez Cole et je suis allé me défoncer en boîte. J'ai même couché avec une fille dont je ne connaissais pas le nom. Je n'avais ni voiture, ni téléphone quand je suis sorti et je me suis mis en tête de rentrer à pied. Mais j'étais vraiment pas en l'état d'aller quelque part, même à pied. Tout ça pour oublier ma colère - oh, Cameron, j'étais tellement en colère - ...et à quel point tu avais brisé mon cœur. Ça a marché mais j'ai aussi oublié que je n'étais pas tout seul sur terre et je me suis fait percuter par une voiture. Je suis resté une semaine à l'hôpital et puis deux autres chez moi, cloué à mon lit. J'ai rencontré Angel, le jour de la rentrée. Elle est restée coller à moi depuis le premier jour, mais je ne peux pas m'arrêter de penser à toi. Je ne peux plus. Je ne sais pas pourquoi mais tu es restée, gravée là, dans ma tête. Quoi qu'il arrive, tout me rappelle toi. C'est parce que... parce que je t'aime, Cameron. Je ne peux plus le nier et je n'ai jamais ressenti ça pour personne parce qu'avant personne n'a jamais autant compté que toi. Tu n'arrêtes pas de dire que ce n'est pas de l'amour, mais tu ne sais même pas ce que je ressens ! Tu oses porter un jugement sur quelque chose tu ne sais pas, et ça me tue. Ça me tue, chuchote-t-il. »

Je ne m'étais pas rendue compte à quel point je l'avais détruit. Ses larmes ne cessent de couler et je n'arrive pas à prononcer un mot à cause de la boule dans ma gorge. Dire que je me sens mal serai un euphémisme, mais j'ai le sentiment que je n'ai même pas le droit de ressentir cette tristesse, c'est moi qui l'ai causée, je ne devrais même pas pouvoir être là à l'écouter. Comment on peut être un tel monstre ?

« - Je suis désolée, je parviens à articuler, même si tous les mots qui existent ne pourrait même pas me faire pardonner.

- Tu ne savais pas. »

Alors, on reste là, pendant quelques minutes ou quelques heures, je ne sais plus, assis sur les marches du perron à regarder le ciel prendre une teinte de rose, puis orangée et ensuite devenir noir, constellé d'étoiles, à attendre que nos larmes  sèchent enfin - si c'est même possible. Mais les miennes semblent ne jamais vouloir s'arrêter.

CameronOù les histoires vivent. Découvrez maintenant